Par Tamara Nassar, le 6 Novembre 2020
Maher al-Akhras a suspendu vendredi sa grève de la faim après avoir refusé de se nourrir pendant 103 jours pour protester contre sa détention sans charge ni procès par Israël.
Al-Akhras a pris cette décision après qu’Israël ait accepté de le libérer le 26 novembre, jour où son ordre de détention administrative prend fin. Ces ordres peuvent être renouvelés indéfiniment, mais Israël a accepté de ne pas renouveler le sien.
Il passera le reste de sa détention à l’hôpital, où il se remet d’un jeûne qui l’a conduit aux portes de la mort.
(messages)
« La volonté du prisonnier l’a emporté sur l’oppression du geôlier », a déclaré le Club des Prisonniers Palestiniens en annonçant la décision de Maher.
Cet homme de 49 ans, père de six enfants, est originaire de la ville de Silat al-Dahr, près de Jénine en Cisjordanie occupée, où il possède une ferme laitière.
« Je ne veux pas mourir. J’aime la vie. Je ne choisis pas la mort », a-t-il dit cette semaine au quotidien de Tel Aviv Haaretz.
« Mais je tiens inébranlablement jusqu’à ce que nous tous, en tant qu’êtres humains, soyons libres. »
Al-Akhras a rejeté les déclarations d’Israël comme quoi il représente un danger.
« Je ne suis un danger pour personne. Ni pour les citoyens israéliens, ni pour aucun citoyen dans le monde. Je veux que nous vivions en paix, Juifs et Arabes », a-t-il dit. « J’en rêve impatiemment. Je ne veux pas que nous prenions les armes et que nous nous battions entre nous. »
Menacé
Al-Akhras a déjà passé en tout cinq ans dans les prisons israéliennes.
L’armée israélienne l’a à nouveau arrêté le 27 juillet.
Il a dit à Haaretz que, peu après son arrestation, on lui a passé un appel téléphonique et il a parlé avec un commandant de l’agence nationale de renseignement d’Israël, le Shin Bet.
L’officier m’a menacé de « ruiner ma vie », me disant que « même si j’étais libéré, je le regretterais », a rappelé al-Akhras.
Al-Akhras a commencé à refuser la nourriture immédiatement après cet appel téléphonique.
Le Shin Bet ne l’a pas interrogé, a dit al-Akhras.
Un juge militaire israélien a alors déclaré qu’un dossier secret contre al-Akhras ne justifiait pas une extension de sa détention et a essayé de le faire libérer, a-t-il dit.
Mais le Shin Bet a demandé plus de temps pour pouvoir l’interroger.
Al-Akhras a dit qu’il n’avait pas subi d’interrogatoire alors non plus, mais qu’un policier l’avait brièvement questionné.
« Il a dit que j’étais soupçonné d’être lié à une quelconque organisation avec d’autres personnes », a rappelé al-Akhras.
Le juge avait à nouveau l’intention d’ordonner sa libération, mais l’a retardée parce que le Shin Bet a dit qu’il envisageait de placer al-Akhras en détention administrative – emprisonnement sans charge ni procès.
Il a alors reçu un ordre de quatre mois de détention administrative.
« La liberté ou la mort »
Tout au long de sa grève de la faim, al-Akhras a soutenu que ses seules conditions étaient « la liberté ou la mort ».
En affirmant cela, il maintenait que la décision de le libérer était entièrement dans les mains d’Israël, qui a choisi de poursuivre sa détention sans l’accuser.
« L’intention de l’État est de m’exécuter et de me liquider », a-t-il dit à Haaretz. « La décision n’est pas entre mes mains, elle est celle du système juridique israélien. »
Al-Akhras, qui est actuellement hospitalisé au Centre Médical Kaplan dans la ville israélienne de Rehovot, a dit à Haaretz que le directeur de l’une des salles de l’hôpital avait essayé de le nourrir de force au 42ème jour de sa grève par injection intraveineuse d’alimentation.
« Ils ont essayé de m’attacher au lit. Mais j’étais fort et ne les ai pas laissé faire », a-t-il dit, ajoutant qu’il n’avait pas pu sortir à nouveau du lit après cet incident.
Un porte-parole de l’hôpital a dit que les médecins n’avaient pas fourni de traitement contre la volonté d’al-Akhras, ni tenté de le contenir physiquement.
Même si Israël présentait des charges contre al-Akhras, ses tribunaux militaires bidons ont un taux de condamnation proche des 100 % quand il s’agit des Palestiniens.
La haute cour d’Israël a rejeté de multiples pétitions de l’avocat d’al-Akhras, Ahlam Haddad, demandant sa libération, bien qu’elle ait reconnu qu’il ne pouvait représenter aucun danger étant donné son état médical.
A la place, le tribunal a dit qu’il avait « suspendu » son ordre de détention administrative.
Ce gel supposé ne permet pas la libération du prisonnier, mais simplement met des obstacles devant la possibilité de faire appel de sa détention.
Les Palestiniens saluent la constance et le courage d’al-Akhras et lui attribuent le mérite de rallier le soutien national et mondial aux prisonniers politiques palestiniens.
Israël détient actuellement 4.400 Palestiniens dans ses prisons, dont 350 en détention administrative.
Source : The Electronic Intifada
Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine