Soutenir les artisan.e.s palestinien.ne.s

Par Audrey Yarbrough, le 24 novembre 2021

Les artisan·e·s palestinien·ne·s durement frappé·e·s par la pandémie de COVID-19 ont réussi à survivre grâce, en partie, à un lieu de vente de Ramallah qui fonctionne sans relâche : Handmade Palestine (Fait main en Palestine)

À la rencontre de l’artisane.
Femmes de Hébron a été créée dans le cadre des efforts coopératifs de l’association pour fournir à des femmes du district de Hébron des ressources pour elles-mêmes et pour leurs familles au moyen de la fabrication et de la vente d’objets d’artisanat palestinien. Les cent cinquante femmes qui produisent les objets mis en vente sont de huit villages et villes du district de Hébron. Le produit des ventes leur apporte à elles et à leurs familles un revenu complémentaire qu’elles ne pourraient pas se procurer par un travail à temps partiel.
(Photo avec l’aimable autorisation de Handmade Palestine)

Avant la pandémie de COVID-19, Femmes de Hébron, un collectif d’artisanes de commerce équitable, employait 150 femmes de huit villages des collines environnant Hébron. Aujourd’hui, seules 38 femmes y sont encore.

Dans la Palestine post-covid, c’est un succès.

De nombreuses boutiques d’artisanat ont congédié leur personnel ; certaines ont fermé définitivement. Le marché des produits de l’artisanat palestinien est nourri par les touristes et pendant vingt mois consécutifs, le tourisme s’est arrêté. En temps ordinaire, Israël dissuade et empêche les visiteurs d’entrer en Palestine occupée ; pendant le COVID, ils ont complètement fermé les frontières. Les artisan·e·s de toute la Palestine en ont été anéanti·e·s. Face à cette épreuve, Femmes de Hébron a réussi à se maintenir. Son succès est dû, en partie, à l’infatigable action d’un lieu de vente de Ramallah : Handmade Palestine.   

Handmade Palestine (Fait main en Palestine) est une boutique qui se donne pour mission de promouvoir le commerce équitable. Le projet, géré par des bénévoles et qui a son siège dans un café, a des frais généraux extrêmement bas. Cela lui permet de bien payer les artisan·e·s et d’utiliser ses maigres profits à planter des arbres avec l’association Mashjar Juthour, un projet de préservation et de restauration. Tandis que la plus grande part de chaque vente de Handmade Palestine va directement aux artisan·e·s, un pourcentage est dévolu à la plantation d’arbres endémiques et à l’aide apportée à des Palestinien·ne·s pour les relier à leur patrimoine écologique. Mieux : ce qui est vendu est vraiment, vraiment joli.

(Photo : Handmade Palestine)

Des housses de coussins brodées jusqu’aux ceintures de yoga en tissu de keffieh et de l’huile d’olive bio aux planches à découper en bois d’olivier, les produits de Handmade Palestine sont de grande qualité et de confection très soignée. Cela vaut à la fois pour les objets et pour les histoires qui les sous-tendent. Des chameaux en feutre sont fabriqués par des femmes bédouines de Khan al Ahmar, un village situé entre deux colonies israéliennes sous le coup d’une menace de démolition imminente. Des masques en tissu de keffieh brodé sont cousus par des femmes du camp de réfugiés de al-Amari, dont les habitant·e·s souffrent de surpeuplement, de manque de services et font face régulièrement à des incursions nocturnes de l’armée israélienne. Des décorations de Noël en feutre viennent de Ma’an Lil Hayyat, une maison historique de Bethléem transformée en espace social où des individus ayant des besoins particuliers peuvent socialiser et, s’ils ou elles le veulent, travailler ensemble en toute dignité dans un environnement qui les soutient. Acheter à Handmade Palestine maintient ces communautés marginalisées en activité.

L’activité artisanale fait plus que procurer un revenu, elle renforce la communauté, rend hommage au rôle des femmes dans la société et met en avant le soumoud, ou constance, face à l’occupation

Une des premières organisations avec laquelle Handmade Palestine a noué un partenariat a été Femmes de Hébron. En 2005, avant de multiplier les points de vente et de recevoir des invitations internationales, l’initiative fut celle d’une seule femme, Nawal Slemiah, qui vendait de l’artisanat par correspondance. À l’époque, le mari de Nawal était dans une prison israélienne (40% des hommes des territoires occupés ont été détenus dans des prisons israéliennes, ce qui n’est pas surprenant quand la participation à une manifestation est illégale et que des échappatoires telle « la détention administrative » permettent à Israël de détenir légalement des Palestiniens jusqu’à six mois, sans accusation et de prolonger la détention, sans accusation, à plusieurs reprises). Nawal avait désespérément besoin d’argent et n’avait pas de compétences employables, mais elle savait broder.

La vieille ville de Hébron est dangereuse. Des colons vivent au-dessus du souk, des checkpoints et des installations militaires encadrent les entrées. Lorsque Nawal a ouvert sa boutique, l’espace était désert. Seuls quelques touristes intrépides passaient par là, pour être témoins de la cruauté de l’occupation aussi visiblement exposée. C’est alors que la fondatrice de Handmade Palestine a rencontré Nawal. Nawal ne parlait pas beaucoup anglais à ce moment-là. Elle n’avait pas entendu parler du mouvement du commerce équitable ni rencontré de coopérative. Elle vendait de l’artisanat pour survivre et pour aider des voisins à en faire autant.

Handmade Palestine a donné à Nawal les éléments de langage pour commercialiser son projet et celui-ci a évolué de la boutique d’une femme à tout un mouvement local. Voyant le succès de Nawal, d’autres ont ouvert des boutiques dans la vieille ville. Hébron est encore un lieu dangereux. Il y a toujours des colons au-dessus du souk et, après des incursions militaires, on peut trouver dans les rues des grenades lacrymogènes, mais un espace palestinien historique a été revendiqué, en partie grâce aux artisan·e·s et aux ventes qui soutiennent leur travail. En tant que fondatrice de Femmes de Hébron, Nawal Slemiah diffuse maintenant son artisanat au plan international. Lorsqu’elle s’adresse à des groupes, elle leur dit ce qu’elle sait d’expérience : l’activité artisanale fait plus que procurer un revenu, elle renforce la communauté, rend hommage au rôle des femmes dans la société et met en avant le soumoud, ou constance, face à l’occupation

Handmade Palestine anime une campagne de financement solidaire, actuellement, sous forme de bazar en ligne . Si vous soutenez la Palestine, soutenez les artisan·e·s palestinien·ne·s s’il vous plaît. Le but tacite de l’occupation est d’exercer une pression sur les hommes et femmes de Palestine jusqu’à ce qu’ils renoncent, partent dans des villes, émigrent. Des achats auprès de Handmade Palestine font davantage que générer un revenu : ils aident les Palestinien·ne·s à rester sur leur terre, à préserver la terre et à pratiquer le soumoud.

Traduction SF pour l’Agence Média Palestine

Source : Mondoweiss

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