L’ONU traite l’armée israélienne en partenaire pour consolider la paix

Maureen Claire Murphy – 7 octobre 2019

Une vue du processus de paix en direction d’une solution à deux Etats sur le sol de Palestine : des bulldozers israéliens détruisent une maison palestinienne dans le camp de réfugiés de Shufat à Jérusalem Est, et une colonie israélienne construite en violation du droit international se profile au-dessus de la vallée. (Afif Amira / WAFA)

L’étroitesse de vue des responsables des Nations Unies engagés dans la solution à deux Etats aux dépens des principes des droits de l’Homme est tout à fait dangereuse.

Une responsable « constructrice de paix » de l’ONU a déclaré dimanche qu’elle avait eu « aujourd’hui de bonnes rencontres avec des interlocuteurs israéliens », dont l’armée et le ministère des Affaires étrangères.

La responsable de l’ONU, Rosemary DiCarlo, a dit que « des problèmes urgents sur la paix et la sécurité » ont été discutés dans ces rencontres. « Reprendre le processus de paix est essentiel pour résoudre le conflit israélo-palestinien », a-t-elle ajouté.

Il semblerait que, pour le Département des Affaires Politiques et de Consolidation de la Paix de DiCarlo, on devrait arriver à la paix au prix de la justice.

L’armée israélienne a tué plus de 200 manifestants qui réclamaient leurs droits à Gaza depuis début 2018. Traiter cet organe brutalement répressif en partenaire pour la paix sape l’urgent besoin de reconnaissance des crimes d’Israël à Gaza et au-delà.

Plus tôt cette année, une commission d’enquête indépendante de l’ONU a conclu que les forces israéliennes ont peut-être commis des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en utilisant une force militaire létale contre des manifestants non armés à Gaza.

Les enquêteurs des droits de l’Homme ont demandé aux Etats tiers de tenir les tireurs d’élite et les commandants israéliens, ainsi que ceux qui ont approuvé les règles d’engagement, pour responsables.

Dans ce but, la commission a transmis au Haut Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU un dossier identifiant les responsables des violations du droit international afin qu’il soit transféré à la Cour Pénale Internationale.

En se réunissant avec les responsables de l’armée et le ministère concerné par la protection d’Israël contre sa responsabilité, tout en les traitant de partenaires pour la paix, DiCarlo sape directement les découvertes et les recommandations de la commission d’enquête de l’ONU.

La solution à deux Etats éclipse les droits de l’Homme

Pour quelques responsables de haut rang de l’ONU, le « processus de paix » moribond en direction d’une solution à deux Etats est plus important que de progresser vers l’obtention et la protection des droits fondamentaux des Palestiniens.

Lundi, l’envoyé de l’ONU pour la paix au Moyen Orient a transmis par tweet une photo de lui et de DiCarlo avec un groupe d’élèves à Ramallah, siège de l’Autorité Palestinienne en Cisjordanie occupée :

Les élèves sont dans une école gérée par l’UNRWA, agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens.

« J’espère que ces petites jeunes filles grandiront pour participer à des #élections démocratiques où #la Palestine et #Israël vivront côte à côte dans #la paix et #la sécurité », a déclaré Nickolay Mladenov, l’envoyé de l’ONU.

Son tweet implique que les filles sur sa photo resteront des réfugiées en tant qu’adultes. Il ne leur souhaite pas de pouvoir exercer leur droit au retour, qui est leur droit selon le droit international, ni leur droit à l’autodétermination.

Au contraire, il souhaite un cadre politique qui soit susceptible de les empêcher d’exercer ces droits.

Tandis que DiCarlo, et vraisemblablement Mladenov, rencontraient dimanche l’armée israélienne et le ministère des Affaires étrangères, le ministre israélien de l’Intérieur a annoncé qu’il s’apprêtait à révoquer le statut de résident du militant palestinien Omar Barghouti et à l’expulser.

Depuis des années, Israël a cherché à criminaliser et à réduire au silence Barghouti, fondateur du mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS).

Copiée sur la campagne réussie pour mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud, le mouvement de boycott dirigé par les Palestiniens cherche à organiser une pression internationale sur Israël afin de mettre fin à ses violations des droits de l’Homme.

Le ministre israélien des Affaires étrangères Yisrael Katz a tout d’abord demandé des « éliminations ciblées de civils » des dirigeants de BDS avec l’aide des renseignements israéliens. Le mot hébreu utilisé par Katz est semblable au mot israélien pour « assassinats ciblés ».

Des responsables de l’ONU comme DiCarlo et Mladenov traitent les ministères mêmes qui persécutent les défenseurs des droits fondamentaux des Palestiniens en partenaires pour la paix.

Sauvegarder l’impunité d’Israël

Cependant, le Haut Commissaire aux Droits de l’Homme de l’ONU continue à retenir la publication d’une base de données des sociétés complices des colonies israéliennes illégales en Cisjordanie.

En 2016, le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU a adopté une résolution demandant que le haut commissaire « fournisse une base de données de toutes les entreprises engagées dans une activité certaine avec les colonies israéliennes ».

Le haut commissaire a failli à remplir ce mandat.

La semaine dernière, des organisations palestiniennes et internationales de défense des droits de l’Homme ont déclaré que « les retards répétés » du haut commissaire « pour livrer la base de données et transmettre ces données favorise l’impunité et permet la prolongation de l’installation et l’expansion des colonies illégales ».

Les responsables de l’ONU se comportent comme si leur rôle consistait à sauvegarder l’impunité d’Israël, plutôt que de soutenir les droits des Palestiniens, si longtemps niés.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine
Source : The Electronic Intifada

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