Une entreprise émiratie conclut un marché avec les géants israéliens de l’armement

Par Tamara Nassar, le 22 juillet 2020

Israël a utilisé des armes fabriquées par les Industries Aérospatiales Israéliennes dans ses attaques sur la Bande de Gaza. (Photoshot/Newscom)

Une société des Emirats Arabes Unis a conclu un accord avec deux des plus grandes usines israéliennes d’armement, soi-disant pour coopérer à la recherche destinée à parer à la pandémie du coronavirus.

La société d’intelligence artificielle Group 42 basée à Abu Dhabi a annoncé qu’elle a signé des accords avec les deux fabricants d’armes appartenant à l’État, Israel Aerospace Industries (IAI) et Rafael Advanced Defense Systems.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères d’Israël, Lio Haiat, a applaudi à cette démarche.

https://twitter.com/LiorHaiat/status/1278784062107377665?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1278784062107377665%7Ctwgr%5E&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fblogs%2Ftamara-nassar%2Femirates-firm-strikes-deal-israeli-arms-giants

L’accord entre Group 42 et les entreprises israéliennes a été annoncé en juin par le Premier ministre Benjamin Netanyahou et les responsables des Emirats, mais à ce moment là, on n’a pas donné le nom des sociétés.

Les détails de la collaboration restent vagues.

« Nous avons le privilège de suivre l’exemple et de partager nos ressources et notre expertise avec Rafael et IAI pour une cause aussi importante », a déclaré Peng Xiao, PDG de Group 42.

Les deux entreprises israéliennes sont les premiers fournisseurs des armes utilisées dans les attaques contre les Palestiniens.

Ce fut le cas pour la principale offensive israélienne contre Gaza à l’été 2014, objet de l’enquête imminente de la Cour Pénale Internationale pour crimes de guerre en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

Ce n’est pas évident de voir comment deux fabricants d’armes impliqués dans des crimes de guerre pourraient aider à combattre la pandémie.

Les liens entre l’entreprise émiratie et l’industrie de cybersécurité offrent un curieux tableau.

Liens avec une entreprise d’espionnage louche

D’après Bill Marczak, chercheur principal de l’organisation canadienne de cybersécurité Citizen Lab, Group 42 est lié à DarkMatter Group, société de cybersécurité qui a des liens étroits avec le gouvernement des Emirats.

DarkMatter recrute d’anciens membres de Unit 8200, la branche d’espionnage de haute technologie de l’armée israélienne, vue comme l’équivalent israélien de l’Agence de Sécurité Nationale des Etats Unis.

DarkMatter a également employé auparavant d’anciens membres du personnel du renseignement américain.

Xiao, l’actuel PDG de Group 42, était auparavant le PDG de Pegasus LLC, ancienne filiale de DarkMatter.

Pegasus LLC a été rebaptisée PAX AI et est maintenant une division de Group 42.

Les groupes sont en lien avec Tahnoun bin Mohammed Al Nahyan, actuel Conseiller à la Sécurité Nationale des EAU et fils du fondateur du pays, d’après les découvertes de Marczak.

Notamment, DarkMatter a recruté des concepteurs auprès de l’entreprise israélienne d’espionnage NSO Group, les attirant avec de gros chèques.

Les EAU ont utilisé dans le passé des programmes malveillants produits par NSO Group pour essayer d’espionner les dirigeants Qataris et Saoudiens.

Scandale de la surveillance

L’enquête de Marczak a découvert que Group 42 était impliqué dans la création de l’appli de messagerie ToTok.

Google et Apple ont retiré ToTok de leurs réserves en décembre dernier craignant entre autres que les utilisateurs de l’appli soient susceptibles de voir leurs messages et leurs conversations contrôlés par le gouvernement des EAU.

ToTok était très populaire dans les Emirats parce qu’il servait d’alternative gratuite aux applis de messagerie mondiales, FaceTime, WhatsApp et Skype, parce qu’elles sont restreintes par le gouvernement et ne permettent pas les appels.

Pas de répercussions pour l’annexion

L’annonce initiale de l’accord de Group 42 avec les entreprises israéliennes d’armement a été faite juste deux semaines après que l’ambassadeur des Emirats à Washington Yousef Al Otaiba ait averti que l’annexion par Israël de terres de Cisjordanie remettrait en cause la normalisation des liens.

Mais cet « avertissement » est arrivé accompagné d’appâts et d’offres à Israël d’une future normalisation.

Les relations informelles entre Israël et les EAU remontent aux années 1990 et comportent une coopération militaire et de renseignement.

Des liens secrets sont apparus sous les feux de la rampe ces dernières années.

Les EAU devaient accueillir une délégation israélienne cette année dans leur Expo 2020, mais l’événement a été remis à cause de la pandémie. DarkMatter est supposé surveiller la cybersécurité pour l’événement.

Malgré des réactions apparemment critiques de la part de gouvernements amis de la région contre les projets israéliens d’annexion, Israël n’a vu jusqu’ici aucune répercussion.

Un universitaire saoudien fait une publication dans un journal israélien

Cependant, un universitaire saoudien a publié un article dans Kesher, journal de l’Institut Shalom Rosenfeld des Médias et de la Communication Juifs, à l’université de Tel Aviv.

Mohammed Ibrahim Alghbban, directeur des Etudes de Langues et Civilisations Orientales et de l’Hébreu à l’université King Saoud de Riyad, a publié l’article en hébreu.

L’université de Tel Aviv s’est félicitée de ce nouveau signe de normalisation entre les deux pays comme d’un « moment historique dans les relations israélo-saoudiennes ».

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Source : The Electronic Intifada

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