Le projet de loi finlandais rendrait illégaux les produits des colonies israéliennes

Le 22 décembre 2021, par Ali Abunimah

Des soldats israéliens montent la garde pendant que des colons installent des tentes et des mobil homes sur des terres palestiniennes près de la colonie de Kiryat Arba dans la cité cisjordanienne de Hébron, le 17 décembre. (Mamoun Wazwaz APA Images)

Un nouveau projet de loi en Finlande bannirait l’importation des produits des colonies israéliennes construites sur des terres palestiniennes et syriennes occupées.

« Les Palestiniens souffrent de la plus longue occupation de l’histoire moderne et des politiques israéliennes qui enfreignent le droit international et violent les droits humains », a dit Veronika Honkasalo, la députée de l’Alliance de gauche qui a proposé la législation. « Nous devons cesser de soutenir les colonies israéliennes illégales ».

Le projet de loi ne nomme aucun pays spécifique.

Il s’appliquerait à toute situation internationalement reconnue d’occupation militaire et de colonisation, y compris potentiellement au Sahara occidental ou à la Crimée.

« Une législation de cette sorte soutient parfaitement le droit international et est cohérente avec lui », a dit Michael Lynk, le rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits humains en Cisjordanie occupée et dans la Bande de Gaza.

Lynk, un expert indépendant nommé par le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, parlait le 15 décembre à un panel présidé par Honkasalo.

« Elle est conforme aux décisions des Nations unies », a ajouté Lynk, « et, plus important, elle est conforme à une approche basée sur les droits qui résulterait vraiment en une paix juste et durable au Moyen Orient. »

Il y a maintenant environ 700 000 colons israéliens vivant dans près de 300 colonies dans toute la Cisjordanie, y compris Jérusalem Est, et 20 000 de plus dans les Hauteurs du Golan en Syrie — toutes construites depuis qu’Israël a occupé les territoires en 1967.

L’illégalité des colonies d’Israël est « exceptionnellement claire », a dit Lynk, notant que le Conseil de sécurité des Nations unies a déclaré leur construction « une violation flagrante » du droit international à au moins sept occasions.

Le Statut de Rome, le document fondateur de la Cour pénale internationale, définit comme crime de guerre le fait d’installer des civils sur un territoire occupé.

Il y a plus de quarante ans, le Conseil de sécurité des Nations unies a appelé tous les Etats « à ne fournir à Israël aucune assistance destinée à être utilisée en connexion avec des colonies dans les territoires occupés. »

Lynk a dit que la formulation était « assez large » pour « inclure toute relation de commerce avec ces colonies, parce que cela fournit à ces colonies l’oxygène économique dont elles ont besoin pour être capables de se maintenir et de croître. »

Bruxelles ne peut le bloquer

Le projet de loi de Honkasalo n’est pas le premier effort pour bannir les importations des colonies dans un pays de l’Union européenne (UE).

La loi sur les territoires occupés d’Irlande, qui a le même objectif, a gagné la majorité dans les deux chambres du Parlement de ce pays.

Cependant, le gouvernement irlandais bloque sa mise en œuvre au motif que cela entrerait en conflit avec le droit de l’Union européenne.

Mais ce prétexte a été balayé plus tôt dans l’année. Suivant le jugement d’un tribunal, l’UE a été contrainte à reconnaître que bannir les produits des colonies est une question commerciale, plus qu’une forme de sanctions.

Cette distinction ésotérique a des implications juridiques majeures, selon Tom Moerenhout, un expert de droit économique international qui enseigne à l’Université Columbia à New York.

Elle signifie que les Etats membres individuels de l’UE, comme l’Irlande et la Finlande, sont dans leurs droits s’ils bannissent des produits des colonies sans permission de Bruxelles, a dit Moerenhout lors du panel du 15 décembre.

Selon le droit international, les Etats sont obligés de ne pas reconnaitre, et de ne pas aider l’annexion illégale ou la colonisation d’un territoire occupé, a dit Moerenhout.

Même si l’UE n’offre pas un traitement préférentiel aux produits des colonies israéliennes dans les accords commerciaux avec Israël, elle leur permet encore un accès régulier à ses marchés.

C’est une forme de « reconnaissance implicite » des colonies, a expliqué Moerenhout.

Un modèle pour d’autres pays

Les supporters de la législation de Honkasalo, qui ne sera probablement pas soumise à un premier vote avant le printemps, ont maintenant besoin de créer un soutien pour elle parmi les députés finlandais.

Même si cela sera sans aucun doute un travail difficile, il y a des bases pour cela.

« En Finlande, il y a en fait un engagement de longue durée du Parti social démocrate, partagé par les partis sociaux démocrates de Suède, de Norvège et d’Islande, ils se sont engagés à travailler en vue d’interdire internationalement les produits des colonies », a dit Syksy Räsänen, un physicien qui préside ICAHD Finland, un groupe non partisan qui promeut les droits palestiniens.

Les sociaux démocrates dirigent actuellement le gouvernement de coalition à Helsinki.

Le projet de loi « remplirait partiellement l’obligation de l’Etat finnois à ne pas reconnaître une situation illégale », a dit Räsänen au panel.

Partiellement, parce qu’il ne ferait qu’interdire les importations, sans aborder les autres manières dont le commerce extérieur soutient la colonisation illégale, par des investissements, des financements ou en proposant des services aux colonies.

Mais selon Räsänen, le projet de loi éloignerait néanmoins le traitement des colonies « du cadre de la politique de pouvoir et des relations entre Etats, pour être guidé plutôt par des objectifs de droits humains et fondé davantage sur le droit international ».

Bien que son projet de loi soit encore dans ses premières étapes, Honkasalo a dit avoir déjà reçu des requêtes de députés d’autres pays, qui sont intéressés par l’utilisation de sa législation comme modèle pour leurs propres initiatives.

« Je suis très heureuse du nombre de réactions positives que ce projet de loi a suscitées », a dit Honkasalo.

Ali Abunimah, cofondateur de The Electronic Intifada, est l’auteur de The Battle for Justice in Palestine, paru chez Haymarket Books. Il a aussi écrit : One Country: A Bold Proposal to end the Israeli-Palestinian Impasse. Les opinions exprimées sont les siennes seules.

Trad. CG pour l’Agence Media Palestine

Source : The Electronic Intifada

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