Le 18 février 2022
Ciné Palestine Toulouse Occitanie revient comme chaque année avec la promesse du printemps, pour une 8ème édition qui se déroulera du 7 au 15 mars 2022 à Toulouse et en région. Trente-cinq films, courts et longs métrages, documentaires et fictions, qui nous entraîneront de la violence de l’occupation à la fable amoureuse, du réalisme au conte, de l’absence à soi à la belle rage des femmes.
Que peut le cinéma ? La question n’est pas neuve et n’appelle pas de réponse simple, mais dans un monde palestinien éclaté et contraint, la vitalité du cinéma exprime toute la force d’une irréductible présence par-delà toutes les impasses politiques. Cette 8ème édition se veut à la mesure d’une telle vitalité, un cinéma dans tous ses états, qu’il soit palestinien ou qu’il touche à la Palestine.
Un cinéma qui conjuguera cette année un regard acéré sur l’univers kafkaïen d’un quotidien sous occupation, un regard sans complaisance sur une société patriarcale et ses déchirures internes, là où l’intime touche au politique, un regard singulier enfin sur l’ailleurs, l’Égypte, le Liban …
Des films mais aussi des rencontres, des débats, des réalisatrices et réalisateurs invités, des interventions en milieu scolaire, un concert, des lectures et une exposition de photos.
Bienvenue en Palestine. C’est à Toulouse et en Région, du 7 au 15 mars 2022.
Site web : cine-palestine-toulouse.fr
Retrouvez ci-dessous la présentation du film qui sera diffusé en avant-première !
Réminiscences, Rashid Masharawi (2021)
« J’appartiens à une ville que je ne connais pas et que je n’ai jamais vue » déclare Rashid Masharawi, né en 1962, au camp As-shati, de parents réfugiés à Gaza en 1948. Cette ville, c‘est Jaffa qu’il découvre à travers les récits de Taher Al Qalyubi, né en 1929, réfugié lui aussi à Gaza en 1948.
Face à une caméra, le vieil homme enregistre ses souvenirs de Jaffa sur cassette VHS. A partir de ce récit, d’images d’archives, de cartes postales et de photos de famille, Masharawi met en scène le quotidien des Jaffaouis entre 1930 et 1948; le film est une fresque en noir et blanc rendue vivante par la remarquable bande- son de Viktor Epp- bruits naturels, sons et voix, musiques d’archive- qui fait oublier la fixité des images : on entend et on voit les vagues déferler sur la plage, les baigneuses rire et s’amuser, les marchands discuter avec leurs clients, les trains rouler, les joueurs de trictrac lancer leurs dés…
C’est la Jaffa des années 30, avant la grande grève palestinienne (1936-1939), l’apogée de la répression britannique et les débuts de l’émigration massive juive. Les images suivent le récit de l’enfance et de la jeunesse de Al Qalyubi et montrent une capitale prospère, tolérante, ouverte sur le monde : on y va au cinéma, au théâtre, à la plage, au marché, à l’école. Le port est à la fois un important port de pêche et un haut lieu du commerce méditerranéen, les marchandises européennes y arrivent, des milliers de tonnes d’oranges partent vers le monde entier.
Peu à peu, à ce tableau de prospérité succèdent des images de répression, de terrorisme, de destruction qui aboutissent à l’exil, qu’ils croient temporaire, de la famille Alqayubi et des habitants de Jaffa devant les milices et les organisations paramilitaires juives.
Réminiscences est construit sur des allers-retours entre les réflexions de Masharawi et le long récit de Al Qalyubi qui ramène le cinéaste au passé de sa propre famille, en résonance avec les photographies et les documents d’archives. L’ensemble donne chair aux histoires respectives des deux protagonistes qui s’inscrivent dans l’Histoire de la Palestine. Pourtant les deux hommes ne se sont jamais connus, Al Qalyubi est mort six mois avant que Masharawi ne le « rencontre » par le biais de ses enregistrements.
L’émotion est à fleur de récit tout au long de ce témoignage d’un homme en fin de vie, elle transparait aussi dans les commentaires de Masharawi, elle s’échappe des images fixes, des musiques, du fond sonore, émotion d’autant plus forte qu’elle signe des vies fracassées et la disparition d’un pays.