Par James North, 31 décembre 2018
Razan al-Najjar, l’infirmière de Gaza âgée de 20 ans, tuée par un sniper israélien le 1er juin, interviewée quelques jours avant son assassinat. Photo extraite de : https://tinyurl.com/y7fsw456
Le New York Times nous a surpris hier en offrant une longue enquête en première page sur le meurtre, le 1er juin dernier, par l’armée israélienne d’une aide de santé de Gaza, Razan al-Najjar, âgée de 20 ans. Avant de critiquer, disons clairement que cet article était inconcevable dans le Times jusqu’il y a un an, voire six mois. En contraste, quand Israël a tué quatre petits garçons qui jouaient au foot sur la plage lors de son assaut contre Gaza en 2014, le journal a avalé l’explication malhonnête de l’armée, sans contestation, même si l’un de ses propres photographes avait été un témoin oculaire de la tuerie.
Cette fois-ci, le Times est sorti en déclarant que son enquête montrait que “le tir [sur Razan al-Najjar] semble avoir été au mieux imprudent et peut-être un crime de guerre, pour lequel personne n’a encore été puni. » Le journal a attendu jusqu’au 9ème paragraphe pour le dire, mais mieux vaut tard que jamais.
Cette couverture améliorée du Times n’est pas un hasard. Le journal comprend que ses lecteurs sont de plus en plus informés sur Israël/Palestine, en partie grâce à des sources d’informations alternatives comme ce site. Les commentaires publics qui suivent certains rapports du Times indiquent que les lecteurs n’acceptent plus une couverture unilatérale pro-israélienne.
Retour à Razan al-Najjar, l’aide infirmière assassinée de Gaza. Malgré cette amélioration considérable, l’enquête du Times a de gros défauts. Premièrement, pourquoi le journal n’a-t-il pas consulté des groupes israéliens de défense des droits de l’homme établis de longue date, tels que B’Tselem et Breaking the Silence? De retour le 17 juillet, B’Tselem a publié un article intitulé: «Des soldats israéliens ont tiré délibérément et mortellement sur une soignante palestinienne, Razan a-Najjar, dans la bande de Gaza.» [son nom a été orthographié de différentes manières.] Et sans doute une enquête autour des soldats israéliens courageux et francs qui participent à Breaking the Silence pourrait avoir trouvé de véritables témoins, que le journal aurait pu protéger en leur permettant de rester anonymes?
Ensuite, se concentrer sur une seule victime de l’armée israélienne fait sens. Mais le résultat, probablement pas intentionnel, est d’impliquer que la mort de Razan al-Najjar était un événement isolé ou rare. Le Times a souligné que le bilan des Palestiniens au cours de la Grande Marche du Retour a été de 185 morts, mais il aurait pu insister davantage sur cette vérité. Et une seule phrase indique que l’armée israélienne n’a perdu qu’un soldat.
Des critiques, tels qu’Adalah-NY, ont déclaré que le rapport du Times était « entaché d’une velléité de discréditer les manifestants palestiniens, en affirmant que les manifestations ne représentaient rien de plus qu’un coup de pub pour le Hamas». En vérité, l’avis du Times est odieux et au dessous de sa dignité. Aurait-il jamais publié quelque chose du genre: « Lorsque le jeune John Lewis, qui deviendra plus tard un membre éminent du Congrès, a été attaqué par la police blanche à Selma, en Alabama, en mars 1965 et qu’il a eu une fracture du crâne, participait-il à une manifestation représentant à peine plus qu’un coup de pub pour le mouvement des droits de vote? Jamais.
Il y a plus. Selon le Times, al-Najjar a «menti sur son manque d’éducation» et a «prétendu être une étudiante». Il s’est avéré qu’elle «ne pouvait pas se payer des études», mais qu’elle était décidée à en faire plus tard. Le journal note également que « ses publications sur Facebook pouvaient être colorées ». Aider à prendre soin de centaines de personnes non armées qui se font régulièrement tirer dessus aurait pu stimuler le journaliste américain le plus flegmatique.
Malgré tout, le rapport du Times a été un grand pas en avant. Terminons simplement en répétant la conclusion du document: «…la fusillade semble avoir été au mieux imprudente et peut-être un crime de guerre pour lequel personne n’a encore été puni. «
Ref. à Norman Finkelstein
Traduction: JPB pour l’Agence Média Palestine
Source: Mondoweiss