Les victoires en faveur de la Palestine se sont poursuivies sur les campus des Etats-Unis en 2020

Par Nada Elia, le 28 décembre 2020

Malgré les problèmes de l’enseignement à distance, le militantisme en faveur de la Palestine a progressé sur les campus pendant l’année passée.

Photo: Page Facebook de l’association Students for Justice in Palestine

Malgré les problèmes de l’enseignement à distance, le militantisme sur les campus ne s’est pas arrêté l’an passé. National Students for Justice in Palestine (Association nationale des groupes « Etudiants pour la justice en Palestine », NSJP) est en train d’organiser sa conférence pour 2021, célébrant les 10 ans de cette réunion annuelle des branches de SJP (Students for Justice in Palestine, Etudiants pour la justice en Palestine) d’Amérique du Nord. Plusieurs associations étudiantes ont en outre pris d’importantes résolutions sur plusieurs questions majeures, de la censure à la définition de l’antisémitisime proposée par l’Association internationale pour la mémoire de l’Holocauste (International Holocaust Remembrance Association, IHRA) au désinvestissement et plus récemment à l’entraînement de la police des campus par l’armée israélienne. Alors que 2020 se conclut, voici un échantillon représentatif du militantisme sur les campus américains depuis le début de l’année universitaire 2020-2021, montrant ce qu’on peut attendre en 2021. 

En septembre 2020, NSJP, avec Palestine Legal, a organisé un webinar en deux parties sur l’auto-défense juridique pour les militants de la solidarité avec la Palestine (16 et 23 septembre), et les deux groupes continuent à proposer des ressources, des consultations et des soutiens pour les organisateurs étudiants ou universitaires, ainsi que d’autres alliés. 

La plus grande partie de l’enseignement étant diffusée par des plateformes en ligne à cause de la pandémie du COVID-19, la censure du discours pro-palestinien est devenu plus évidente quand trois géants de la haute technologie, Zoom, Facebook et YouTube, ont censuré une classe ouverte organisée par des professeurs de l’université d’état de San Francisco (SFSU), Rabab Abdulhadi et Tomomi Kinokowa, classe où figurait la militante palestinienne Leila Khaled. Si le musellement en ligne du récit palestinien n’est pas en lui-même une nouveauté, Facebook étant connu pour éliminer systématiquement les posts qui sont, ne serait-ce que légèrement, critiques d’Israël, la complicité coordonnée de trois plateformes soulève des questions préoccupantes sur la dépendance de l’enseignement public vis-à-vis des entreprises privées, du point de vue de la diffusion de contenus. Comme le professeur Saree Sakdisi de UCLA (Université de Californie à Los Angelès) l’a tweeté : «  C’est ce qui arrive quand nous sous-traitons nos universités à Zoom : ils décident quels événéments sont acceptables ou non. C’est scandaleux. »

Pour protester contre cette censure, le 23 octobre, un mois exactement après la censure de l’événément organisé par Abdulhadi, des universitaires de nombreuses universités, aux Etats-Unis et au Canada, ont participé à une journée d’action sponsorisée par USACBI et intitulée «  Nous ne nous laisserons pas réduire au silence  », qui incluait un message de Leila Khaled. Et une douce victoire a été célébrée sur le campus d’Abdulhadi quand SFSU a voté une motion de désinvestissement le 18 novembre. Des 20 votes, 17 étaient pour, deux se sont abstenus et un seul s’est opposé à la résolution. Ceux qui étaient favorables à la motion représentaient d’importants groupes alliés, comme Black Student Union (syndicat des étudiants noirs), la League of Filipino Students (Ligue des étudiants philippins), et International Business Society (Association d’étudiants intéressés par le commerce international).

Avant cela, l’année universitaire avait commencé sous des auspices heureuses, des étudiants de deux universités votant une motion en faveur du désinvestissement en moins d’une semaine, d’abord à l’université Illinois Champaign à Urbana et, six jours plus tard, à l’université Columbia.  Plus tard dans le mois, l’association des étudiants de l’université Butler a annulé deux résolutions qui aurait empêché le militantisme étudiant pour la défense des droits palestiniens, l’une condamnant BDS, l’autre adoptant la définition controversée de l’antisémitisme de l’IHRA, qui criminaliserait toute critique d’Israël. 

La tentative de suppression et de l’expression et l’organisation en faveur de la justice en Palestine sous couvert de combattre l’antisémitisme a été encore une fois dénoncée publiquement en décembre par les professeurs et les autres membres du personnel de l’université d’Illinois qui ont expliqué dans une lettre ouverte que l’identification entre anti-sionisme et antisémitisme était erronnée, censurait le discours palestinien et ne faisait rien pour combattre effectivement l’antisémitisme. 

En décembre également, les étudiants de l’université Tufts ont voté – par referendum – de manière massive en faveur de la fin de l’entrainement de la police de l’université par Israël. Il est important, encore une fois, de noter que SJP Tufts, qui a lancé cette action, avait avec succès rassemblé une coalition de plus de quarante groupes étudiants qui ont voté en faveur de la résolution, preuve que le militantisme en faveur des droits palestiniens et la critique des abus d’Israël augmentent sur beaucoup de campus des Etats-Unis. 

Finalement, National Students for Justice in Palestine, a récemment annoncé qu’elle tiendrait la réunion pour son dixième anniversaire, la conférence 2021, de manière virtuelle entre le 19 et le 28 février. Comme le leadership de NSJP l’a expliqué dans son annonce : « Pendant la décennie passée, des étudiants d’Amérique du Nord ont défié les administrations et mobilisé le pouvoir de la base en faveur de la justice pour la Palestine. Nous avons passé plus de 70 résolutions de désinvestissement, coordonné des campagnes locales et régionales, et nous avons changé, et fixé, le récit sur la libération de la Palestinine sur le campus. Avec plus de 220 branches dans toute l’Amérique du Nord, notre mouvement est plus puissant maintenant qu’il ne l’a jamais été. » 

Alors que nous refermons cette année civile, et nous lançons dans une nouvelle, il est utile de retracer la croissance de NSJP, reflétée par ses différents thèmes au cours de la décennie, le groupe étudiant s’étant avéré un leader influent dans l’élargissement du combat pour la justice. (Ces dix conférences se sont toutes tenues en octobre et en novembre, alors que celle de 2021 aura lieu en février, comme mentionné plus haut). Donc, pour information :

  • En 2011, National SJP a tenu sa première conférence annuelle, rassemblant des représentants des branches locales de tout le pays. Le premier rassemblement national a eu lieu à l’université Columbia sur le thème : « Les étudiants affrontent l’apartheid ». 
  • En 2012, NSJP s’est réuni pour la deuxième fois, à l’université du Michigan, pour se concentrer sur « Des racines locales aux branches nationales : rapprocher les mouvements étudiants ». 
  • En 2013, les étudiants se sont réunis à l’université Stanford, le thème étant « Des marges au centre : connecter les luttes, forger un mouvement national ». 
  • Témoignant clairement de l’intersectionnalité grandissante dans la vision globale de NSJP, la réunion de 2014, à l’université Tufts, était intitulée « Au-delà de la solidarité : résister au racisme et au colonialisme des Etats-Unis à la Palestine ».
  • A l’université d’état de San Diego, en 2015, le thème était « Des campus à la communauté : construire une vision pour l’avenir ». 
  • En 2016, le focus s’était déplacé sur l’avenir imaginé, avec « Masse critique : avec nos racines dans la résistance, forger un avenir juste », qui s’est tenu à l’université George Mason.
  • Un avenir juste et libre à la fois pour la Palestine et l’Amérique du Nord a été encore le thème du rassemblement de 2017, à l’université de Houston, avec « Un monde réimaginé : démanteler les murs de la Palestine au Rio Grande ». 
  • On se souviendra longtemps du rassemblement de 2018 comme de celui qui « a failli ne pas avoir lieu », car des groupes sionistes ont fait pression sur le campus hôte, UCLA, pour le faire annuler, allant jusqu’à affirmer que le cerf-volant du logo de NSJP était un symbole de violence. Témoignage de la résistance des militants, ce congrès a finalement été le plus grand rassemblement de NSJP jusqu’alors, sous le titre : « Espoir radical : la résistance face à l’adversité ». 
  • Finalement, en 2019, la NSJP a tenu sa réunion annuelle à l’université du Minnesota, avec le thème « Au-delà de la lutte : des racines aux branches, vers la libération ». 

Le thème du congrès de 2021 n’a pas encore été rendu public, mais on peut deviner facilement qu’il portera sur la résilience, la croissance constante, la lutte intersectionnelle et bien sûr l’espoir. Parce que nous sommes en train de gagner. 

Nada Elia

Nada Elia est une militante-universitaire palestinienne, écrivaine et organisatrice de la base, qui termine actuellement un livre sur le militantisme de la diaspora palestinienne. 

Source : Mondoweiss

Traduction CG pour l’Agence média Palestine

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