Israël met en prison des politiciens palestiniens avant les élections de l’AP

Par Tamara Nassar, le 2 mars 2021 

La députée palestinienne Khalida Jarrar lors de sa libération d’une prison israélienne le 28 février 2019 dans la ville de Naplouse en Cisjordanie occupée. Shadi Jarar’ah APA images.

Avec les élections législatives et présidentielles qui doivent avoir lieu dans les prochains mois, Israël intensifie sa répression envers les personnalités palestiniennes du milieu politique et de la société civile en Cisjordanie occupée. 

Lundi, Israël a condamné la députée palestinienne Khalida Jarrar à deux ans de prison, une amende de 1200 dollars et une peine d’un an avec sursis.

Son crime ? Être membre du parti politique de gauche, le Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP).

Israël considère tous les partis palestiniens et toutes les organisations palestiniennes de résistance comme des groupes « terroristes », ce qui signifie que toute personne active politiquement peut être visée par une arrestation. 

« Le timing n’est pas une coïncidence », a déclaré l’avocate palestinienne Yafa Jarrar à propos de la sentence de sa mère, faisant allusion aux élections palestiniennes.

Today, Israel’s military court arbitrarily sentenced Palestinian lawmaker, #Khalida_Jarrar to two years in detention and 4000 Shekel fine. The timing is not coincidental #PalestinianElections #FreeKhalidaJarrar#FreeThemAll

— Yafa Jarrar (@YafaJarrar) 1er mars 2021

[Aujourd’hui, le tribunal militaire d’Israël a condamné arbitrairement la députée palestinienne Khalida Jarrar à deux ans de détention et 4000 shekels d’amende. Le timing n’est pas une coïncidence.]

Khalida Jarrar a été arrêtée au cours d’un vaste raid militaire de nuit sur sa maison en octobre 2019 et est depuis détenue sans inculpation ni procès. 

Son arrestation s’est produite seulement huit mois après une précédente libération, suivant une période de 20 mois en détention administrative – sans charge ni procès. 

My mom, Khalida Jarrar, was arrested from our house in Ramallah moments ago. Isreali occupation forces raided our home with over 70 soldiers and around 12 military vehicles. Mom and sister were asleep when they approached. #freekhalidajarrar #IsraeliCrimes #Israel #BDS pic.twitter.com/njPyi6ze3a

— Yafa Jarrar (@YafaJarrar) 31 octobre 2019

[Ma maman, Khalida Jarrar, a été arrêtée dans notre maison de Ramallah il y a quelques instants. Les forces d’occupation israéliennes ont fait un raid sur notre maison avec plus de 70 soldats et environ 12 véhicules militaires. Maman et ma soeur étaient endormies quand ils sont arrivés.] 

Elle a été arrêtée dans le cadre de ce que le groupe de défense des droits des prisonniers palestiniens Addameer a décrit comme une campagne israélienne ciblant les militants politiques et les étudiants dans le deuxième semestre de 2019.

Addameer a ajouté qu’Israël accusait faussement Jarrar d’implication dans l’assassinat de la jeune israélienne Rina Shnerb.

Shnerb a été tuée par ce que l’armée israélienne a décrit comme un engin explosif improvisé près de la colonie de Dolev en Cisjordanie en août 2019. 

Mais, lundi, le procureur militaire israélien a modifié l’acte d’inculpation contre Jarrar pour n’inclure que ses activités politiques ; elle n’a pas été inculpée au motif d’une quelconque implication dans le meurtre de Shnerb. 

Jarrar a déjà passé des années dans des prisons israéliennes et a été interdite de voyage à cause de son appartenance au FPLP.

Premier vote en 15 ans

Les élections législatives et présidentielles palestiniennes prévues pour mai et juillet seraient les premières depuis les élections législatives de 2006, où le Hamas a remporté une victoire écrasante. 

Il a battu le Fatah, la faction dirigeante de l’Autorité palestinienne conduite par Mahmoud Abbas.

Cependant, le parti d’Abbas, soutenu par Israël, les Etats-Unis, l’Union européenne et quelques Etats arabes, n’a pas permis au Hamas de gouverner l’Autorité palestinienne.

Au contraire, des milices alignées avec le Fatah à Gaza, travaillant avec les Etats-Unis, ont essayé d’arracher par la force le pouvoir au Hamas. 

Mais, en juin 2007, le Hamas a pris des mesures à titre préventif contre ces milices, expulsant de Gaza les forces du Fatah soutenues par les Etats-Unis.

La tentative de putsch contre le Hamas après sa victoire électorale a provoqué la division actuelle, dans laquelle l’AP d’Abbas soutenue par l’Occident a gardé le contrôle de la Cisjordanie, alors que le Hamas, isolé sur la scène internationale, gouverne à l’intérieur de la Bande de Gaza assiégée. 

Il n’y a aucune garantie que les élections auront lieu, car de nombreux scrutins ont été programmés au cours des dernières années et ont ensuite été indéfiniment repoussés.

Les élections sont largement perçues comme un moyen de renforcer la légitimité des principaux partis politiques palestiniens, 15 ans après le dernier vote et à la lumière du nouveau gouvernement des Etats-Unis. 

Comme l’a récemment écrit Ali Abunimah de The Electronic Intifada, la raison pour laquelle le Hamas aurait confiance en ces mêmes Abbas et Fatah qui ont mené un coup d’Etat contre lui en 2007 pour respecter les résultats maintenant n’est pas claire. 

« Toute réconciliation ou « unité nationale » ne peut être basée que sur l’abandon par le Fatah d’Abbas de la collaboration avec Israël, ou sur l’abandon de la résistance par le Hamas », a écrit Abunimah.

Arrestation de membres du Hamas

Israël a régulièrement emprisonné des responsables palestiniens élus uniquement parce qu’il n’aime pas leurs opinions. Il accélère maintenant de telles arrestations en amont des élections prévues. 

Cela a lieu « dans le cadre d’un effort israélien permanent pour supprimer l’exercice par les Palestiniens de leur souveraineté politique et de leur auto-déterminantion », a affirmé Addameer.

Israël a mené de vastes arrestations de personnalités du Hamas en Cisjordanie occupée au cours des dernières semaines.

En février, les forces israéliennes ont arrêté des personnalités du Hamas comme Adnan Asfour et Yasser Mansour, et ordonné qu’Asfour soit retenu pendant six mois en détention administrative. 

 مراسلتنا: قوات الاحتلال تعتقل القياديين في حركة حماس من نابلس النائب ياسر منصور والشيخ عدنان عصفور بعد مداهمة منزلهما فجر اليوم 

pic.twitter.com/PClpbFBvvy

— صوت الأقصى (@Alaqsavoice) 16 février 2021

[Notre correspondant : Les forces d’occupation ont arrêté deux dirigeants du mouvement Hamas de Naplouse, le député Yasser Mansour et le cheikh Adnan Asfour, après avoir attaqué leur domicile à l’aube d’aujourd’hui.]

Mansour est également un membre du conseil législatif palestinien.

Le Hamas a déclaré que l’arrestation de ses politiciens en Cisjordanie « confirme que l’occupation s’en prend au déroulement des élections ». 

Naif al-Rajoub, un membre du Conseil législatif palestinien, a affirmé que les forces d’occupation israéliennes avaient fait un raid sur son domicile en février et l’avaient averti de ne pas participer aux élections. 

Al-Rajoub a déclaré à Shehab News Agency que les forces israéliennes l’ont averti de ne pas se porter candidat pour les élections ni de participer aux campagnes électorales, et lui ont seulement permis de se rendre aux urnes.

Parmi les personnalités du Hamas arrêtées par Israël au cours des dernières semaines, on trouve Khalid al-Haj, Abd al-Baset al-Haj, Omar al-Hanbali et Fazee al-Sawafta.

La semaine dernière, un tribunal militaire israélien a prolongé la détention administrative de Khitam Saafin, la dirigeante de l’Union des comités de femmes palestiniennes.

Saafin a été arrêtée avec d’autres militants politiques palestiniens en novembre et est retenue depuis sans inculpation ni procès.

Tamara Nassar est rédactrice assistante à The Electronic Intifada

Source : The Electronic Intifada

Traduction CG pour l’Agence média Palestine.

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