Charlotte Silver
Droits et Responsabilité
2 mars 2017
Fahya Shalash, femme de Muhammad al-Qiq, montre une affiche avec la photo de son mari lors d’une manifestation de soutien aux prisonniers palestiniens, le 20 février à Hébron en Cisjordanie.
(Wisam Hashlamoun/APA images)
Le gréviste de la faim palestinien Muhammad al-Qiq ne peut plus marcher après avoir refusé de manger pendant trois semaines pour protester contre sa détention par Israël sans charge ni procès.
La santé de ce journaliste de 35 ans s’est gravement détériorée la semaine dernière et il a été transféré le 22 février dans une clinique pénitentiaire. Selon son avocat, al-Qiq montre des signes de possible perte de la vue.
La direction de la prison israélienne a commencé à faire pression sur al-Qiq pour qu’il se soumette à des examens médicaux, ce qu’il a refusé dans le cadre de sa protestation, a dit son avocat aux médias.
Un juge du tribunal militaire israélien a maintenu l’ordre de détention administrative de trois mois contre al-Qiq, a dit mardi un reporter de l’agence de presse saoudienne al-Majd.
« La décision prise aujourd’hui d’approuver la détention administrative de Muhammad al-Qiq est un affront à la justice. La détention administrative pratiquée par Israël, principalement utilisée pour détenir les Palestiniens sans charge ni procès, est arbitraire et abusive », a déclaré Amnesty International ce même jour.
Al-Qiq a été récemment arrêté en janvier, moins d’un an après avoir gagné sa libération de prison à la suite d’une grève de la faim de 94 jours pour protester contre son emprisonnement sous détention administrative.
Un reporter libéré, davantage arrêtés
La détérioration de sa santé est survenue alors qu’un autre journaliste palestinien, Omar Nazzal, a été libéré après qu’Israël l’ait détenu pendant 10 mois sans charge ni procès.
Nazzal, libéré le 20 février, avait été condamné à la détention administrative par un tribunal militaire. Cette décision a été renouvelée trois fois depuis son arrestation en avril dernier alors qu’il essayait de sortir de Cisjordanie occupée pour assister à une convention de journalistes en Bosnie.
Plus d’une douzaine d’autres journalistes palestiniens et de travailleurs des médias sont encore derrière les barreaux israéliens. Certains sont détenus sans charges ni procès, comme al-Qiq, d’autres ont été accusés d’incitation en relation avec leur travail.
Quatre journalistes de la station de radio al-Sanabel à Dura, près d’Hébron en Cisjordanie, arrêtés en août dernier lors d’un raid de l’armée israélienne, font partie de ceux qui sont frappés de l’accusation d’incitation.
L’armée israélienne accuse cette station de radio de diffuser des chansons comme « Dura la Puissante » et d’appeler à « porter atteinte » aux soldats israéliens, à l’antenne et sur sa page Facebook.
Le mois qui a précédé le raid d’arrestation du mois d’août, alors qu’ils assiégeaient la zone environnante, des soldats avaient tiré et blessé deux jeunes de Dura.
L’accusation de l’armée décrète que Nidal Amro, l’un des journalistes accusés, indiquait l’endroit où se trouvaient les soldats israéliens dans une émission en direct pendant l’opération militaire qui se déroulait environ une semaine après le siège.
L’acte d’accusation cite Nassar qui aurait dit à l’antenne : « Dieu ait pitié de ton âme et Dieu t’aide à être accueilli dans les cieux éternels, oh héro. »
Journalistes détenus sans charges
Hassan Safadi, coordinateur des médias pour l’association de défense des droits des prisonniers Addameer et journaliste, est également retenu sous détention administrative.
Safadi a été arrêté en mai dernier alors qu’il revenait d’une conférence en Tunisie.
Résident de Jérusalem, Safadi a été conduit dans une centre de détention de la ville, où il a subi des interrogatoires pendant 40 jours et a été soumis à des privations de sommeil, des positions en tension douloureuse et une alimentation insuffisante.
Un tribunal de Jérusalem a ordonné sa libération en juin, mais le ministre de la Défense Avigdor Lieberman a signé un ordre de détention administrative contre Safadi le jour même où il devait être libéré.
En décembre, Safadi a été condamné à nouveau à six mois de détention.
Osama Shaheen, reporteur et chef du Centre d’Etudes des Prisonniers Palestiniens, est retenu sous détention administrative. Shaheen a été convoqué pour interrogatoire par les services de renseignement palestiniens avant d’être arrêté par Israël le 1er septembre.
Le mois dernier, le journaliste Hamam Hantash a lui aussi été condamné à de la détention administrative.
Plus tôt ce mois-ci, le Centre palestinien pour le Développement et les Libertés Médiatiques, association qui veille à la liberté de la presse en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza, a publié son rapport annuel sur les violations de la presse en 2016.
Israël a commis un peu moins de violations contre la presse l’année dernière qu’en 2015 qui avait vu une vague d’attaques à la suite de l’augmentation des confrontations entre les forces israéliennes et les Palestiniens de Cisjordanie.
En dépit de cette baisse, l’association de surveillance a établi qu’Israël continue à fermer des médias, à emprisonner des journalistes et à faire pression sur les sociétés de réseaux sociaux pour restreindre la parole politique.
Noam Rotem a contribué à la recherche.
Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine
Source : Electronic Intifada