Un Pogrom, et silence

Éditorial d’Haaretz pour Haaretz, 30 septembre 2021

Une voiture renversée au cours d’une attaque de colons contre le village palestinien de Mufgara, dans les collines du Sud d’Hébron. Soixante colons masqués ont attaqué des personnes, des maisons et des voitures, le 28 septembre 2021. (Alliance for Human Rights)

Les résidents des communautés palestiniennes du Sud-est de la Cisjordanie ont l’expérience des attaques de colons – quand ils font paître leurs troupeaux, travaillent leurs champs, ou même font un pique-nique sur leur propre terre. Mais ils ne peuvent se rappeler une attaque semblable à celle subie mardi par les petites communautés de Khirbat al-Mufkara, al-Rakiz et al-Tuwani. Le jour de Simhat Torah [la Joie de la Torah], des dizaines de jeunes Juifs, la plupart masqués, ont mené ce que l’on ne peut décrire que comme un pogrom.

Les assaillants, armés de bâtons et de poignards, ont lancé des pierres et blessé neuf Palestiniens, dont un petit garçon de trois ans, ont poignardé à mort quatre moutons, renversé des voitures garées et fracassé leur pare-brise, renversé et fracassé les panneaux solaires et brisé des fenêtres, dont celles d’une mosquée.

Un groupe d’assaillants venait de l’avant-poste d’Avigayil, un autre de l’avant-poste de Havat Maon, tous deux affiliés à la communauté religieuse sioniste. D’après les résidents, certains d’entre eux étaient arrivés dans un véhicule, et cinq ont tiré vers le sol avec leurs pistolets, près des pieds de certains des Palestiniens. Un Israélien, armé d’un fusil M-16, est arrivé de Havat Maon dans un véhicule tout-terrain et a tiré en l’air.

L’attaque a commencé lorsque certains des Israéliens masqués ont essayé de voler des moutons à l’un des résidents. Les soldats ont tenté de les en empêcher, disent les Palestiniens, et ont lancé des grenades de gaz sur eux et sur le troupeau. Les moutons se sont dispersés. Mais ensuite, lorsque les assaillants ont envahi les zones bâties des trois communautés, les soldats les ont couverts, lançant des grenades lacrymogènes et des grenades assourdissantes – et tirant même à balles réelles et des balles à bout en éponge – sur les Palestiniens qui cherchaient à protéger leur maison. Les familles ont fui vers les oueds voisins pour éviter d’être blessés.

Du début de l’année au 20 septembre, les Nations Unies ont recensé 333 attaques sur les Palestiniens de Cisjordanie, dont 93 ont fait des blessés. La pléthore d’attaques révèle un dessin dont l’objectif est clair : Expulser les Palestiniens, et les bergers et les fermiers, des terres agricoles et des terres libres de Cisjordanie définies comme la Zone C (sous contrôle total d’Israël). Les colons essaient d’accélérer l’expulsion discrète que l’État tente de conduire avec des méthodes bureaucratiques et planifiées.

Le gouvernement israélien et son chef doivent cesser de se cacher la tête dans le sable et de penser que l’occupation maligne et ses métastases disparaîtront d’elles-mêmes, afin de ne pas nuire à l’intégrité de la coalition. Dans ce gouvernement, il y a Yesh Atid, Kahol Lavan, les Travaillistes, le Meretz et la Liste Arabe Unie. Ils doivent faire comprendre au Premier ministre Naftali Bennett qu’ils ne resteront pas dans la coalition si ce gouvernement ne se réveille pas diplomatiquement et moralement, ne sévit pas contre ceux qui effectuent des pogroms dans les territoires, n’assure pas la sécurité des Palestiniens et n’arrête pas d’essayer des les expulser en violation du droit international. Il y a une limite aux concessions que l’on peut faire au détriment de la vie des autres.

L’article ci-dessus est l’éditorial en une du Haaretz, tel que publié dans les journaux en hébreu et en anglais en Israël.

Source : AURDIP

Traduction : J.Ch pour l’Agence Média Palestine

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