Omar Barghouti -A la rédaction : Sur les déformations de mes propos

Par Omar Barghouti.

Omar Barghouti est co-fondateur du mouvement BDS.

Dans sa tribune, Natalie L. Kahn blanchit le régime d’apartheid d’Israël et dénature à la fois le mouvement BDS et mes opinions personnelles. 

Des faits de base sur BDS méritent d’être rappelés. Inspiré par la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud et le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis, BDS prend racine dans des décennies de résistance palestinienne non-violente. Il a été lancé en 2005 par la plus large coalition palestinienne, appelant à mettre fin à l’occupation militaire d’Israël qui a commencé en 1967, à soutenir le droit des réfugiés palestiniens à retourner dans leurs terres qui sont soumises à un nettoyage ethnique depuis 1947-1948, et à mettre fin au régime d’apartheid d’Israël, un « régime de suprématie juive du Jourdain à la Méditerranée », comme la principale organisation israélienne de défense des droits humains, B’Tselem, le décrit.

B’Tselem n’est pas seule. Suivant l’exemple de nombreux avocats et experts des droits humains, palestiniens, sud-africains et internationaux, Human Rights Watch et Amnesty International ont aussi désigné Israël comme un Etat d’apartheid. Le rapport d’Amnesty a conclu qu’Israël traite tous les Palestiniens comme « un groupe racial non-juif inférieur ». Un  ancien procureur général israélien a aussi exprimé son avis en disant : « Vous ne pouvez simplement pas être une démocratie progressiste si vous maintenez l’apartheid sur un autre peuple. C’est une contradiction dans les termes parce que la société entière d’Israël est complice de cette réalité injuste. » 

Dans sa lutte pour démanteler ce régime d’oppression, le mouvement BDS s’est constamment opposé à toutes les formes de racisme, dont l’antisémitisme, et assiste à une augmentation inspirante de ses soutiens parmi les Démocrates et les Américains juifs. Il appartient à la vague intersectionnelle progressiste qui défend ce qu’Angela Davis appelle « l’indivisibilité de la justice ». Il rejoint les luttes autochtones, raciales, économiques, de genre, BGLTQ, pour le climat et la justice sociale, dans le combat contre le fascisme, le racisme, la suprématie blanche, le patriarcat et le néolibéralisme.

Reflétant ces liens croisés entre les luttes et exprimant une analyse largement partagée parmi les progressistes des Etats-Unis, la députée Cori Bush a dit un jour : «  La lutte pour les Vies noires et le combat pour la libération de la Palestine sont interconnectés. Nous nous opposons à ce que notre argent aille subventionner un police militarisée, l’occupation et les systèmes d’oppression violente et de traumatisme … Nous sommes anti-apartheid. Point. » 

Enfin, le mouvement BDS ne prend aucune position sur la solution politique définitive. Personnellement, j’en ai une. Mais Kahn répète une interprétation déformée et fallacieuse de ma position, une interprétation promue par le groupe de lobby pro-Israël de droite AIPAC. Voici ce que j’ai vraiment dit :

« Un Etat juif en Palestine sous une forme quelconque ne peut que contrevenir aux droits fondamentaux de la population palestinienne autochtone et perpétuer un système de discrimination raciale qui devrait être catégoriquement rejeté.

« Exactement comme nous nous opposerions à un ‘Etat musulman’, ou à un ‘Etat chrétien’, ou à toute forme d’Etat exclusionniste, résolument, tout à fait résolument, nous nous opposons à un Etat juif dans une partie quelconque de la Palestine. Aucun Palestinien, un Palestinien rationnel, pas un Palestinien vendu, n’acceptera jamais un Etat juif en Palestine.

«  Accepter les Israéliens juifs actuels comme citoyens égaux et pleins partenaires dans la construction et le développement d’une nouvelle société partagée, libre de toute soumission coloniale et de toute discrimination, comme le réclame le modèle d’un Etat démocratique, est l’offre la plus magnanime et rationnelle qu’une population autochtone opprimée peut présenter à ses oppresseurs. Donc n’en demandez pas plus. » 

Qu’y-a-t-il de mal dans une démocratie non-raciale et des droits égaux pour tous ?

Source : The Harvard Crimson

Traduction CG pour l’Agence média Palestine

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