Par Brad Parker, mardi 13 octobre 2015
Netanyahou a promis une « rude offensive. » De nouvelles règles de « tir à balles réelles » ouvrent la saison de la chasse à l’enfant palestinien.
Lundi dernier, dans l’escalade de la tension dans toute la Cisjordanie occupée et à Jérusalem Est, un enfant de 13 ans du camp de réfugiés Aïda à Bethlehem, Abdel Rahman Shadi Obeidallah, est un des derniers enfants palestiniens à avoir été tué par les tirs de l’armée israélienne dans des circonstances qui suggèrent un meurtre délibéré et perpétré en toute illégalité. Tandis que les graves violations des droits des enfants palestiniens par les forces israéliennes sont la clé de voûte de ce qui semble être l’occupation militaire israélienne permanente de la Cisjordanie, de Jérusalem Est et de la bande de Gaza, des changements récents de la politique combinés à l’impunité systémique vont inévitablement aggraver la situation déjà terrible des enfants palestiniens.
Benjamin Netanyahou, le premier ministre israélien, a récemment promis une « rude offensive » en réponse aux dernières manifestations contre l’occupation et la violence d’Israël. Au cours des deux premières semaines d’octobre, des hommes armés palestiniens sont présumés avoir tué deux colons israéliens près du village de Beit Fourik en Cisjordanie. Le 3 octobre, la police israélienne a tué par balles Mouhannad Halabi, un étudiant en droit palestinien de 19 ans après qu’il ait poignardé à mort un soldat israélien qui n’était pas en service et un rabbin, dans la Vieille Ville de Jérusalem, selon la presse. Quelques heures plus tard, la police a commis un tir mortel sur Fadi Alloun, un jeune de 18 ans, près de la Porte de Damas de la Vieille Ville, à Jérusalem Est, pour un prétendu coup de couteau sur un jeune israélien de 15 ans. La vidéo qui montre le tir donne à voir des officiers de police israéliens ouvrant le feu sur Alloun, sous les encouragements d’une foule de badauds. Le 4 octobre au soir, les forces israéliennes ont tué Houthayfa Othman Souleiman, un jeune de 18 ans, au cours d’affrontements près de la ville cisjordanienne de Tulkarem.
La presse palestinienne a couvert ces événements et la liste continue.
L’annonce de Netanyahou intervient après que les autorités israéliennes aient assoupli les règles qui donnent le feu vert à la police pour utiliser des balles réelles contre des lanceurs de pierres palestiniens à Jérusalem chaque fois qu’ils décident qu’il y a « menace de mort ». Il y a là un changement significatif, car l’usage de balles réelles n’était auparavant justifié qu’en cas de menace de mort directe d’un individu sur un officier.
Tandis que le droit international recommande que les armes mortelles ne soient utilisées que lorsqu’elles sont absolument inévitables, les enquêtes conduites par DCIP (Défense des Enfants International Palestine) constatent régulièrement que des enfants n’étaient pas porteurs de menaces de mort directes sur quelque officier de police ou soldat que ce soit lorsqu’ils ont été abattus.
Par exemple, le 15 mai 2014, deux adolescents palestiniens, Nadim Siam Nawara de 17 ans et Mohammad Mahmoud Odeh Salameh Abou Daher de 16 ans, ont été tués par les forces israéliennes près de la prison militaire israélienne d’Ofer en Cisjordanie. Nadim a souffert d’une blessure fatale au menton due à un tir et Mohammad a essuyé un tir dans le dos environ une heure plus tard au même endroit. Les caméras de CCTV, fixées sur le bâtiment où ces garçons ont reçu les coups de feu, ont filmé les tirs mortels, ce qui a permis d’affirmer qu’aucun de deux garçons n’avait proféré de menace de mort ni de danger imminent envers les forces israéliennes lorsqu’ils ont été tués.
Les changements récents de la réglementation concernant les balles réelles sont à considérer dans le contexte plus large de l’occupation militaire israélienne qui se prolonge sur les Palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem, où les enfants palestiniens ont enduré des niveaux élevés de violence dans les dernières années parce que les soldats israéliens et la police ont de plus en plus recours à la force dans la répression des manifestations. Depuis 2014, 16 enfants palestiniens au moins sont morts des mains des forces israéliennes, tous sauf un de balles réelles, selon les preuves rassemblées par DCIP. Un seul incident a donné lieu à investigation et inculpation.
Dans un contexte où des crimes violents perpétrés par les forces israéliennes contre des Palestiniens restent impunis et sont souvent complètement ignorés des autorités israéliennes, l’assouplissement des règles d’utilisation de balles réelles offre à l’armée israélienne et à la police un accord tacite pour faire le plus de mal possible.
Au moins 48 enfants palestiniens ont été blessés pendant la première semaine d’octobre, d’après les données de DCIP. Les forces israéliennes ont tué Ahmad Sharaka, un jeune de 14 ans, à balles réelles au cours d’une manifestation près de la colonie juive de Beit El à côté de Ramallah en Cisjordanie occupée. Il était le vingt quatrième Palestinien à être tué en octobre.
Même avant que les normes d’utilisation de balles réelles aient été abaissées, le mésusage de balles de plastique enrobées de mousse par la police des frontières israélienne lors d’affrontements avec de jeunes Palestiniens à Jérusalem Est a gravement blessé trois enfants en septembre, selon la documentation réunie par DCIP. Aucun des enfants blessés ne participait aux affrontements. Ces blessures ont été consécutives à la mort de Mohammad Sunukrut âgé de 16 ans, en septembre 2014.
Le mois de septembre dernier a marqué le quinzième anniversaire de l’éclatement de la deuxième intifada. Les forces israéliennes et les colons avaient alors tué au moins 1 997 enfants palestiniens, tandis que les survivants ont vu leur avenir étouffé et nié par une discrimination systémique, par l’extension constante de la colonisation et par l’occupation militaire prolongée.
Les enfants représentent désormais 46,2% des 4 680 000 Palestiniens vivant dans le territoire palestinien occupé et la direction israélienne semble plus que jamais décidée à s’appuyer sur une force excessive pour gérer une occupation militaire injuste, oppressive et complètement insoutenable. Le besoin de justice et de prise de responsabilité est urgent, bien que son avènement soit peu plausible à court terme. Les autorités israéliennes doivent interdire l’usage excessif de la force contre des Palestiniens non armés et s’assurer que les forces israéliennes agissent à tout moment dans le respect du droit international.
Brad Parker est avocat, responsable du plaidoyer international pour Défense des Enfants International Palestine, une organisation locale indépendante pour la défense des droits de l’enfant palestinien, basée à Ramallah et dédiée à la défense et à la promotion des droits des enfants vivant en Cisjordanie, à Jérusalem Est et dans la bande de Gaza.
Traduction: SF pour l’Agence Media Palestine
Source: Salon.com