L’histoire de l’assassinat de leaders palestiniens par Israël

6 novembre 2013

L’auteur et intellectuel palestinien Ghassan Kanafani a été tué à Beyrouth en 1972 dans un attentat à la voiture piégée, qui aurait été organisé par des agents israéliens (PHOTO: Al Akhbar English).

Le 6 novembre, plusieurs organes de presse ont rapporté que la veuve de Yasser Arafat, l’ancien président de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) avait annoncé que les résultats d’une enquête suisse sur la mort de feu son mari avaient conclu à un empoisonnement par du polonium, une substance radioactive. En novembre 2012, la dépouille d’Arafat fut exhumée pour que les enquêteurs médicaux prennent des échantillons de ses restes en vue d’un test au polonium, dans le cadre d’une enquête lancée par les autorités françaises à la demande de Souha Arafat, à la suite de la découverte, l’été dernier, de traces de la substance hautement toxique sur certains des effets personnels de son mari. En octobre 2004, après deux ans de siège de l’armée israélienne sur son quartier général de Cisjordanie, Arafat tomba gravement malade. Deux semaines plus tard, il fut transporté dans un hôpital militaire français où il mourut. Les médecins conclurent à un AVC causé par un désordre sanguin mystérieux. À ce moment là, de nombreux Palestiniens ont suspecté un meurtre. Depuis des années, il avait survécu à nombre de tentatives d’assassinat par Israël et tout juste six mois avant sa mort, Ariel Sharon, alors premier ministre d’Israël dit que l’accord qu’il avait passé avec le président américain George W. Bush promettant qu’Israël ne tuerait pas Arafat, n’était plus valable, et déclara: « Je me retire de l’accord au sujet d’Arafat ». Deux ans avant cette déclaration, dans une interview publiée en février 2002, Sharon avait dit à un journaliste israélien qu’il regrettait de ne pas avoir tué Arafat alors qu’il en avait l’occasion lors de l’invasion du Liban par Israël en 1982, disant: « Je regrette que nous ne l’ayons pas liquidé ». En 2002, le premier ministre actuel, Benjamin Netanyahu, alors dans l’opposition, suite à son premier mandat de premier ministre (1996-1999), déclara au comité central du Likoud : « Nous devons éradiquer le régime d’Arafat complètement et totalement et le retirer, lui, des parages…Cette chose-là doit être comprise : si nous n’éliminons pas Arafat et son régime, la terreur reviendra et augmentera. Et ce n’est que si nous les éliminons, qu’il y a une chance de tourner une nouvelle page dans nos relations avec les Palestiniens ». Lorsque Arafat est mort, Netanyahou était ministre des finances dans le gouvernement de Sharon.

 

LISTE PARTIELLE DES ASSASSINATS ISRAÉLIENS DE PALESTINIENS

2012 – le 14 novembre, deux jours avant que les factions de Gaza ne signent une trêve après plusieurs jours de violence, Israël assassine le leader de la branche militaire du Hamas, Ahmed Jabari, menaçant une fois de plus d’accroître la violence après une semaine au cours de laquelle six civils palestiniens ont été tués et des dizaines de plus blessés dans les attaques israéliennes. Bien que du côté israélien, les représentants officiels savaient que Jabari était en train de mettre au point une trêve de longue durée et qu’il était l’une des rares personnes à Gaza à pouvoir la faire respecter, ils le tuent quand même, et c’est le point de départ d’une attaque d’une semaine sur Gaza qui tue plus de 100 civils palestiniens, dont au moins 33 enfants et en blesse plus de 1 000 autres.

2012 – le 9 mars, Israël viole un cessez-le-feu négocié avec l’Égypte et assassine la tête des Comités Populaires de la Résistance (PRC) basés à Gaza, Zuhair al-Qaisi, déclenchant une autre série de violences dans laquelle au moins quatre civils palestiniens sont tués et de nombreux autres blessés. Comme à son habitude, Israël prétend agir en légitime défense contre une attaque imminente prévue par le PRC, tout en ne fournissant aucune preuve qui donnerait corps à son allégation.

Après l’assassinat, le journaliste israélien Zwi Bar’el écrit dans le journal Haaretz : « Il est difficile de comprendre sur quoi se fonde l’affirmation selon laquelle Israël n’aspire pas à une escalade de la situation. On pourrait supposer qu’une réponse armée de la part des Comités Populaires de la Résistance ou du Jihad Islamique à l’assassinat ciblé d’Israël a été prise en compte. Mais est-ce qu’une seule personne a évalué la possibilité que cette violente réaction entraîne un nombre plus important de blessures que n’importe quelle attaque terroriste que Zuhair al-Qaisi, le secrétaire général des Comités Populaires de la Résistance, aurait pu mener ? En l’absence d’une réponse claire à cette question, on peut faire l’hypothèse que ceux qui ont décidé d’assassiner al-Qaisi ont compté, une fois de plus, sur la stratégie de ‘réponses mesurées’, dans laquelle un coup frappé par Israël entraîne une réaction qui entraîne une contre-réaction israélienne ».

2010 – En janvier des assassins israéliens soupçonnés tuent le leader vétéran du Hamas, Mahmoud al-Mabhouh, dans un hôtel de Dubaï. Comme par le passé, les agents israéliens qui passent pour avoir commis le meurtre utilisent des passeports étrangers falsifiés et volés, de pays occidentaux, dont la Grande Bretagne, la France, l’Irlande et l’Allemagne, occasionnant un tollé international.

2009 – Le 15 janvier, une attaque aérienne tue Saïd Seyam, le ministre de l’intérieur du Hamas et membre du Parlement Palestinien.

2009 – Le 1er janvier, une attaque aérienne sur la maison du commandant militaire supérieur du Hamas, Nizar Rayan, le tue avec 15 membres de sa famille, dont 11 de ses enfants.

2006 – Le 8 juin, Israël assassine Jamal Abu Samhadana, fondateur des Comités Populaires de la Résistance et ministre de l’intérieur du gouvernement de l’Autorité Palestinienne dirigé par le Hamas, tuant trois autres membres du PRC dans la foulée.

2004 – Le 17 avril, Israël assassine Abdel Aziz Rantisi, un des cofondateurs du Hamas et son chef depuis l’assassinat du leader spirituel du Hamas, Sheik Ahmed Yassin, un mois plus tôt. Rantissi est considéré comme un des modérés du Hamas.

2004 – Le 22 mars, Israël assassine le leader spirituel et cofondateur du Hamas, Sheik Ahmed Yassin, âgé de 67 ans, qui est en chaise roulante, alors qu’il quitte une mosquée de Gaza après la prière, tuant en même temps neuf passants innocents.

2003 – Le 8 mars, Israël assassine Ibrahim Maqadma, un des fondateurs du Hamas et un de ses principaux commandants militaires.

2002 – Le 23 juillet, quelques heures avant qu’un cessez-le-feu largement couvert par la presse, déclaré par le Hamas et d’autres groupes palestiniens, ne prenne effet, Israël bombarde un immeuble d’habitation en pleine nuit dans la bande de Gaza densément peuplée, pour assassiner le leader du Hamas, Salah Shehada.

Quatorze civils, dont neuf enfants, sont également tués dans l’attaque et cinquante autres blessés, ce qui fait échouer le cessez-le-feu et se poursuivre la violence.

2002 – Le 14 janvier, Israël assassine Raed Karmi, un leader militant du Fatah, après un accord de cessez-le-feu sur lequel tous les groupes militants palestiniens s’étaient mis d’accord le mois précédent, ce qui entraîne son annulation. Plus tard en janvier, intervient la première attaque suicide de la Brigade des Martyrs d’Al-Aqsa liée au Fatah.

2001 – Le 23 novembre, Israël assassine le militant de haut rang du Hamas, Mahmoud Abu Hanoud. Le Hamas adhérait à ce moment-là à un accord avec le dirigeant de l’OLP, Yasser Arafat, stipulant de ne pas attaquer de cibles à l’intérieur d’Israël. Après le meurtre, Alex Fishman, le correspondant militaire du journal de droite, Yediot Aharonot, écrit dans un article en Une:

« Nous nous trouvons une fois de plus avec effroi, devant l’obligation de nous préparer à une nouvelle attaque terroriste de masse à l’intérieur de la ligne verte [la frontière d’Israël avant 1967]… Quiconque a donné le feu vert à cette liquidation, savait très bien qu’il anéantit par là d’un seul coup l’accord tacite entre le Hamas et l’Autorité Palestinienne ; en vertu de cet accord, le Hamas devait éviter, dans un avenir proche, les attaques suicides à l’intérieur de la ligne verte… »

2001 – Le 27 août, c’est avec des hélicoptères de combat étatsuniens Apache, qu’Israël assassine Abu Ali Mustafa, le secrétaire général du Front Populaire pour la Libération de la Palestine, de gauche. En réponse, des membres du FPLP assassinent le ministre du tourisme israélien, Rehavam Ze’evi, connu comme partisan de la ligne dure, qui avait défendu le nettoyage ethnique des Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza.

2001 – Le 15 août, des soldats israéliens camouflés assassinent Emad Abu Sneineh, un membre de la milice Tanzim liée au Fatah, en tirant sur lui à bout portant.

2001 – Le 5 août, les forces israéliennes assassinent Amer Mansour Habiri, membre du Hamas, dans la ville cisjordanienne de Tulkarem, en lançant des missiles sur sa voiture depuis des hélicoptères de combat.

2001 – Le 29 juillet, Israël assassine Jamal Mansour, un membre de haut rang de la branche politique du Hamas. 

2001 – Le 25 juillet, alors que des responsables de la sécurité d’Israël et de l’Autorité Palestinienne doivent se rencontrer pour consolider un cessez-le-feu de six semaines en pleine violence de la deuxième intifada, Israël assassine Salah Darwazeh, membre de haut rang du Jihad Islamique à Naplouse.

1997 – En Septembre, le gouvernement israélien du premier ministre Benjamin Netanyahou tente d’assassiner Khaled Mechaal, le président du bureau politique du Hamas, à Amman, en Jordanie. Des agents israéliens, à l’aide de faux passeports canadiens, tentent d’assassiner Mechaal en lui injectant du poison dans l’oreille. Les assassins manqués sont rapidement capturés et, dans le tollé diplomatique qui s’ensuit, le roi Hussein de Jordanie menace de rompre les relations avec Israël et de juger puis de pendre en public les agents israéliens, sauf si Israël fournit l’antidote au poison. Le gouvernement de Netanyahou livre l’antidote, sauvant la vie de Meshaal. En vertu de l’accord passé alors, Israël libère également de prison le leader spirituel du Hamas, Ahmed Yassin.

1996 – Le 5 janvier, Israël assassine le commandant militaire du Hamas, Yahya Ayash, connu comme « L’ingénieur », en faisant exploser des explosifs placés dans le téléphone portable qu’il utilise. Dans les deux mois qui suivent, le Hamas répond en lançant quatre attaques suicides qui tuent plus de cinquante Israéliens et les renseignements israéliens concluent ensuite: “les attaques ont probablement été une réaction directe à l’assassinat de Ayash.” 

1995 – En octobre, des tireurs israéliens assassinent à Malte Fathi Shiqaqi, un des fondateurs du Jihad Islamique, alors qu’il quitte son hôtel à La Vallette.

1994 – Le 2 novembre, Israël assassine le journaliste Hani Abed, lié au Jihad Islamique, en ayant piégé sa voiture.

1988 – Le 16 avril, Israël assassine Khalil al-Wazir, dirigeant de haut rang de l’OLP, en Tunisie, alors même que l’administration Reagan essaie d’organiser une conférence internationale pour négocier une paix entre Israéliens et Palestiniens. Le Département d’État étatsunien condamne le meurtre comme « acte d’assassinat politique ». Au cours des manifestations qui s’ensuivent dans les territoires occupés, sept Palestiniens de plus sont tués à balles par les forces israéliennes.

1986 – Le 9 juin, Khalid Nazzal, le secrétaire du Front Démocratique pour la Libération de la Palestine, est tué par un tir par des agents israéliens à Athènes, en Grèce.

1983 – Le 21 août, un haut représentant de l’OLP et aide principal de Yasser Arafat, Mamoun Meraish, est visé par un tir et tué par des agents israéliens à Athènes en Grèce. Selon des articles ultérieurs de la presse israélienne, la future ministre de l’intérieur (actuellement ministre de la justice), Tzipi Livni, est impliquée dans le meurtre de Meraish.

1978 – Le 28 mars, Wadie Haddad, un membre haut placé du Front Populaire de Libération de la Palestine, meurt en Allemagne de l’Est d’un poison à effet retard absorbé plusieurs mois auparavant. Il a été révélé plus tard que des agents israéliens étaient derrière ce meurtre.

1972 – Le 8 juillet, l’auteur et intellectuel palestinien Ghassan Kanafani et sa nièce de 17 ans sont tués à Beyrouth par une voiture piégée, placée, à ce qu’on croit, par des agents israéliens. Membre de l’organisation de gauche, le Front Populaire de Libération de la Palestine, Kanafani était considéré comme une figure majeure de la littérature dans le monde arabe et au-delà.

1972 – Pendant les années1970, Israël exécute une série d’assassinats contre des Palestiniens qu’il accuse d’être impliqués dans l’organisation militante Septembre Noir, responsable de la prise d’otages d’athlètes israéliens aux Jeux Olympiques 1972 de Munich en Allemagne, qui a donné lieu à la mort de 11 athlètes et responsables israéliens. Le 16 octobre 1972, Wael Zwaiter, un intellectuel palestinien renommé et représentant de l’OLP en Italie, est tué à balles par des agents israéliens à Rome. Israël l’accuse d’être de Septembre Noir, une accusation énergiquement rejetée par des représentants de l’OLP et par ceux qui le connaissaient et qui ont souligné que Zwaiter était un pacifiste.

Traduction : SF pour l’Agence Media Palestine
Source : IMEU – Institut pour la Compréhension du Moyen Orient

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