(Le 10 juin 2014, cela fait maintenant 48 jours de grève de la faim)
Vendredi 6 juin 2014
Détenus palestiniens dans la prison d’Ayalon, à Ramla, au sud-est de Tel-Aviv
Des détenus administratifs palestiniens entrent aujourd’hui dans le 43e jour de grève de la faim effective qu’ils ont lancée pour protester contre la politique des détentions administratives, alors que les corps et institutions internationaux, ainsi que l’Autorité palestinienne, n’exercent toujours pas de pression sur la puissance occupante en vue de protéger les grévistes.
Addameer estime que ce silence aide la puissance occupante dans son refus d’accéder aux revendications des grévistes de la faim. Ceci est visible à travers deux faits extrêmement dangereux : primo, dans le fait que le Service pénitentiaire israélien (IPS – Israeli Prison Service) a informé le comité des grévistes de la faim qu’il n’était pas dans son pouvoir de négocier avec les grévistes et, secundo, dans la tentative du pouvoir occupant de faire passer une loi qui permettra de nourrir de force les grévistes de la faim.
Bien que l’Association médicale israélienne s’oppose fermement à cette proposition de loi en vue de nourrir les grévistes de force, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré récemment que l’on trouvera bien des médecins israéliens qui se chargeront de cette alimentation forcée et il a également déclaré que le processus de promulgation de cette loi sur l’alimentation forcée sera accéléré, et ce, afin d’essayer de traiter du cas des actuels grévistes de la faim. Et, en effet, si cette loi devait passer, elle aurait de sérieuses implications car, comme le dit l’Association médicale mondiale dans sa Déclaration de Malte concernant les grévistes de la faim, « l’alimentation forcée n’est jamais acceptable sur le plan de l’éthique ».
L’IPS et ses unités spéciales continuent à prendre des mesures punitives extrêmes contre les grévistes de la faim dans une tentative de briser leur grève. Ces mesures comprennent l’interdiction de toute communication avec le monde extérieur ; la restriction de l’accès à leurs conseillers juridiques ; le transfert continuel des grévistes de la faim d’une prison à l’autre ; l’isolement ; l’enfermement solitaire de la direction des grévistes de la faim ; le refus des visites de la famille ; et des amendes (allant jusqu’à 100 euros).
Les grévistes de la faim sont gardés dans des sections et des cellules vides ; leurs vêtements et leurs objets personnels élémentaires ont été confisqués ; et on ne les autorise qu’à garder des tasses pour boire de l’eau. Dans certaines prisons, on les oblige à boire de l’eau sale des robinets ou de parcourir 40 mètres afin de pouvoir avoir de l’eau.
Les gardiens de la prison et les unités spéciales de l’IPS battent et insultent les grévistes de la faim quotidiennement, les forçant à se tenir debout pour le comptage, sans prendre du tout en considération leurs conditions de santé et leur incapacité à se tenir debout.
En outre, les médecins et infirmières de l’IPS continuent à traiter les grévistes de la faim de façon inhumaine, ce qui constitue une violation de la déontologie professionnelle, selon les déclarations de Tokyo et de Malte. Parmi ces violations, le fait de donner au gréviste de la faim de l’eau salée dans des éprouvettes de prélèvement d’échantillons d’urine ; ou le fait que les unités spéciales de l’IPS retardent le moment de transférer les grévistes vers les chambres où ils doivent se reposer. Bien des grévistes qui ont été transférés dans des hôpitaux civils et qui y ont été mis aux fers sur leur lit même 24 heures sur 24, ont demandé d’être ramenés à la prison, au lieu de rester dans ces hôpitaux. Actuellement, quelque 80 grévistes de la faim se trouvent dans des hôpitaux civils.
Selon des témoignages confiés aux avocats d’Addameer, les grévistes de la faim ont déjà perdu entre 13 et 20 kilogrammes et le nombre de ceux qui s’évanouissent s’accroît rapidement. Suite à la dégradation de leur santé, certains grévistes de la faim souffrent d’hémorragies intestinales et vomissent également du sang.
La majorité des grévistes de la faim ont boycotté la clinique de la prison et refusent de prendre des vitamines et des suppléments, ce qui a abouti au transfert de 80 grévistes dans des hôpitaux et centres médicaux : centre médical Meir, hôpital Ichilov, centre médical Kaplan, centre médical Barzilai, hôpital Tel HaShomer, hôpital Beilinson, hôpital Afouleh, centre médical Soroka, centre médical Wolfson.
En réponse aux grèves de la faim en cours, les Forces d’occupation israéliennes (IOF) continuent à commettre des crimes contre les prisonniers et détenus palestiniens, de même que contre leurs partisans et tous ceux qui sont solidaires avec leur cause. Par exemple, le 15 mai 2014, deux jeunes hommes palestiniens ont été abattus et tués par les IOF au cours d’une manifestation pacifique de soutien aux grévistes de la faim, à l’extérieur de la prison d’Ofer.
Addameer demande à l’Organisation de libération de la Palestine et au Gouvernement palestinien de :
Développer une stratégie juridique nationale s’appuyant sur les lois humanitaires internationales et sur les lois internationales en matière de droits de l’homme afin de protéger et de garantir les droits des prisonniers et de tenir la puissance occupante pour responsable des crimes actuels commis contre tous les prisonniers et détenus palestiniens.
Appeler les parties contractantes de la Quatrième Convention de Genève à organiser une rencontre urgente qui réfléchira sur les violations continuelles des droits des prisonniers et détenus palestiniens par la puissance occupante, en s’appuyant sur l’article 1 de la Quatrième Convention de Genève, qui oblige les parties contractantes à respecter et garantir l’application des Conventions de Genève en toutes circonstances.
Appeler le Conseil de sécurité à se réunir immédiatement pour discuter la question des détenus administratifs palestiniens en grève de la faim et pour intervenir afin de les protéger.
Requérir un avis consultatif auprès de la Cour internationale de Justice à propos de la légalité de l’occupation israélienne et son contrôle de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, sur base de plus de 1700 ordonnances militaires israéliennes.
Addameer demande au nouveau Gouvernement palestinien de respecter ses promesses de donner la priorité aux prisonniers et de mobiliser toutes ses ressources, tant au niveau local qu’au niveau international, dans des actions véritables et efficaces, en particulier de la part du ministère de la Justice et du ministère des Affaires étrangères, afin de dénoncer les violations et crimes commis par le puissance d’occupation.
En outre, Addameer demande aussi qu’il s’emploie à activer et soutenir le mouvement BDS en tant que moyen de tenir la puissance occupante pour responsable de ses propres violations en cours contre le peuple palestinien.
Addameer demande au Comité international de la Croix-Rouge de :
Constituer immédiatement une équipe médicale afin de contrôler les conditions de santé des grévistes de la faim.
Condamner publiquement le recours par Israël à la détention administrative contre les Palestiniens, alors que ce recours constitue une violation de la Quatrième Convention de Genève.
Exercer des pression sur l’ISP afin qu’il respecte les droits des grévistes de la faim, et ce, en vue d’assurer leur bien-être.
Addameer demande aux Nations unies de :
Condamner publiquement le recours par Israël à la détention administrative, recours qui enfreint la Quatrième Convention de Genève et les lois internationales qui garantissent des normes de procès équitables.
Addameer demande aux Nations unies d’instaurer immédiatement une commission permettant une enquête internationale et la visite des prisons afin d’observer les traitements et les conditions de vie des prisonniers et détenus palestiniens dans les prisons israéliennes.
Addameer demande à l’Organisation mondiale de la santé d’entamer immédiatement une enquête sur les pratiques et les violations commises par les médecins des prisons, en faisant référence ici aux Déclarations de Malte et Tokyo à propos des grévistes de la faim.
Addameer demande à l’Union européenne de :
Mettre un terme à sa politique des deux poids et deux mesures et de se décider à condamner les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par Israël contre des civils palestiniens. Addameer demande également que le haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, Catherine Ashton, d’exprimer publiquement son inquiétude à propos des vies des grévistes de la faim et du recours systématique et permanent par Israël à la détention administrative, et d’insister sur la nécessité de protéger les droits des grévistes de la faim conformément aux lois humanitaires internationales et aux lois internationales sur les droits de l’homme.
Condamner publiquement le recours par la puissance occupante à la détention administrative contre les civils palestiniens, alors que ce recours constitue une violation des Conventions de Genève et des autres lois et réglementations internationales, lesquelles ne permettent le recours à la détention administrative que sur base individuelle, au cas par cas, et dans des cas graves de menace pour la sécurité, et qui garantissent également des normes de procès équitables.
Source: Addameer
Traduction: JM Flémal – Plateforme-Palestine-Charleroi