Michael Schaeffer Omer-Man | 8 Mars 2015
Imaginez ce qui arriverait si des dizaines de milliers d’Israéliens manifestaient au Check Point de Qalandia en revendiquant la fin immédiate de l’occupation
Des dizaines de milliers de manifestants pour le départ de Netanyahou comme premier ministre, Place Rabin, Tel Aviv, 7 mars 2015 (Photo Oren Ziv/Activestills.org)
Quelque 50 000 personnes se sont rassemblées samedi en une manifestation pour le changement : changement de gouvernement, changement d’attitude sur la question palestinienne, changement dans le traitement gouvernemental des questions sociales.
Le thème principal de la plupart des discours dans la manifestation de samedi soir Place Rabin était le manque de vision stratégique du Premier Ministre Benjamin Netanyahou concernant la question palestinienne et le besoin d’arriver à un accord pour mettre fin à l’occupation et au conflit. Deux anciens responsables des services de sécurité, l’ex-chef du Mossad Meir Dagan et le Major Général à la retraite Amiram Levine, ont tous les deux averti qu’Israël va tout droit vers la réalité de l’apartheid s’il maintient le régime militaire qui dure depuis 47 ans sur 4 millions de Palestiniens.
Mais si ces 50 000 personnes voulaient vraiment le changement, si elles voulaient montrer sans équivoque que l’occupation doit cesser, alors elles se sont trompées de manifestation.
Plus tôt dans la journée, à Jérusalem, quelque 1 500 israéliennes et Palestiniennes ont manifesté des deux côtés du checkpoint de Qalandia – qui sépare Jérusalem de Ramallah – avec une revendication plus claire : la fin de l’occupation.
Des Palestiniennes vers le checkpoint de Qalandia qui sépare Ramallah de Jérusalem. Des soldats israéliens ont séparé la manifestation commune israélo-palestinienne contre l’occupation qui a eu lieu un jour avant la Journée Internationale des Femmes, le 7 mars 2015 (Anne Paq/Activestills.org)
Imaginez, si 50 000 Israéliens marchaient sur Qalandia en appelant à la fin du régime militaire non démocratique imposé aux Palestiniens, la fin des checkpoints qui restreignent la liberté de mouvement des Palestiniens tout en permettant aux Israéliens de les traverser sans obstacle, la fin des lois distinctes et du système des permis qui évoquent bien sûr les images de l’apartheid sud-africain.
Imaginez si tous ces gens qui sont assez remontés contre le manque de vision de Netanyahou sur la question palestinienne dirigeaient leur colère sur l’occupation elle-même et non sur le dirigeant qui l’administre, nonobstant l’absence de perspective de leur leader sur comment mettre fin à l’occupation.
Imaginez s’il devenait socialement acceptable dans l’état d’esprit dominant en Israël que des Israéliens marchent pacifiquement sur les checkpoints tenus par des soldats israéliens et exigent que les dits checkpoints soient démantelés et que l’égalité pleine et entière soit le but premier de la société israélienne. Imaginez si c’était une chose à laquelle la société dans son ensemble tenait assez pour la revendiquer.
C’est le génie et la tragédie de l’occupation. Tandis que la moitié des Israéliens expriment avec force qu’ils veulent la fin de l’occupation (dans le cadre d’une solution à deux États), seule une petite minorité, ceux qu’on appelle des militants radicaux, agit contre l’occupation elle-même. Au lieu de cela, la majorité blâme ses dirigeants – et blâmer Netanyahou pour ne pas mettre fin à l’occupation équivaut à critiquer Silvio Berlusconi pour ne pas mener à bien une réforme du financement des campagnes électorales.
Si 50 000 juifs israéliens marchaient sur le checkpoint de Qalandia en revendiquant la fin de l’occupation, même Netanyahou en prendrait bonne note, Herzog changerait son message du jour au lendemain et les graines du changement auraient juste une chance de germer.
Jusqu’à ce jour, le meilleur résultat à attendre d’une position consistant à dire « n’importe qui mais pas Netanyahou », c’est une occupation légèrement plus acceptable, légèrement plus supportable, mais pas un changement.
Traduction SF pour l’Agence Media Palestine
Source: +972