Par Al-Haq, 23 avril 2020
Al-Haq exprime son inquiétude qu’Israël, avec le soutien explicite des Etats-Unis (US), prenne de nouvelles mesures en vue de l’annexion illégale du Territoire palestinien occupé (TPO) et demande instamment à la communauté internationale d’intervenir immédiatement, prenant toutes les mesures nécessaires à sa disposition pour empêcher l’acquisition illégale et par la force du territoire palestinien par Israël. Depuis la publication en janvier 2020 du plan américain unilatéral prétendument « De la paix à la prospérité », la campagne d’Israël pour annexer illégalement le TPO a connu un élan croissant. Dans ces conditions, il est impératif que la communauté internationale aujourd’hui agisse rapidement pour condamner ces actions comme illégales et pour garantir les droits du peuple palestinien, y compris le droit à l’auto-détermination et à la souveraineté permanente sur ses ressources naturelles.
Le « plan de paix » des Etats-Unis représente l’ébauche d’une annexion illégale du TPO par Israël. Le Plan, en se référant au besoin exclusif d’Israël pour sa « sécurité », vise à approuver et à légitimer son régime institutionnalisé et systémique d’oppression raciale et de domination, interdit selon le droit international en tant que crime d’apartheid. A cet effet, le Plan prévoit l’escalade galopante des politiques annexionnistes israéliennes sur de larges morceaux du TPO et le maintien du reste du territoire sous occupation militaire.
Justifiant ces mesures, le Plan indique que « l’état d’Israël et les Etats Unis ne croient pas que l’état d’Israël soit légalement contraint de fournir aux Palestiniens 100 pour cent de leur territoire d’avant 1967 » et déclare qu’Israël annexera Jérusalem et l’intégralité des colonies israéliennes illégales, que « la vallée du Jourdain, qui est critique pour la sécurité nationale d’Israël, sera sous souveraineté israélienne », et que « l’état d’Israël retiendra la souveraineté sur les eaux territoriales qui sont vitales pour la sécurité d’Israël, ce qui offrira à la région sa stabilité ».
Contrairement à l’avis consultatif de la Cour internationale de justice en 2004, qui considère la construction par Israël du Mur d’annexion dans le TPO comme illégale et en rupture avec la norme de jus cogens de l’auto-détermination, le Plan affirme que : « Cette barrière physique devrait rester en place et servir de frontière entre les capitales des deux parties. Jérusalem restera la capitale souveraine de l’état d’Israël ». Ceci suit les mesures du gouvernement de Trump de 2018, l’arrêt de tous ses financements de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient, la fermeture de la mission diplomatique palestinienne à Washington DC, et le transfert de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem avec l’objectif de reconnaître la revendication de la prétendue souveraineté sur la ville par Israël. A la suite des élections israéliennes, il a été rapporté que l’accord atteint entre le Premier ministre Benjamin Netanyahu et Mr Benny Gantz pour la formation d’un gouvernement inclut des plans pour l’annexion du TPO.
L’article 47 de la Quatrième Convention de Genève protège rigoureusement les droits inviolables de la population palestinienne contre « toute annexion par la [puissance occupante] de tout ou partie du territoire occupé ». En conséquence, Al-Haq rappelle la position consistante et ininterrompue de la communauté internationale selon laquelle l’annexion d’un territoire occupé est illégale en toute circonstance. Significativement, la Résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité des Nations Unies exige le retrait d’Israël du TPO, et la Résolution 478 (1980) détermine que « toutes les mesures et actions législatives et administratives prises par Israël, la puissance occupante, qui ont altéré ou ont le but d’altérer le caractère et le statut de la Ville sainte de Jérusalem — sont nulles et non avenues et doivent être abrogées immédiatement ». La Résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité réaffirme une fois encore que l’entreprise de colonisation illégale d’Israël constitue une « violation flagrante » du droit international et n’a « aucune validité légale ». En accord avec leurs responsabilités selon le droit international, tous les états doivent s’abstenir d’actions qui violent le droit international ou qui prêtent aide et assistance au maintien de cette situation illégale, y compris l’annexion en cours de la Cisjordanie, de Jérusalem et du Golan syrien occupé.
L’échec persistant d’états tiers, y compris au Conseil de sécurité, à adopter et à appliquer l’action nécessaire pour mettre fin à l’occupation et pour assurer la réalisation de leurs obligations légales a un effet gravement préjudiciable et d’une grande portée sur l’efficacité du cadre juridique international. En décembre 2017, les Etats-Unis ont utilisé leur pouvoir de veto pour bloquer l’adoption par le Conseil de sécurité des Nations Unies d’une résolution qui aurait appelé tous les états à s’abstenir d’établir des missions diplomatiques à Jérusalem. En mars 2019, des membres individuels du Conseil de sécurité des Nations Unies « ont exprimé leur regret » devant la décision des Etats-Unis de reconnaître l’annexion par Israël du Golan syrien, mais encore une fois il n’y a eu aucune résolution à ce sujet. En juin 2019, Al-Haq a fermement condamné les déclarations de l’ambassadeur des EtatsUnis en Israël, David Friedman, dans un interview au New York Times, déclarations selon lesquelles « dans certaines circonstances — Israël a le droit de conserver une partie de la Cisjordanie, peu probablement la totalité ». Le 1er septembre 2019, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé qu’« Israël appliquera sa souveraineté dans toutes les colonies de Cisjordanie ». Tandis que le 22 avril 2020, le Secrétaire d’Etat américain Pompeo a affirmé que l’annexion de parties de la Cisjordanie est « finalement une décision qu’il revient à Israël de prendre ou non ».
Au lieu de reconnaître l’occupation prolongée comme illégale et de s’efforcer de mettre fin aux violations du droit international relativement aux droits humains, du droit humanitaire et du droit pénal international, des états tiers, tout particulièrement les Etats Unis, promeuvent une formalisation des violations d’Israël, récompensant une situation illégale existante en acceptant de valider des actes illégaux d’annexion.
Répondant à la marginalisation actuelle du devoir de garantir le respect en tant que composante essentielle de la responsabilité d’un état tiers selon le droit humanitaire international, Al-Haq a récemment remarqué que « l’exploitation par Israël du manque d’empressement des états tiers à le tenir pour responsable lui a non seulement permis d’agir impunément mais l’a enhardi à aller plus loin ». Comme Israël cherche à baser ses revendications annexionnistes sur son désir de perpétuer sa colonisation illégale, il revient maintenant à la communauté internationale de garantir le respect de deux des principes de base du droit international dont l’annexion est une violation claire, à savoir l’interdiction d’acquérir un territoire par l’usage de la force et le droit à l’auto-détermination. Manquer à cette obligation revient à légitimer le colonialisme, à consolider l’apartheid et à miner irrémédiablement les efforts pour assurer la jouissance des droits humains selon la règle du droit.
Al-Haq appelle la communauté internationale et les états individuellement et collectivement, à :
• continuer à ne pas reconnaître de souveraineté unilatérale d’Israël sur Jérusalem, en accord avec le droit international et les résolutions des Nations Unies ;
• continuer à dénoncer publiquement le transfert de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem, y compris en s’abstenant d’établir des ambassades dans la ville et de participer à des réunions ou à des événements à l’ambassade américaine à Jérusalem ;
• garantir la mise en oeuvre du droit international et la protection du peuple palestinien, y compris par la mise en oeuvre de sanctions économiques et d’autres mesures, jusqu’à ce qu’Israël respecte ses obligations en tant que membre des Nations Unies et puissance occupante ;
• coopérer pleinement avec la Cour pénale internationale et la soutenir publiquement ;
• prendre des mesures concrètes et immédiates pour mettre fin à l’occupation prolongée d’Israël sur le territoire palestinien occupé, et assurer des recours et des réparations effectifs pour tous les Palestiniens.
• reconnaître immédiatement, pour les états qui ne l’ont pas encore fait, l’état de Palestine, promouvoir son adhésion comme membre à part entière des Nations Unies, réaffirmer le droit palestinien à l’auto-détermination et affirmer l’unité nationale et l’intégrité territoriale de la Palestine ;
• rejeter clairement le « Plan de paix » des Etats-Unis et toute autre proposition de négociations qui cherche à nier les droits palestiniens ou qui conditionne l’exercice par les Palestiniens de leurs droits à la soumission à un « compromis politique » imposé de l’extérieur ;
• prendre des actions rapides et décisives, en accord avec la Charte des Nations Unies et en coopération avec les organisations locales pertinentes, en réponse à la violation permanente par Israël des droits humains palestiniens et au non-respect de ses obligations juridiques fondamentales.
• mettre en oeuvre unilatéralement ou collectivement des sanctions commerciales contre Israël, pour garantir qu’il respecte les règles du droit international et pour empêcher un nouvel effacement de la présence palestinienne dans le territoire occupé. Une attention particulière doit être donnée à la nécessité de mettre fin à la vente ou à la fourniture de produits militaires à Israël ;
• mettre en oeuvre des lois bannissant l’importation de biens produits dans les colonies illégales situées sur n’importe quel territoire occupé, en prêtant une attention particulière au rapport des Nations Unies de 2020 sur les entreprises commerciales impliquées dans certaines activités relatives aux colonies dans le Territoire palestinien occupé ;
• fournir un soutien urgent et nécessaire, tant financier que politique ou humanitaire, à l’UNRWA ; jusqu’à ce que les réfugiés palestiniens soient autorisés à exercer leur droit au retour.
• réunir une conférence comme Haute partie contractante de la Convention de Genève pour étudier des mesures afin d’appliquer la Convention dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem. Une telle conférence doit se concentrer sur la mise au point d’un plan pour le démantèlement de l’entreprise coloniale et affirmer la nature illégale de l’occupation prolongée.
• Al-Haq appelle de plus les états membres des Nations Unies à aborder la question de la situation dans le territoire palestinien occupé à l’Assemblée générale sous la procédure de la résolution 377 « S’unir pour la paix ». Si le Conseil de sécurité des Nations Unies renonce à exercer sa responsabilité primaire, à savoir agir selon ce qui est nécessaire pour maintenir la paix et la sécurité internationales, il revient à l’Assemblée générale d’agir face à une annexion en cours et de mettre en oeuvre des mesures pour mettre fin à l’occupation militaire d’Israël et permettre aux Palestiniens d’exercer leur droit à l’autodétermination.
La défaillance de la communauté internationale à intervenir par une réponse nécessaire et globale représente une défaillance par rapport à l’objet et à l’objectif de la Charte des Nations Unies et à son obligation de « prendre les mesures collectives effectives pour la prévention et l’élimination des menaces contre la paix, et pour la suppression des actes d’agression ou d’autres atteintes à la paix. »
Traduction : CG pour l’Agence Média Palestine
Source : Al-Haq