Les nouvelles règles israéliennes sur les étrangers se rendant en Cisjordanie déclenchent l’indignation

Par l’équipe d’Al Jazeera, le 27 avril 2022

Des critiques dissent que cette politique vise à restreindre et à tracer les déplacements de ressortissants étrangers et à contrôler la population palestinienne.

Les Nouvelles restrictions à l’égard des étrangers entrant en Cisjordanie ont entraîné une controverse [File: Ronen Zvulun/Reuters]

Des experts juridiques palestiniens, des universitaires et des groupes de défense des droits numériques se sont indignés à propos d’une nouvelle politique israélienne sur l’entrée et le séjour d’étrangers en Cisjordanie occupée, dont ils disent qu’elle complique encore davantage les règles sur les déplacements et ajoutent des restrictions à un système déjà complexe. 

L’ordonnance de 97 pages, appelée Procédure d’Entrée et de Séjour des Étrangers en Judée et Samarie (PDF), remplace le document actuel de quatre pages. Judée et Samarie est le terme utilisé par le gouvernement israélien pour désigner la Cisjordanie. 

Cette politique comporte des règles d’entrée plus développées, dont certains experts juridiques disent qu’elles sont une tentative de restreindre et de tracer les déplacements des ressortissants étrangers dans les territoires palestiniens occupés, de contrôler la population palestinienne et de garder des données sur les revendications territoriales de Palestiniens de nationalités étrangères.  

Les nouvelles règles, prévues pour entrer en vigueur le 22 mai 2022, ont été publiées en février mais n’ont retenu que peu d’attention sur le moment.

Les règles traitent la Cisjordanie comme une partie intégrante d’Israël, utilisant des termes comme « Judée et Samarie » ou la « Zone ». Elles concernent aussi l’entrée en Israël dans le but de « transiter » vers la Cisjordanie. 

Ces règles compliquent encore davantage et formalisent des restrictions écrites et non écrites sur l’entrée d’étrangers souhaitant se rendre, mener des activités économiques, se réunir et séjourner dans leur famille palestinienne, travailler ou faire du volontariat en Cisjordanie ou étudier ou enseigner dans des institutions académiques palestiniennes. 

Des Palestiniens détenteurs de passeports étrangers doivent fournir une information – pour obtenir un visa – sur une demande à présenter pour approbation avant leur voyage, en indiquant les noms et les données sur l’identité nationale de parents du « premier degré » ou d’autres personnes hors de leurs familles auprès desquelles ils comptent se rendre ou séjourner.  

Des experts sur les droits numériques disent que l’information personnelle sur les voyageurs, sur leur famille et sur leurs connaissances est susceptible d’être utilisée dans le cadre de la surveillance de masse et de la collecte de données d’Israël. 

« C’est un exercice de surveillance » dit Marwa Fatafta, directrice de la politique de MENA, avec Access Now, un groupe de défense des droits numériques. « Avec la nouvelle politique, les autorités israéliennes veulent avoir une trace des cercles de relations et de la propriété des Palestiniens qui vivent à l’étranger avec des passeports étrangers ».

 « L’ensemble du système d’identification est construit pour contrôler les deux aspects les plus cruciaux en Palestine : les gens et la terre. Maintenant, d’une certaine manière, cela s’appliquera aussi aux Palestiniens qui ont des liens avec la Cisjordanie » a-t-elle dit à Al Jazeera. 

Concernant la nouvelle politique, des différences sont établies entre des voyageurs voulant rendre visite à des Palestiniens en Cisjordanie et ceux qui rendent visite aux colons israéliens. Seuls ceux qui vont chez des Palestiniens doivent obtenir un permis avant leur déplacement et pour cela, fournir les informations mentionnées plus haut. 

Le document dit que le but des nouvelles règles est de « définir les niveaux d’autorité et la manière de procéder d’étrangers qui souhaitent entrer en Judée et Samarie ». Les autorités israéliennes disent que les restrictions de déplacement en Cisjordanie sont nécessitées par des raisons de sécurité. 

Al Jazeera s’est adressé au COGAT, le corps civil de l’armée israélienne qui administre la Cisjordanie, pour des commentaires sur les nouvelles règles, mais n’a pas eu de réponse jusqu’au moment de publier.

L’Effet sur le monde universitaire palestinien

Les universitaires souhaitant étudier ou travailler dans une université de Cisjordanie, y compris à Jérusalem Est occupée, sont soumis à des quotas et à d’autres restrictions sur le travail universitaire, selon les nouvelles règles. 

Seuls 150 étudiants étrangers sont admis à étudier dans des universités palestiniennes, et même dans leur cas, ce ne peut être que dans des disciplines préapprouvées.

Le document précise : « Les demandes de permis dans cette section seront approuvées s’il est prouvé, selon l’appréciation du représentant autorisé du COGAT, que l’enseignant contribue de façon significative à l’enseignement académique, à l’économie de la Zone, ou à l’avancement de la coopération et de la paix dans la région ». 

Les mêmes restrictions ne s’appliquent pas à ceux qui souhaitent étudier dans des institutions académiques israéliennes, qu’elles se situent en Israël ou en Cisjordanie.

Les détenteurs de diplômes de troisième cycle sont autorisés à enseigner dans des institutions palestiniennes, uniquement pour un trimestre par année universitaire et il leur est interdit de candidater pour enseigner de nouveau pendant neuf mois. Si l’enseignant a un doctorat et que les autorités israéliennes le considèrent comme un enseignant « distingué », il peut rester pour de plus longues périodes ; il y a cependant un quota de 100 enseignants étrangers. 

Basri Saleh, le sous-secrétaire du ministère palestinien de l’éducation supérieure et de la recherche scientifique a dit que le gouvernement israélien « serrait les vis » de façon arbitraire à l’égard des gens souhaitant se rendre en Cisjordanie. Les nouvelles restrictions israéliennes « vont forcer de nombreux professeurs et universitaires qui travaillent depuis de nombreuses années dans des universités palestiniennes à partir » a dit Saleh.

Dans une déclaration, l’Université de Birzeit, l’une des plus prestigieuses institutions académiques de Cisjordanie, a blâmé les nouvelles procédures et incité « toutes les institutions universitaires et les organisations de défense des droits humains » à se joindre à la condamnation de « cette claire violation du droit international ». 

Source : Al Jazeera

Traduction SF pour l’Agence média Palestine

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