Les États-Unis rétablissent moins de la moitié des fonds alloués à l’UNRWA avant l’ère Trump

Par Maureen Clare Murphy, le 10 avril 2021 

Un employé de l’UNRWA distribue de l’aide alimentaire à Khan Younis, sud de la Bande de Gaza, en septembre 2020 (Ashraf Amra/ APA images)

Les États-Unis reprendront l’assistance économique et humanitaire aux Palestiniens, fournissant un total de 235 millions de dollars US, a annoncé mercredi [7 avril] le Département d’État.

Le Département a annoncé que 75 millions de dollars seraient affectés à “l’assistance économique et au développement en Cisjordanie et à Gaza”. Dix millions de dollars contribueront à des “programmes de consolidation de la paix”.

Washington versera de nouveau 150 millions de dollars à l’UNRWA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens. Ce chiffre représente moins de la moitié du financement annuel accordé par les États-Unis à l’UNRWA avant que l’administration Trump ait éliminé tout soutien à l’agence en 2018.

Trump a pris une mesure générale de suppression de l’aide aux Palestiniens pour les punir de leurs protestations contre la déclaration par les États-Unis de Jérusalem comme capitale d’Israël. La suppression des aides faisait manifestement partie d’une stratégie plus vaste de pressions brutales destinées à forcer les Palestiniens à se soumettre au processus de “paix” de la Maison-Blanche.

Jusqu’aux coupes pratiquées par Trump, les États-Unis étaient le contributeur le plus important de l’UNRWA depuis sa création en 1949. Avant 2018, les États-Unis donnaient annuellement 365 millions de dollars à l’agence, ce qui représentait presque un tiers du budget de l’UNRWA.

Le déficit résultant de ces coupes a plongé dans une crise sans précédent l’agence qui était déjà à court de liquidités, alors que la population de réfugiés palestiniens avait de plus en plus besoin de ses services.

“Un moment critique”

L’UNRWA remplit son rôle auprès de presque 5,7 millions de réfugiés palestiniens en Jordanie, en Syrie, au Liban, ainsi qu’en Cisjordanie occupée et dans la Bande de Gaza.

Philippe Lazzarini, commissaire général de l’UNRWA, a salué la reprise du financement, qui était attendue. “Aucune autre institution ne fait ce que fait l’UNRWA”, a-t-il dit.

“La contribution américaine intervient à un moment critique, alors que nous continuons à nous adapter aux défis que présente la pandémie du Covid-19.”

Israël a protesté contre cette annonce, Gilad Erdan, son ambassadeur aux États-Unis, dénigrant l’UNRWA présentée comme “une agence antisémite qui incite à l’hostilité contre Israël”.

Selon Erdan, “la définition malhonnête utilisée par l’agence pour déterminer qui est un ‘réfugié’ ne fait que perpétuer le conflit.”

L’UNRWA aide des générations multiples de réfugiés palestiniens car Israël leur a interdit d’exercer leur droit au retour sur les terres et dans les maisons dont ils ont été chassés.

Les dirigeants israéliens et les pro-israéliens tenants d’une ligne dure, déterminés à liquider les droits des réfugiés palestiniens, infligent depuis longtemps à l’UNRWA d’inlassables campagnes de diffamation, affirmant faussement que l’agence enseigne “l’incitation” anti-israélienne ou cache des armes dans ses écoles.

Pendant ce temps, Israël a ciblé à plusieurs reprises les écoles de l’UNRWA lors de ses offensives contre Gaza  et a massacré des civils palestiniens, y compris des enfants, qui avaient tenté d’y trouver un abri.

Erdan se faisait l’écho d’une allégation, répandue antérieurement par le Premier Ministre Benjamin Netanyahou, entre autres, selon laquelle les réfugiés palestiniens n’existent qu’en raison de la création d’une agence spéciale de l’ONU – l’UNRWA – destinée à prendre soin d’eux, et non parce qu’Israël dénie leur droit internationalement reconnu au retour.

Au sein du Congrès des États-Unis, les législateurs anti-palestiniens cherchent aussi à contrecarrer la reprise par l’administration Biden des financements interrompus par Trump.

Une loi fédérale promulguée en 2018 interdit de facto toute assistance à l’Autorité palestinienne “à moins qu’elle n’accepte de payer des sommes fixées au tribunal et atteignant parfois des centaines de millions de dollars en faveur de victimes américaines d’attentats palestiniens”.

Une autre loi empêche l’aide à l’Autorité palestinienne tant qu’elle versera des allocations aux familles de Palestiniens emprisonnés par Israël pour des “actes de terrorisme”.

Selon une déclaration du secrétaire d’État Antony Blinken, “toute assistance sera apportée de façon conforme à la loi des États-Unis”.

Le Département d’État a ajouté qu’il reprenait “également des programmes vitaux d’assistance sécuritaire”. L’administration Trump a supprimé l’an dernier le financement des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne.

L’aide militaire des États-Unis à Israël

Les 235 millions de dollars que l’administration Biden s’est engagée à verser aux Palestiniens à titre d’aide sont une somme dérisoire en comparaison avec les 3,8 milliards de dollars annuels d’aide militaire fournis sans restriction à Israël par les États-Unis.

Cette aide est utilisée pour acheter des armes de fabrication américaine employées contre les Palestiniens pour perpétuer l’occupation militaire d’Israël.

Des armes américaines ont servi à Israël pour perpétrer des crimes de guerre contre des civils palestiniens et pour détruire des infrastructures civiles.

Le mois dernier, la Cour pénale internationale a lancé une enquête sur les crimes de guerre commis en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

La semaine dernière, les États-Unis ont levé les sanctions économiques qui avaient été imposées par l’administration Trump contre le personnel de la CPI, y compris la procureure générale.

Alors qu’ils mettaient fin aux mesures punitives, les États-Unis ont de nouveau exprimé leur opposition à l’enquête de la CPI en Palestine tout en déclarant soutenir la “primauté du droit, l’accès à la justice et l’obligation de rendre des comptes pour des atrocités massives”.

Pourtant, un porte-parole du Département d’État s’est limité à bafouiller une phrase stéréotypée en faveur de la solution à deux États quand le journaliste Matt Lee, d’Associated Press, a demandé de façon répétée “Où vont-ils ?”, puisque les Palestiniens ne peuvent pas demander justice aux juridictions israéliennes. 

Jeudi [8 avril], Israël a annoncé qu’il ne coopérerait pas avec l’enquête de la CPI.

En mars, la Cour avait prévenu Israël de son intention de lancer une enquête, en lui donnant un mois pour faire savoir à la CPI s’il mènerait ses propres enquêtes sur les allégations de crimes.

Les services de Netanyahou ont déclaré qu’ils enverraient une lettre à la Cour “rejetant complètement l’assertion selon laquelle Israël commettrait des crimes de guerre”.

Une longue série de commissions internationales d’enquête et de missions de recherche des faits ont déterminé qu’Israël avait commis des crimes internationaux en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

Les recommandations de ces commissions n’ont jamais été mises en œuvre car l’impunité d’Israël a toujours été assurée par les États-Unis et d’autres alliés.

Plusieurs législateurs israéliens se sont engagés à commettre de nouveaux crimes de guerre le mois dernier, à la veille des élections israéliennes.

Maureen Clare Murphy fait partie de la rédaction de The Electronic Intifada et vit à Chicago.

Source : The Electronic Intifada

Traduction SM pour Agence média Palestine

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