Les trois cadeaux de Washington à Naftali Bennett

Par Edo Konrad, le 26 septembre 2021

Le Premier ministre israélien Naftali Bennett tient une conférence de presse au bureau du Premier ministre, à Jérusalem, le 18 août 2021. (Yonatan Sindel/Flash90)

La semaine passée a été une bonne semaine pour Naftali Bennett, peut-être l’une des meilleures depuis qu’il est devenu Premier ministre, il y a plus de trois mois. Bennett – qui a fait du coup fatal porté à la solution à deux États un pilier central de sa politique –  a probablement eu un grand sourire quand il a vu comment, en l’espace de quelques jours, la Maison Blanche et le Congrès lui avaient offert une série de victoires politiques.

La semaine a commencé avec un discours du Président Joe Biden devant l’Assemblée générale des Nations-Unies, où il a déclaré que si son Administration soutient toujours une solution à deux États, il y avait encore un « long chemin » avant qu’elle ne devienne une réalité. Par ces mots, Biden affirmait effectivement que la Maison-Blanche ne dépensera pas de capital politique pour amener Israël et les Palestiniens à la table des négociations. Il a été également rapporté que Bennett n’accordera pas une grande attention à la question palestinienne lorsqu’il interviendra dimanche devant l’Assemblée générale.

La déclaration de Biden a été renforcée par l’audition, à la Commission des affaires étrangères du Sénat, de Thomas Nides, l’ancien directeur général et vice-président de Morgan Stanley, lequel a été choisi par le Président pour être l’ambassadeur US en Israël. Nides a réussi son audition (il n’a pas encore été confirmé officiellement), recevant des éloges des deux côtés pour avoir annoncé qu’il renforcerait la sécurité israélienne, développerait les relations économiques entre les deux pays, et soutiendrait les accords d’Abraham, entre autres. Si Nides s’est dit favorable aux perspectives d’utiliser « les accords, existants et à venir pour apporter des améliorations tangibles au peuple palestinien », il est extrêmement improbable que cela se traduira, sur le terrain, par un changement significatif pour les Palestiniens qui vivent sous le régime militaire israélien.

Et puis est venu, à la Chambre des représentants, le projet de loi sur le Dôme de fer. Après que les progressistes du Parti démocrate eurent réussi à écarter une proposition visant à envoyer un milliard de dollars à Israël pour financer son système de défense antimissile – en plus de l’aide militaire annuelle qui est de 3,8 milliards de dollars – les Démocrates modérés, dans le cadre d’un projet de loi plus large pour un financement provisoire du gouvernement, ont présenté à l’audience de la Chambre un deuxième projet de loi qui fournirait ce milliard de dollars. Au moment du deuxième vote, et suite à des critiques intenses tant des Républicains que des Démocrates modérés, l’aile progressiste s’est divisée. Seuls, neuf des 435 représentants ont voté contre la « reconstitution » des capacités du Dôme de fer d’Israël, avec la représentante Alexandria Ocasio-Cortez – elle qui avait qualifié Israël « d’État apartheid » – finalement qui fait passer son vote de « non » à « présent », mettant en colère beaucoup de ceux qui l’avaient considérée comme une alliée de la lutte des Palestiniens.

Le discours aux Nations-Unies, l’audition pour la confirmation de Nides, et la débâcle des Démocrates pour le Dôme de fer sont d’excellentes nouvelles pour le Premier ministre israélien. Bennett – ancien président du Conseil de Yesha, l’organisation de tutelle  qui représente les intérêts du mouvement de colonisation de peuplement – a passé toute sa carrière à s’opposer à la création d’un État palestinien, et il a récemment déclaré qu’il avait l’intention de maintenir l’occupation en poursuivant une stratégie de « réduction du conflit ». En d’autres termes, le plan de Bennett est d’approfondir le soi-disant statu quo – et donc, les politiques d’apartheid d’Israël.

Il est révélateur de voir à quel point le Premier ministre a reçu du crédit de la part de ces cercles d’élite qui avaient tant méprisé son prédécesseur Benjamin Netanyahu, malgré les déclarations sans fard de ce dernier pour poursuivre la dictature militaire d’un demi-siècle d’Israël sur les Palestiniens. Que ni la Maison-Blanche, ni le Congrès, ne conditionnent la moindre aide à Israël à des mesures pour essayer de mettre fin à l’occupation montre à quel point, imprudemment, les dirigeants américains font peu de cas des intentions israéliennes ou de la vie des Palestiniens.

Peut-être que, plus que tout, cette semaine passée est un signal clair que, que ce soit Trump ou Biden, ou que ce soit Bibi ou Bennett, il n’y a pratiquement personne ayant un minimum de pouvoir qui se lèvera et en dira assez sur l’accélération de la domination militaire sans fin d’Israël. Pour l’instant, Washington reste déterminé à faire en sorte que le temps soit du côté de l’apartheid.

Source : +972

Traduction BP pour l’Agence média Palestine

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