L’agence de secours de l’ONU avertit d’une crise le mois prochain sauf si les pays donateurs apportent 60 millions de dollars (53,6 millions €)
Jennifer Rankin pour le Guardian à Bruxelles – 15 mai 2019
Plus d’un million de personnes risquent de souffrir de la faim à Gaza le mois prochain sauf si les donateurs internationaux comblent avec 60 millions de dollars (53,6 millions €) un trou noir largement créé par des coupures de l’aide aux réfugiés palestiniens par l’administration Trump, affirme une agence de l’ONU.
L’office de Secours et de Travaux pour les Réfugiés Palestiniens, de l’ONU, (UNWRA) qui fournit de la nourriture à plus d’un million de personnes dans la bande de Gaza, fait appel à l’UE, aux États du Golfe, et à de grandes économies émergentes comme la Russie et la Chine pour qu’ils « s’engagent fermement » sur 60 millions de dollars d’ici le milieu de juin pour empêcher la famine.
« Nous sommes dans une situation critique en terme de livraison de nourriture » dit Matthias Schmale, le directeur des opérations de l’UNWRA à Gaza. « Nous avons plus d’un million de personnes qui reçoivent des livraisons alimentaires trimestrielles et nombre de ces personnes ne survivraient pas vraiment sans cet apport.
S’exprimant à Bruxelles avant une réunion de représentants européens, Schmale a dit que « la raison la plus immédiate » de ce trou dans le financement a été la perte du soutien des États Unis.
Les USA ont annoncé en 2018 qu’ils coupaient tout financement à l’UNWRA, une perte brutale de la part de celui qui était le premier donateur de l’agence jusque là, ayant apporté 360 millions de dollars en 2017 (321,6 millions €).
Schmale dit que cela aurait été « une autre histoire » si les USA avaient réduit progressivement leur financement, même si cela eût été « malheureux et triste ». Mais la disparition des fonds du jour au lendemain a causé des ravages, forçant l’UNWRA à pratiquer des coupes sévères sur les programmes de santé et d’emploi dans la bande de Gaza.
L’agence a coupé son budget d’aide à la santé mentale de 50% dans la seconde moitié de 2018, ce qui a réduit la disponibilité du soutien aux enfants dans cette région déchirée par la guerre. Elle a aussi effectué des coupes dans un programme qui crée du travail à court terme pour la population de Gaza, une bouée de sauvetage dans une économie où le taux de chômage est de 53%. En 2018, 10 139 personnes ont bénéficié de contrats de travail de courte durée, soit 48% de moins que l’année précédente.
L’UE est passée au rang de premier donateur à l’UNWRA, avec un supplément de ressources venant de la plupart des pays membres – l’Allemagne, le Royaume Uni et la Suède ont fait les contributions les plus importantes en 2018. Mais Schmale n’a pas observé un rôle significatif joué par ce bloc pour construire la paix dans cette région, bien qu’il ait félicité la cheffe de la politique étrangère de l’UE, Federica Mogherini.
Il a dit : « Ce que j’entends beaucoup à Gaza est que les USA, à cause de leur comportement visiblement erratique, ne sont plus considérés comme un intermédiaire crédible. L’UE a perçu un capital politique (mais) les États membres sont trop préoccupés par eux-mêmes pour qu’on attende de l’UE qu’elle joue un rôle ».
L’UNWRA, créée en 1949 pour apporter un secours de court terme aux réfugiés palestiniens après le conflit arabo-israélien de 1948, gère les écoles, les hôpitaux et les services sociaux dans cinq zones dont la Cisjordanie, la Jordanie, le Liban et la Syrie.
C’est un renfort important pour Gaza soumise à un blocus total aérien, terrestre et maritime depuis 2007. L’impasse politique, le conflit avec Israël et les divisions au sein des factions palestiniennes ont laissé le territoire en ruines sur le plan économique, sans services de santé et sociaux, avec presque aucun accès à l’eau potable et seulement quatre ou cinq heures d’électricité par jour.
Aucune paix n’étant en vue, une génération grandit à Gaza qui n’a connu qu’un territoire fermé et n’a jamais rencontré un Israélien.
« C’est une course contre la montre » a dit Schmale, suggérant que des enfants sans espoir se tournent vers l’extrémisme. « Malgré leur expérience, les enfants – par internet pour la plupart – sont connectés au reste du monde (et) ils rêvent de l’avenir mais… cela ne va pas de soi. Si le blocus continue, cela changera, c’est pourquoi je comprends les parents palestiniens : ils sont soucieux pour leurs enfants ».
Traduction SF pour l’Agence Media Palestine
Source: The Guardian