Fiche d’information : Surveillance israélienne & Restrictions sur les déplacements palestiniens

Le 29 novembre 2021

Des Palestiniens passent par un checkpoint militaire israélien séparant Jérusalem-Est de la Cisjordanie occupées. (Crédit Photo : Emil Salman)

Le gouvernement israélien surveille étroitement les communications et les déplacements de millions de Palestiniens, dans les territoires occupés (Cisjordanie, Jérusalem-Est, Gaza) qui ont vécu sous régime militaire israélien depuis 1967 et à l’intérieur d’Israël, ce qui fait des Palestiniens un des peuples les plus surveillés au monde.

Cette surveillance de masse fait partie d’un réseau complexe de contrôle qu’Israël a imposé sur les Palestiniens, particulièrement dans les territoires occupés. Ce système de contrôle inclut la restriction des déplacements physiques des personnes et des biens, la division et l’isolement des cités et des villes palestiniennes les unes des autres aussi bien que du monde extérieur, et la suppression de la liberté d’expression en ligne et hors ligne.

La feuille d’information qui suit fournit une vue d’ensemble des méthodes de surveillance et de contrôle physique d’Israël sur les Palestiniens dans les territoires occupés.

1. La surveillance et le repérage des Palestiniens par Israël

Israël utilise des caméras et des technologies de reconnaissance faciale pour enregistrer et localiser les Palestiniens, y compris aux checkpoints militaires qu’ils sont forcés de traverser en Cisjordanie occupée.  

  • En novembre 2021, le Washington Post a rapporté qu’Israël avait augmenté le contrôle des Palestiniens en Cisjordanie au cours des deux années écoulées par « un large effort de surveillance » incluant la technologie de reconnaissance faciale appelée Blue Wolf [Le loup bleu], qu’un ancien soldat israélien a désignée comme le « Facebook secret pour Palestiniens » de l’armée israélienne. Les soldats ont été encouragés à prendre des photos des Palestiniens, y compris des enfants et des personnes âgées, pour cette base de données, avec des prix accordés aux unités qui en rassemblaient le plus.
  • Le Post a aussi rapporté que l’armée israélienne avait installé des caméras pour scanner les visages à Hébron, la plus grande cité de Cisjordanie occupée, afin d’identifier les Palestiniens avant qu’ils ne montrent leurs papiers d’identité aux checkpoints, dans le cadre d’un « plus vaste réseau de caméras de télévision en circuit fermé, nommé ‘Hébron cité intelligente’, réseau [qui] fournit une surveillance en temps réel de la population de la ville et, a dit un ex-soldat, peut parfois voir l’intérieur des maisons privées ». Israël a aussi installé  un réseau étendu de caméras dotées du système de reconnaissance faciale dans la Vieille Ville de Jérusalem-Est occupée.
  • La reconnaissance faciale et la technologie de surveillance développées par Israël sur les Palestiniens dans les territoires occupés sont exportées à l’étranger, commercialisées comme «  testées sur le terrain » et sont largement utilisées aux États-Unis et par des compagnies multinationales.

Israël utilise massivement des drones militaires et des aérostats pour contrôler les Palestiniens dans les territoires occupés, particulièrement dans Gaza assiégée.

  • Combinée avec le fait qu’Israël utilise aussi des drones pour envoyer des gaz lacrymogènes ou tuer des Palestiniens, leur omniprésence aérienne provoque une anxiété et une peur généralisées dans la population.

Israël utilise une technologie puissante de logiciel espion comme Pegasus, développée par des entreprises israéliennes militaires et privées dirigées par d’anciens soldats, pour espionner les smartphones des Palestiniens. 

  • Pegasus permet aux utilisateurs d’espionner les smartphones, en accédant aux communications encryptées de l’individu ciblé, à ses documents audio et vidéo, à ses photos, à ses données de localisation, à son appareil photo et à son microphone. Début novembre 2021, il a été révélé qu’Israël avait utilisé Pegasus pour espionner six organisations majeures de la société civile palestinienne, y compris des défenseurs des droits humains documentant les violations israéliennes. L’Autorité palestinienne a dit que le logiciel espion Pegasus avait aussi été trouvé sur les téléphones de trois diplomates palestiniens de haut rang.
  • Le 3 novembre 2021, l’administration Biden a imposé des sanctions sur la compagnie israélienne qui vend Pegasus (avec l’approbation du gouvernement israélien), le groupe NSO, parce que le logiciel espion a été utilisé à de nombreuses reprises par des gouvernements autoritaires pour « cibler de manière malveillante » des journalistes, des défenseurs des droits humains, des dissidents politiques, et autres.

Israël utilise des collaborateurs pour espionner d’autres Palestiniens et pour provoquer des conflits entre Palestiniens, faisant souvent pression sur les gens pour qu’ils coopèrent, par la violence, l’emprisonnement et le chantage basé sur des informations personnelles obtenues par la surveillance ou par d’autres collaborateurs.

  • Depuis le début de son occupation des territoires palestiniens pendant la guerre de juin 1967, l’armée et la police secrète d’Israël, le Shin Bet, ont utilisé des collaborateurs pour espionner la population palestinienne occupée. Fréquemment, les Palestiniens sont contraints à la collaboration par des violences physiques, de l’emprisonnement, des menaces d’exposer publiquement de l’information personnelle potentiellement embarrassante, ou de refuser, à eux ou à leurs proches, la possibilité de voyager pour suivre un traitement médical non accessible en Cisjordanie ou à Gaza.
  • En septembre 2014, un groupe de 43 vétérans de l’Unité 8200 de l’armée israélienne, qui collectait des renseignements top secrets, a signé une lettre publique adressée à leurs commandants et au Premier ministre déclarant qu’ils ne travailleraient plus à quoi que ce soit ayant à voir avec les territoires occupés pendant leur service de réserve obligatoire à cause du mal causé par l’espionnage « universel » d’Israël. Ils ont particulièrement ciblé l’utilisation d’information personnelle glanée par cet espionnage pour contraindre par le chantage des personnes à collaborer. Selon The New York Times :

«  Dans leur témoignage et dans des interviews… les vétérans de l’Unité 8200 ont décrit des activités exploitatrices focalisées sur des innocents qu’Israël espérait recruter comme collaborateurs. Ils ont dit que des renseignements sur les problèmes médicaux et l’orientation sexuelle faisaient partie des bribes d’information collectées. Ils ont dit que les Palestiniens n’avaient pas assez de protection juridique vis-à-vis du harcèlement, des extorsions et des préjudices. ‘Les conversations sexuelles palestiniennes étaient toujours un sujet chaud à passer d’une personne de l’unité à une autre pour une bonne rigolade ‘, disait le témoignage d’un officier. »

  • La lettre des vétérans indiquait aussi comment Israël utilise les renseignements collectés par l’espionnage pour semer la discorde à l’intérieur de la société palestinienne et comme preuve secrète dans le système des tribunaux militaires d’Israël que les organisations de défense des droits humains ont condamné comme injuste, disant en particulier :

«  La population palestinienne sous régime militaire est complètement exposée à l’espionnage et à la surveillance des services de renseignements israéliens. C’est utilisé pour la persécution politique et pour créer des divisions à l’intérieur de la société palestinienne en recrutant des collaborateurs et en mobilisant des parties de la société palestinienne contre elle-même. Dans de nombreux cas, les renseignements empêchent les défendeurs de recevoir un procès équitable dans les tribunaux militaires, étant donné que les preuves contre eux ne sont pas dévoilées. »

Israël surveille étroitement les Palestiniens sur les réseaux sociaux, arrêtant des gens pour des posts qui encouragent la résistance à l’occupation d’Israël et au régime d’apartheid, et il exerce des pressions sur les compagnies de haute technologie pour qu’elles censurent des posts et suspendent les comptes de journalistes et militants palestiniens, et d’autres.

  • Pendant l’escalade de violence en mai 2021 provoquée par les tentatives d’Israël d’expulser par la force des familles palestiniennes de leurs maisons et par des attaques contre les fidèles palestiniens dans le complexe révéré de l’esplanade des mosquées à Jérusalem-Est, des millions de posts par des Palestiniens ou leurs soutiens, dont des journalistes et des défenseurs des droits humains, ont été bloqués et restreints par Facebook, Instagram et Twitter, déclenchant la condamnation de la part de groupes de défense des droits. Des comptes appartenant à des Palestiniens ont été aussi suspendus, y compris le compte Instagram de Mona El-Kurd, qui a été désignée par Time Magazine comme l’une des personnes les plus influentes de 2021, avec son frère Mohammed, à cause du rôle de premier plan qu’ils ont joué en résistant aux tentatives des colons de s’emparer des maisons de leur famille et d’autres Palestiniens à Jérusalem-Est.

2. Restrictions israéliennes au déplacement physique des Palestiniens

Israël utilise des cartes d’identité biométriques, des permis de voyage et le contrôle du registre de la population dans les territoires occupés pour surveiller les Palestiniens et limiter où et avec qui ils ont le droit de vivre et où ils peuvent voyager.

  • Tous les Palestiniens dans les territoires occupés sont obligés d’avoir des cartes d’identité émises par Israël et portant un code couleur, qui affectent tout, de la liberté de mouvement à l’unité familiale. Les Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza ont des cartes d’identité vertes et les Palestiniens de Jérusalem-Est en ont des bleues. Les Palestiniens avec des cartes vertes ne peuvent entrer dans Jérusalem ou d’autres parties de la Palestine historique à l’intérieur des frontières d’Israël internationalement reconnues avant 1967 sans une permission spéciale, qui est rarement accordée. Tous les Palestiniens dans les territoires occupés ont besoin de la permission israélienne pour voyager à l’étranger.
  • Le contrôle par Israël du registre de la population fournit à l’armée israélienne une énorme banque de données couvrant chaque Palestinien de Cisjordanie et de Gaza, lui permettant de contrôler leurs mouvements et leurs droits de résidence. Selon Human Rights Watch : 

«  Depuis 1967, le registre de la population a été central dans les efforts administratifs d’Israël pour contrôler la composition démographique du territoire palestinien occupé … Israël a utilisé le statut résidentiel des Palestiniens comme un outil pour contrôler leur possibilité de résider en Cisjordanie, d’y emménager et de voyager à l’étranger à partir de la Cisjordanie, ainsi que de voyager de Gaza en Israël et en Cisjordanie. » 

Israël utilise des murs, des checkpoints militaires et d’autres obstacles physiques pour contrôler et limiter les mouvements des Palestiniens.

  • À n’importe quel moment, il y a des centaines de checkpoints militaires israéliens, des blocages de routes et d’autres obstacles au déplacement palestinien à l’intérieur de la Cisjordanie occupée, une zone plus petite que l’Etat du Delaware. Un réseau d’autoroutes réservées aux Israéliens, et reliant les colonies les unes aux autres et à Israël proprement dit, divise les communautés palestiniennes — sur les terres desquelles ces autoroutes sont construites — et restreint le déplacement des personnes. L’entreprise coloniale d’Israël et le mur de Cisjordanie limitent aussi le déplacement des Palestiniens et les coupent de leur terre, aussi bien que des uns les autres. Israël a également construit un mur le long de la frontière de Gaza occupée et assiégée afin de rendre plus facile l’emprisonnement et le contrôle des Palestiniens dans cette zone.

Le siège illégal et le blocus d’Israël à Gaza empêchent 2 millions de Palestiniens de quitter la minuscule enclave côtière appauvrie, à de rares exceptions près.

  • Depuis 2007, Israël a imposé un siège et un blocus naval paralysant Gaza, qui ont été condamnés par les Nations Unies et les groupes de défense des droits humains en tant qu’ils sont une punition collective de la population entière, ce qui est illégal. Sous le siège, il est presque impossible aux Palestiniens de quitter la minuscule zone appauvrie qu’est Gaza, même pour voyager en Cisjordanie ou à Jérusalem pour étudier, travailler, rendre visite à la famille ou recevoir un traitement médical vital. L’armée israélienne empêche aussi les pêcheurs de Gaza de naviguer loin du rivage, leur déniant la possibilité d’atteindre les zones de pêche les plus productives : elle les arrête fréquemment, tire sur eux, les blesse ou les tue, au cours de la procédure. Gaza est souvent décrite comme la plus grande prison à ciel ouvert du monde.

Israël empêche la plupart des Palestiniens de visiter Jérusalem.

  • Israël dénie à la plupart des Palestiniens en Cisjordanie occupée et à Gaza la possibilité de voyager à Jérusalem-Est occupée, pour rendre visite à leur famille, aux amis, pour faire des affaires ou pour prier aux lieux sacrés, même si selon le droit international Jérusalem-Est ne fait pas légalement partie d’ Israël et est considérée comme une unité territoriale isolée, ainsi que le reste des territoires occupés. Jérusalem est centrale à l’identité nationale palestinienne, à la culture et à la vie religieuse palestiniennes et pourtant la plupart des Palestiniens ne sont pas autorisés à la visiter ou à vivre dans la ville à cause des politiques israéliennes racistes conçues pour augmenter le nombre de résidents juifs et diminuer le nombre de Palestiniens.

Israël dénie à la plupart des Palestiniens de la diaspora le droit de visiter leur patrie.

  • En plus de restreindre le déplacement des Palestiniens directement sous son contrôle, Israël empêche la plupart des Palestiniens qui vivent en dehors de Palestine/Israël de retourner dans leur patrie ou même de la visiter. Plus de Palestiniens vivent en dehors de Palestine/Israël qu’à l’intérieur, et des millions de réfugiés se voient dénier leur droit légal au retour parce qu’ils ne sont pas juifs. Parallèlement, des juifs nés n’importe où dans le monde peuvent emménager en Israël ou dans une colonie construite illégalement sur une terre palestinienne occupée, recevoir automatiquement la citoyenneté israélienne et avoir plus de droits que les Palestiniens autochtones autour d’eux.

Trad. CG pour l’Agence Media Palestine

Source : The IMEU

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