L’Intifada de la prison : soutenir les prisonniers en détention administrative

Par Basil Farraj, le 2 août 2022

La détention administrative est au centre des tentatives du régime israélien pour empêcher la mobilisation des Palestiniens. L’analyste politique d’Al-Shabaka, Basil Farraj, montre comment les détenus administratifs palestiniens ont sans cesse résisté à cette politique et réclamé qu’on mette fin à son extension et à son utilisation arbitraire. Il propose des recommandations aux organisations de la société civile palestinienne, aux parties prenantes nationales et aux associations de solidarité sur la façon de soutenir l’intifada palestinienne continue des prisons.

Le régime colonial de peuplement israélien utilise depuis longtemps la politique de la détention administrative comme faisant partie des tactiques de sa politique carcérale à l’encontre des Palestiniens. Cette politique permet à Israël de détenir des Palestiniens à n’importe quel moment et indéfiniment, sans charge ni procès. Son application largement étendue et arbitraire permet au régime israélien de criminaliser la mobilisation sociale et politique des Palestiniens, et de contrecarrer la résistance des Palestiniens contre la violence et la dépossession incessantes – le tout en présentant ces Palestiniens comme un danger pour « la sécurité » et « l’ordre public » d’Israël.

L’utilisation de la détention administrative par Israël remonte aux premiers jours de sa violente création, et les détenus ont constamment réclamé la fin de son utilisation, faisant remarquer le tort qu’elle leur inflige, à eux et à leurs familles. Le 1er janvier 2022, les presque 500 détenus administratifs enfermés à l’époque dans les prisons israéliennes ont lancé un boycott collectif des tribunaux militaires et appelé les avocats à ne pas assister aux séances des tribunaux et à ne pas s’engager dans des procédures judiciaires relatives à leur détention. Ce boycott, qui a pris fin le 27 juin 20221, est une continuation de décennies de lutte des Palestiniens contre la politique carcérale d’Israël – y compris avec des grèves de la faim, des manifestations contre les autorités carcérales, et certaines formes de production culturelle en captivité.

Cette note d’orientation contextualise l’utilisation par Israël de la détention administrative contre les Palestiniens, historiquement et juridiquement, et explique comment la politique concerne plus largement le fonctionnement des tribunaux militaires israéliens et leur criminalisation du militantisme palestinien. Elle examine aussi le très récent boycott des tribunaux militaires par les détenus, situant cette action dans le répertoire élargi des réponses des détenus à la violation systémique de leurs droits par Israël. Alors que le boycott de plusieurs mois n’a pas abouti à la fin de la pratique de la détention administrative, elle a confirmé qu’une action unifiée des détenus, des militants, des avocats, de la direction politique palestinienne et de la société civile locale et internationale et des organisations des droits de l’homme est nécessaire pour réaliser cet objectif.

La détention administrative israélienne dans un contexte historique et juridique

A travers le monde, des gouvernements peuvent détenir administrativement des individus dont ils jugent qu’ils présentent un « risque sécuritaire » et justifient ce genre d’action comme déjouant préventivement de potentielles menaces. Le droit humanitaire international et le droit international des droits de l’homme permettent aux États de recourir à cette mesure selon des codes strictement définis et dans des circonstances exceptionnelles. C’est-à-dire que la détention administrative est considérée comme une mesure extrême qui devrait être soumise à des dispositions juridiques strictes et à des mécanismes de contrôle.

Les processus d’examen juridictionnel créent une façade de contrôle judiciaire tout en permettant à Israël de contourner les batailles juridiques grâce auxquelles les détenus et leurs avocats seraient en mesure de présenter une véritable défense.

Par exemple, les articles 42 et 78 de la Quatrième Convention de Genève (1949) – ratifiée par Israël en 1951 – permet l’utilisation de mesures administratives, dont la détention administrative, uniquement si jugée absolument nécessaire pour maintenir la sécurité de la puissance détentrice. La Convention Internationale sur les Droits Civiques et Politiques (CIDCP) – ratifiée en 1991 – n’autorise de la même façon des détentions administratives que dans des circonstances exceptionnelles.

Un Régime Juridique Complexe

L’utilisation de la détention administrative en Palestine remonte au Mandat britannique, quand le gouvernement colonial a adopté la Réglementation de la Défense de 1945 (en cas d’urgence), imposant dans les faits la loi martiale en Palestine. Les règlements permirent aussi au gouvernement colonial d’établir des tribunaux militaires s’il le jugeait nécessaire. Le régime colonial de peuplement israélien a adopté ces règlements lors de sa création en 1948 et, au cours des années, a formulé diverses lois pour permettre la détention prolongée de Palestiniens sous prétexte de maintenir « la sécurité » et « l’ordre public ».

Actuellement, le régime israélien utilise trois lois et ordres distincts pour justifier et faciliter la détention administrative à travers la Palestine colonisée : 

1. L’Ordre Militaire 1651, Ordre Concernant les Directives de Sécurité [Version Consolidée]  2 autorise le commandant des forces d’occupation israéliennes, ou les commandants autorisés par lui, à émettre des ordres de détention administrative contre les Palestiniens de Cisjordanie pour des périodes n’excédant pas six mois et à les renouveler indéfiniment. Par ailleurs, il autorise le juge du tribunal militaire à recevoir des preuves en l’absence des détenus et de leur conseil juridique, et de ne pas les révéler si le juge est convaincu qu’agir ainsi « pourrait nuire à la sécurité de la région ou à la sécurité publique », empêchant ainsi toute forme de défense juridique.

2. La Loi sur l’Internement de Combattants Illégaux permet à Israël de détenir des Palestiniens à Gaza pour une période indéfinie. Elle définit un « combattant illégal » comme une personne qui n’a pas droit au statut de prisonnier de guerre, et qui est engagée dans « des hostilités » contre Israël, ou qui est membre d’une force qui est engagée dans « des hostilités » contre Israël. A la différence des lois applicables aux résidents de Cisjordanie qui spécifient la durée de chaque ordre de détention, la détention des « combattants illégaux » n’a pas de limite de durée. Les détentions ne prennent fin que si le ministre israélien de la Défense pense que les conditions qui les justifient cessent d’exister.

Selon cette loi, les détenus doivent être présentés devant un tribunal de district israélien pas plus tard que 14 jours après leur emprisonnement et, si un ordre est émis, ils doivent subir un examen juridique tous les six mois. Les juges ne sont pas obligés de présenter des preuves, et les délibérations sont menées sous le prétexte de preuve « secrète » qui ne peut être révélée à cause de considérations de « sécurité ».

3. La Loi de 1979 (sur les Détentions) en Cas d’Urgence est utilisée dans les territoires de 1948 et à Jérusalem pour arrêter les Palestiniens hiérosolymitains et les citoyens palestiniens d’Israël. Elle permet au ministre israélien de la Défense d’émettre des ordres de détention pour des périodes de six mois renouvelables et a été de plus en plus utilisée depuis l’Intifada de l’Unité de 2021 qui a vu une très large mobilisation des Palestiniens.

Ces trois lois et ordres font partie du combat juridique incessant du régime israélien contre les Palestiniens à travers la Palestine colonisée. Elles accroissent le travail des tribunaux militaires israéliens, où les Palestiniens sont traités comme des menaces à gérer et par lesquels leurs vies sont soumises à de constants contrôles, surveillances et punitions. Mais à la différence des procédures des tribunaux militaires, en rehaussant les notions souvent citées de protection de la « sécurité » et de maintien de « l’ordre public », cette politique permet à Israël d’incarcérer les Palestiniens sans avoir besoin de fournir de preuves ni de présenter les détenus devant un tribunal. Les lois fonctionnent pour punir efficacement les Palestiniens pour leur activité civique et politique, entravant ainsi leur résistance en tentant de leur instiller peur et soumission.

La nature arbitraire de la détention administrative est illustrée par le manque de réels mécanismes de contrôle judiciaire. En effet, et comme les détenus administratifs en attestent régulièrement, les détenus ne sont libérés qu’après l’accord de la Shabak, l’Agence de Sécurité d’Israël. Contrairement à ce que prétendent les tribunaux israéliens comme quoi les ordres de détention seraient contrôlés juridiquement, les détenus administratifs et leurs avocats pointent constamment le rôle dominant que joue la Shabak dans la détermination des périodes de détention. De cette façon, le processus d’examen juridique crée une apparence de contrôle judiciaire tout en permettant à Israël d’éviter les batailles juridiques grâce auxquelles les détenus et leurs avocats pourraient présenter une véritable défense – nonobstant le fait que les tribunaux militaires israéliens présument toujours de la « culpabilité » d’un Palestinien qu’il faut juger et condamner.

C’est encore mieux illustré dans les multiples cas de Palestiniens qui sont transférés dans des centres de détention administrative quand les autorités israéliennes sont incapables de les accuser dans les tribunaux militaires. Par exemple, Bashir Khairi, âgé de 80 ans, a été arrêté en octobre 2021 et a d’abord été présenté avec une liste d’accusations au tribunal militaire d’Ofer. Un mois plus tard, et à cause de l’incapacité du tribunal militaire à l’inculper, le procureur militaire israélien a émis contre Khairi un ordre de détention administrative de six mois qui a depuis été renouvelé.

La Détention Administrative en Pratique

Le régime israélien justifie la détention administrative comme nécessaire pour des raisons de « sécurité ». Dans la pratique cependant, l’utilisation de la politique par Israël ne s’accorde jamais avec les restrictions établies par le droit humanitaire international et le droit relatif aux droits de l’homme. Elle vise plutôt à contrer le militantisme civique et politique des Palestiniens, à réprimer la résistance et à essayer d’instiller la peur dans la population colonisée. Ce qui veut dire que la détention administrative n’est jamais utilisée en tant que mesure « préventive » dans des circonstances « exceptionnelles » : elle est au cœur de la politique qui inflige des dommages sans fin aux détenus palestiniens, à leurs familles et aux institutions civiques et politiques palestiniennes en général.

En réalité, l’utilisation de la détention administrative par Israël est une forme de guerre psychologique. Avant tout, elle soumet les détenus et leur famille à un perpétuel état d’incertitude. Comme les ordres de détention administrative peuvent être indéfiniment renouvelés, les détenus ne savent jamais vraiment quand ils seront libérés. Dans de nombreux cas, la détention est renouvelée quelques heures seulement avant l’expiration de l’ordre. Cette réalité a été décrite par un détenu comme comparable au mythe grec de Sisyphe dans lequel ce personnage maudit se bat pour transporter un rocher en haut d’une montagne, échouant toujours au moment d’atteindre le sommet et ainsi obligé d’entreprendre à nouveau son voyage.

La détention administrative n’est jamais utilisée en tant que mesure ‘préventive’ dans des ‘circonstances exceptionnelles’ : elle est au cœur d’une politique qui inflige des dommages sans fin.

Le nombre de Palestiniens en détention administrative a varié au cours des années. Pendant la Première Intifada, on a estimé qu’un total de 14.000 Palestiniens avaient été retenus en détention administrative, tandis que pendant la Seconde Intifada, les chiffres ont évolué entre 700 et 1.000 détenus administratifs tous les mois. Et pendant l’Intifada de l’Unité de 2021, le régime israélien a réagi en faisant un usage extensif de la détention administrative dans la Palestine colonisée. Rien qu’à la fin de 2021, le commandant militaire israélien en Cisjordanie avait émis 1.595 ordres de détention administrative, dont le renouvellement d’ordres émis antérieurement contre d’actuels détenus palestiniens. Aujourd’hui, parmi les 4.700 Palestiniens emprisonnés par Israël, 640 sont en détention administrative, dont des enfants, des militants, des travailleurs de la société civile et des membres du Conseil Législatif Palestinien (CLP).

La réalité vécue par les détenus palestiniens représente une partie de la violence que le régime israélien leur inflige depuis longtemps à eux et à leurs familles avec ces pratiques carcérales. Plus généralement, l’utilisation largement répandue et arbitraire de la détention administrative par Israël affecte tous les Palestiniens de la Palestine colonisée. Du fleuve à la mer, les Palestiniens vivent dans une réalité dans laquelle ils ne savent pas quand, pourquoi, ou pour combien de temps ils pourraient être mis en prison. 

Défier la détention administrative israélienne

Depuis qu’Israël utilise la détention administrative, les détenus palestiniens ont utilisé quantité de tactiques pour défier cette politique. Au cours des décennies d’occupation israélienne, les détenus ont organisé des protestations à l’intérieur des prisons, des grèves de la faim individuelles ou collectives, et des boycotts des tribunaux militaires et de leurs processus juridiques – tactiques de résistance qui ont souvent été confrontées à des mesures violentes et punitives.

Amnesty International a rapporté que des détenus administratifs palestiniens ont entamé une grève de la faim dans la Prison al-Naqab dès février 1989. La résistance des détenus s’est poursuivie dans les années 1990 : après la signature des Accords d’Oslo, qui a inauguré une nouvelle ère de détention administrative largement répandue et illimitée, les détenus ont annoncé, le 4 août 1996,  le premier boycott des tribunaux militaires. Ce boycott a duré six mois sans obtenir aucun changement concret. Pendant cette période, des détenus palestiniens ont aussi brûlé leurs lits en bois et les tentes des prisons pour protester encore plus contre leur détention.

L’utilisation par Israël de la détention administrative a augmenté pendant la Seconde Intifada. Tandis que seulement 32 Palestiniens ont été détenus en novembre 2001, en mai 2002, ce nombre a monté en flèche jusqu’à plus de 700. Pendant la Deuxième Intifada, les détenus palestiniens ont eu recours à de multiples mesures de protestation, y compris brûler leurs lits et les tentes, rejetant les ordres des autorités carcérales, refusant d’accepter et de signer les ordres de renouvellement de détention, et manifestant dans les cours des prisons. Les détenus se sont également engagés dans plusieurs boycotts des tribunaux militaires, même s’ils ne furent pas très répandus et ont rarement duré plus de trois mois.

En décembre 2011, le détenu administratif palestinien Khader Adnan a entamé sa première grève de la faim, exigeant la fin de sa détention administrative et sa libération immédiate. La grève a duré 66 jours, après quoi un accord a été atteint pour mettre fin à sa détention e le libérer le 17 avril 2012. Adnan a eu recours à des grèves de la faim pendant ses détentions suivantes en 2015 et 2018. Inspirés par la première grève de la faim d’Adnan, des dizaines de détenus administratifs ont fait de même individuellement avec leurs propres grèves. Le 24 avril 2014, les détenus administratifs ont commencé une grève de la faim collective qui a duré deux mois. La grève a été interrompue le 25 juin 2014, sans qu’Israël ait fait des concessions et avec seulement un accord pour poursuivre le dialogue sur les questions relatives à la détention administrative. Jusqu’à aujourd’hui, les détenus continuent de recourir à des grèves de la faim en tant que mesure de protestation contre l’utilisation de cette politique par Israël.

Les Palestiniens du fleuve à la mer vivent dans une réalité dans laquelle ils ne savent pas quand, pourquoi, ni pour combien de temps ils pourraient être emprisonnés.

L’efficacité de grèves de la faim individuelles face à la politique de détention administrative élargie est fréquemment en débat parmi les Palestiniens, mais cela vaut la peine de faire remarquer qu’ils ont obtenu l’attention internationale et qu’ils ont mis un projecteur sur l’impact de la détention administrative sur les détenus et leurs familles. Par ailleurs, les grèves de la faim déplacent le poids politique sur Israël. C’est-à-dire que le régime israélien peut accepter de libérer des détenus administratifs ou bien risque de grandes manifestations et une vaste mobilisation dans l’éventualité où la santé des grévistes de la faim se détériorait en détention.

Plus largement, les grèves de la faim et autres formes de protestation des détenus administratifs illustrent la centralité de cette politique pour le régime israélien. Même si ces tactiques n’ont réussi qu’à assurer la libération de détenus individuels, leur utilisation systématique et leur durée historique illustrent le rôle essentiel et stratégiquement symbolique des détenus administratifs dans l’ensemble de la lutte des Palestiniens pour leur libération.

« Notre Décision, c’est la Liberté »

En janvier 2022, les détenus administratifs palestiniens ont entamé un boycott collectif des tribunaux militaires d’Israël selon ce slogan : « Notre décision, c’est la liberté. Non à la détention administrative. » Dans une déclaration publiée, les détenus ont spécifiquement souligné la nature arbitraire des arrestations en détention administrative et décrit l’effet physiquement et psychologiquement néfaste que cette pratique leur a fait subir. Par ailleurs, ils ont appelé à la solidarité et au soutien pour leur boycott des tribunaux militaires, qu’ils ont entamé après avoir atteint un point de non retour dans les négociations avec la Shabak et le Service Carcéral Israélien.

Le boycott s’est appliqué à tous les niveaux des tribunaux militaires israéliens : les détenus se sont mis à refuser d’assister aux procédures et aux audiences du tribunal, et les avocats à boycotter les sessions du tribunal. Les détenus ont ensuite menacé d’entreprendre une grève de la faim collective si le boycott ne parvenait pas à obliger Israël à satisfaire leur demande de mettre fin à cette politique. En organisant ces démarches à la hausse comme faisant partie d’un « mouvement de résistance massif et uni », la déclaration témoignait de la conviction des détenus dans le pouvoir d’une action collective.

Le boycott est arrivé à un moment où le Service Carcéral d’Israël cherchait à fragmenter le mouvement des détenus et à mettre en place une large série de mesures punitives contre tous les prisonniers palestiniens, particulièrement pour répondre à l’évasion de six prisonniers de la prison de Gilboa en septembre 2021. Le boycott s’est aussi installé avec l’utilisation accrue par le régime israélien de la détention administrative contre les Palestiniens de Jérusalem et des territoires de 1948 grâce à la vague de résistance continue à travers la Palestine colonisée, qui a débuté en mai 2021.

La portée et la durée du boycott des détenus a souligné les moyens par lesquels la politique carcérale et juridique du régime israélien impacte la vie des Palestiniens, qu’ils soient en détention ou pas. En réalité le régime carcéral d’Israël s’étend au-delà des confins des prisons et des salles d’interrogatoire pour impacter la vie des Palestiniens de la Palestine colonisée qui, soit ont des membres de leur famille en détention, soit sont en attente de détention pour des motifs arbitraires.

Le boycott des tribunaux militaires israéliens de 2022 par les détenus administratifs palestiniens a ainsi affirmé que les structures juridiques du régime israélien ne peuvent offrir la justice, car elles sont spécifiquement prévues pour blesser et punir les Palestiniens et les priver de leur volonté de résistance. En agissant ainsi, le boycott a miné tout sentiment de légitimité que les tribunaux militaires israéliens essaient de revendiquer et a confirmé que l’action collective est nécessaire pour mettre fin à la politique de détention administrative.

Ce qu’il faut faire

Juste alors que le boycott des détenus administratifs a gagné en popularité pendant la première moitié de 2022, les Palestiniens et leurs alliés devraient se mobiliser pour s’assurer que la pratique de la détention administrative du régime israélien prend fin. Plusieurs organisations palestiniennes et internationales on réclamé la fin de cette politique et souligné son impact sur les Palestiniens plus largement. On y trouve Amnesty International, Addameer : Association de défense des Droits de l’Homme et des Prisonniers et Défense des Enfants International – Section de Palestine.

Mais il faut faire plus :

* L’Autorité Palestinienne (AP) et son associée la Commission des Affaires des Détenus et Ex-Détenus devraient mettre en exergue devant la communauté internationale les effets néfastes de la détention administrative sur les Palestiniens. Elles doivent plaider dans tous les forums internationaux pour la fin de cette politique, y compris en demandant qu’Israël soit tenu pour responsable de ses violations des lois internationales sur les droits de l’homme qu’elle a ratifiées.

* Les organisations de la société civile palestinienne, dont celles qui travaillent sur les questions relatives aux prisonniers, devraient continuer de rejoindre le soutien aux détenus administratifs palestiniens, à la fois localement et internationalement. Le travail d’Addameer est remarquable pour ses campagnes créatives et continues contre la détention administrative, qui mettent en lumière le lien étroit de la politique avec le fonctionnement des tribunaux militaires du régime israélien.

* A travers la Palestine colonisée, les Palestiniens et leurs alliés devraient organiser plus activement des événements publics et des manifestations en soutien aux prisonniers palestiniens, dont les détenus administratifs.

* Les familles des détenus administratifs devraient créer un comité de travail qui devrait centraliser les démarches de solidarité pour le compte des détenus. Cette démarche, copiant d’autres comités organisés en Palestine et internationalement – Les Mères de la Plaza de Mayo en Argentine, par exemple – devrait accentuer la lumière sur le plus grand impact de la politique sur la société palestinienne.

* Les associations internationales de solidarité avec la Palestine devraient inclure le système carcéral du régime israélien dans leurs campagnes de boycott et de désinvestissement. Ces campagnes devraient cibler toute société profitant du régime carcéral israélien, dont l’entreprise Hewlett Packard et G4S qui est actuellement la propriété d’Allied Universal. Elles devraient aussi amplifier les appels à mettre fin au programme d’Échange Mortel entre Israël et les agences de maintien de l’ordre américaines – tactiques qui se manifestent dans les prisons et les centres de détention à travers la Palestine colonisée.

1. Le 27 juin 2022, un comité représentant les détenus administratifs a émis une déclaration annonçant un gel de la campagne de boycott. La déclaration indiquait que les détenus administratifs avaient conclu un accord avec les autorités carcérales pour restreindre l’utilisation de la détention administrative, particulièrement contre les femmes et les enfants, et d’envisager la libération des détenus âgés et malades.

2. Auparavant, la détention administrative était autorisés selon deux ordres : l’Ordre Militaire 1226 et l’Ordre Militaire 1591.

3. Bashir Khairi a été libéré de sa détention administrative le 7 juillet 2022.

Basil Farraj a obtenu son doctorat en Anthropologie et Sociologie à l’Institut Universitaire de Genève. L’œuvre de Basil se concentre sur les prisonniers politiques, la violence carcérale et les pratiques de confrontation des prisonniers avec les régimes carcéraux. Ses recherches traitent des croisements entre la mémoire, la résistance et l’art des prisonniers et autres personnes soumises à la violence. Basil a mené des travaux sur le terrain dans de nombreux pays dont le Chili, la Colombie et la Palestine.

Source : Al-Shabaka

Traduction J. Ch. pour l’Agence média Palestine

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