Dana Somberg – Maariv Hashavua – 2 février 2016
Des dizaines de câbles envoyés chaque mois au ministère des Affaires étrangères israélien par les ambassades d’Israël en Europe et aux États-Unis rendent compte d’une montée en flèche du mouvement international BDS.
Le ministère des Affaires étrangères reçoit des dizaines de rapports mensuels depuis ses ambassades à l’étranger qui semblent indiquer que le mouvement international de Boycott, Désinvestissement et Sanctions contre Israël intensifie sa campagne pour l’isolement du pays.
Le Ma’ariv Hashavua, l’hebdo en langue hébraïque du Jerusalem Post, a récupéré un certain nombre de ces câbles diplomatiques sur ce phénomène qui monte à travers l’Europe et les États-Unis, que le ministère a reçus ces derniers jours.
Un câble venant d’Espagne explique que les conseillers municipaux de Barcelone, où siège la CUP (Candidature d’unité populaire) un parti d’extrême gauche, qui appellent à la sécession de la Catalogne, appellent également à amender les accords avec Israël et envisagent d’annuler une désignation de municipalité de l’amitié (jumelage) avec Tel Aviv.
« La demande par les représentants de la CUP au conseil municipal pour modifier les accords existants avec Israël et pour envisager d’annuler les accords existants avec Tel Aviv est préoccupante. Plus préoccupante encore est la réponse du parti majoritaire selon laquelle ils auront à examiner la question, d’autres organisations s’étant également tournées vers eux » indique le câble.
« En réponse à leur argument que l’accord avec Tel Aviv renforçait l’occupation, le maire adjoint a répondu qu’il fallait examiner cela avec le plus grand soin, sans développer plus, » poursuit le câble. Câble selon lequel « le phénomène de l’activité anti-israélienne en Espagne est ennuyeux et préoccupant, mais dans le passé, elle se concentrait dans de petites villes. Mais quand cela se produit à Barcelone, et s’exprime parmi les élus, le sujet prend des proportions tout à fait différentes ».
Pablo Sanchez, conseiller d’Ada Colau, la maire de Barcelone, a proposé une réponse « encourageante », dit un autre câble. « Après un discours philosophique sur le sens d’un boycott, il a souligné que ce n’était pas là une mesure immédiate, mais il a admis que la question était en effet en cours d’examen ».
Dans la ville belge de Liège, les organisateurs d’un festival annuel de danse ont rejeté un parrainage israélien de l’évènement la semaine dernière, après des menaces de boycott.
Israël avait entrepris et proposé de sponsoriser le festival quand la troupe (israélienne) Batsheva Dance a été choisie en première partie.
Mais, « par la suite », un câble envoyé par l’ambassade en Belgique au ministère israélien a dit, « Ils nous informés qu’ils ne voulaient pas être liés à l’ambassade, qu’ils renonçaient à notre soutien et nous rendaient l’argent. Tout cela à cause de la menace d’un boycott.
« Les protestations auprès des organisateurs du festival n’ont donné aucun résultat ».
Depuis Chicago, États-Unis, la semaine dernière, le ministre a reçu un rapport selon lequel l’évènement de la Jerusalem Open House for Pride and Tolerance (Maison ouverte de Jérusalem pour la fierté et la tolérance), à une conférence locale de la LGBT, avait été annulé.
Les représentants de la Jerusalem Open House avaient été invités à organiser un service de prière le vendredi soir et à prendre la parole, mais ils ont été mis en garde contre un possible boycott.
Dans un câble de la délégation israélienne, les diplomates décrivent comment ils avaient aimé aider à la conférence « sans être au premier rang, et sans les drapeaux israéliens dans l’immeuble, tant que les représentants de la Jerusalem Open House ont eu une possibilité de s’adresser au public ».
Étonnamment, dans les jours qui ont précédé l’évènement, les organisateurs ont annoncé qu’ils annulaient la participation israélienne qui, disaient-ils, « divisait la communauté », et qu’ils ne pouvaient pas assurer la sécurité des participants. Peu après, ils ont modifié leur décision, et les représentants israéliens arrivaient à la conférence.
Un câble ultérieur de Chicago indique que, « après le service de la prière du Sabbat nous nous sommes dirigés vers le centre où se tenait la conférence. Devant la porte de l’immeuble, quelque 400 manifestants bruyants nous attendaient, nous barrant le chemin. Dix minutes avant le début de la conférence, plusieurs militants pro-palestiniens ont fait irruption dans l’immeuble, provoquant l’arrêt de l’évènement ».
Une autre déception attendait les diplomates israéliens quand les autorités ont échoué, le week-end dernier, à contrecarrer une conférence régionale organisée par le groupe Les Étudiants pour la justice en Palestine (SJP) à l’université Emory, État de Georgie, un campus qui possède la plus importante population étudiante juive dans le Sud.
La conférence, selon un câble diplomatique, avait pour but de faire campagne contre le soutien chrétien au sionisme et de renforcer les liens chrétiens-palestiniens.
« Nous n’avons pas été surpris, malheureusement, par le manque absolu de volonté d’agir de la part des étudiants juifs de l’université Emory », écrivent les employés du ministère israélien des Affaires étrangères à propos de l’incident.
Ce ministère et celui des Affaires stratégiques ont considéré la demande palestinienne de l’an dernier pour que la FIFA expulse Israël, comme un tournant, alors qu’ils comprenaient que les règles dans la lutte contre le BDS avaient changé.
Ces responsables, qui sont pour concentrer les efforts afin de combattre les boycotts contre Israël, ont déclaré cette semaine qu’ils ne savaient pas de quelle direction pourra venir la prochaine initiative.
« Dans le passé, le mouvement de boycott opérait uniquement dans l’arène politique – par des manifestations devant des ambassades et contre des membres de parlement soutenant Israël », indique une source de premier plan du ministère des Affaires étrangères.
« Depuis que Jibril Rajoub (un dirigeant du Fatah) est apparu à la conférence de la FIFA et qu’il a sorti un « carton rouge » symbolique pour Israël, nous voyons bien que le mouvement a évolué dans une direction plus populiste, probablement parce qu’il a remarqué qu’il y recueillait plus d’attention et qu’il y était plus efficace ».
Selon des sources du ministère, celui-ci se trouve désormais confronté à différentes variétés de boycotts, et contrer cette activité n’est pas aisé.
« Le mouvement de boycott contre Israël fait avancer son dossier dans tous les domaines, et il nous faut préparer des contre-arguments, des arguments juridiques et plus. Notre déploiement sur le terrain est crucial. Nous admettons que l’activité contre le boycott est un dossier où une version s’oppose à une autre version, des mots à d’autres mots, où il n’y a aucun substitut au travail diplomatique sur le terrain », affirme une source.
Selon de hauts responsables au ministère des Affaires stratégiques, qui ont été dotés d’un budget de quelque 100 millions de NIS (nouveau shekel israélien, soit environ 23 millions d’€) pour régler le problème, ils sont en train de mettre en place une équipe de personnels dont ils attendent qu’elle devienne « un facteur déterminant dans la lutte contre les boycotts et la délégitimation d’Israël ».
Yair Lapid, un dirigeant du Yesh Atid, a accusé le gouvernement de faire trop peu contre la montée du BDS.
« Ces câbles arrivent à une impasse » a déclaré Lapid lors d’une conférence mardi organisée par le journal financier Globes.
« Ils atterrissent au ministre des Affaires étrangères, lequel n’a aucun moyen de traiter ce matériel, car il n’y aucun ministère désigné pour le faire, et il n’existe aucune politique étrangère contre le BDS aujourd’hui » maintient Lapid.
Traduction : JPP pour l’Agence Média Palestine
Source: JPost