Par Al-Haq, le 27 mai 2020
Les organisations de la société civile palestinienne condamnent le choix d’Emi Palmor, ancienne directrice générale du ministère israélien de la Justice, pour le Conseil de Surveillance de Facebook et tirent le signal d’alarme sur l’impact qu’aura son rôle sur un rétrécissement supplémentaire de l’espace de liberté et d’expression en ligne et sur la protection des droits fondamentaux. Alors qu’il est important que les Membres du Conseil de Surveillance soient diversifiés, il est également essentiel qu’ils soient connus pour être en pointe dans le maintien de l’état de droit et de la protection des droits de l’être humain à travers le monde.
Sous la direction d’Emi Palmer, le ministère israélien de la Justice avait demandé à Facebook de censurer l’expression légitime de défenseurs des droits de l’être humain et de journalistes parce qu’il la jugeait politiquement indésirable. Ceci est contraire aux normes du droit international des droits de l’homme et aux recommandations émises par le Rapporteur Spécial des Nations Unies (ONU) sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, ainsi que par les experts et militants des droits du numérique qui avancent que la censure doit être rare et bien justifiée afin de protéger la liberté d’expression et pour que les sociétés développent des outils qui « préviennent ou atténuent les risques pour les droits de l’être humain causés par des lois nationales ou des exigences incompatibles avec les normes internationales. » Le choix d’Emi Palmor soulève la crainte que Facebook ait échoué à prendre convenablement en compte les recommandations des organisations de la société civile, des militants et des experts internationaux sur la liberté d’expression et que le Conseil de Surveillance de Facebook puisse, en particulier, provoquer des restrictions supplémentaires à la liberté d’expression en ligne et saper la voix des communautés palestiniennes, arabes et musulmanes et celle de leurs soutiens à travers le monde comme cela a été bien documenté par des universitaires et des organisations de la société civile.
A l’époque où Palmor était au ministère israélien de la Justice (2014 – 2019), le ministère a créé l’Unité Cyber Israélienne, ou ‘Unité d’Aiguillage Internet’, dont le travail a délibérément consisté à prendre pour cible les contenus des Palestiniens et à en détruire des dizaines de milliers, et a imposé de sévères limitations à la liberté d’expression et d’opinion, spécialement au sujet de la Palestine, et a aussi impacté de façon disproportionnée les communautés arabes et musulmanes à travers le monde. Adalah et d’autres organisations de la société civile ont mis en avant que l’Unité Cyber Israélienne elle même émet illégalement des demandes aux fournisseurs des médias sociaux pour qu’ils censurent le contenu de leurs sites internet. Même si les demandes de l’Unité Cyber Israélienne aux fournisseurs des médias sociaux ne sont pas publiques, depuis des années, les organisations de la société civile ont été en première ligne pour voir comment les demandes du gouvernement israélien et l’utilisation des algorithmes de l’apprentissage machine pour détecter les soi-disant ‘contenus extrémistes’ ont créé des centaines de milliers de faux positifs et fait du tort au contenu des droits de l’être humain.
En 2017, deux ans après la création de l’Unité Cyber Israélienne, il y a eu une augmentation de 500 pour cent de destruction de contenus. En 2018, année qui a précédé la dernière année d’Emi Palmor en tant que Directrice Générale, on a relevé 14.285 destructions. Parallèlement, des recherches pour incitation en ligne à la haine raciale contre les Palestiniens ont montré qu’il y avait en 2018 des posts d’incitation en hébreu à l’encontre des Palestiniens toutes les 66 secondes, alors qu’on ne voyait se manifester aucun intérêt pour combattre ces contenus racistes contre les Arabes palestiniens. En plus, comme on le voit dans le Rapport de Transparence de Facebook, depuis 2016, le nombre de demandes de données par le gouvernement israélien a augmenté, arrivant maintenant à un total de plus de 700, dont 50 % ont été présentées en tant que ‘demandes d’urgence’ et n’avaient aucun lien avec des procédures judiciaires. Il ne s’agit pas de tentatives isolées pour restreindre les droits numériques des Palestiniens et leur liberté d’expression en ligne. Au lieu de cela, celles-ci tombent dans le contexte d’une tentative largement étendue et systématique du gouvernement israélien, en particulier via l’Unité Cyber auparavant dirigée par Emi Palmor, pour réduire les Palestiniens au silence, retirer le contenu des médias sociaux critiques de la politique et des pratiques israéliennes, et pour salir et délégitimer des défenseurs des droits de l’être humain, les militants et les organisations qui cherchent à défier les atteintes aux droits portées par Israël contre le peuple palestinien.
La société civile palestinienne, dont les réseaux palestiniens soussignés, qui comportent des dizaines d’organisations membres, exhortent Facebook et son Conseil de Surveillance à réfléchir aux graves conséquences que le choix d’Emi Palmor peut entraîner, particulièrement sur les défenseurs des droits fondamentaux des Palestiniens et sur la liberté d’expression en ligne pour défendre les droits des Palestiniens. Nos organisations représentent diverses voix de la société civile palestinienne et des défenseurs des droits de l’être humain, dont beaucoup sont des organisations des droits de l’homme qui ont été primées. Plusieurs de nos organisations et leurs membres eux mêmes continuent de souffrir des campagnes israéliennes pour les salir et délégitimer leur travail de défense des droits de l’être humain, en ligne comme hors ligne, y compris en censurant leur travail légitime de défense des droits de l’être humain sur les applications de Facebook, et ont travaillé sans répit ces dernières années pour mettre la politique et les pratiques de Facebook en accord avec les standards et normes du droit international des droits de l’homme pour défendre les droits du numérique des Palestiniens.
Coalition Palestinienne des Droits du Numérique
Conseil des Organisations Palestiniennes des Droits de l’Homme
Réseau des Organisations Non Gouvernementales Palestiniennes
Traduction : J.Ch pour l’Agence Média Palestine
Source : Al-Haq