Le 22 août 2022
Dimanche 21 août 2022, Al-Haq a envoyé plus de 80 lettres à des États tiers, leur demandant instamment d’agir à l’heure où les autorités israéliennes ont convoqué pour interrogatoire les directeurs généraux de deux des organisations désignées, les menaçant d’arrestations et d’emprisonnement si leur activité de défense des droits humains continuait.
Le 18 août 2022, à environ 3h du matin, les Forces d’occupation israéliennes (IOF) sont entrées dans Ramallah, pénétrant de force dans les bureaux des six organisations de la société civile palestinienne désignées – Al-Haq, Addameer, le Centre Bisan de recherche et développement, Defense for Children International – Palestine (Défense des enfants International – Palestine, DCI-P), l’Union des comités de travailleurs agricoles (UAWC) et l’Union des comités de femmes palestiniennes (UPWC) –, saccageant leurs locaux et confisquant leur matériel. Les IOF ont également attaqué le siège des Comités des travailleurs de la santé. Au titre de sa loi antiterroriste de 2016 et de l’ordonnance militaire du 3 novembre 2021, Israël a désigné ces organisations comme « terroristes » et « associations illégales ». Ces désignations ont fait l’objet d’une condamnation collective et d’une mise en garde par des experts de l’ONU ; selon eux, l’utilisation abusive par le gouvernement d’Israël de mesures antiterroristes de ce type constitue un danger pour la sécurité de tous.
Jeudi18 août 2022, suite à une décision de Benny Gantz rejetant le recours formé par Al-Haq et les autres organisations contre leur mise hors la loi, l’ordonnance militaire a pris pleinement effet dans le territoire palestinien occupé (TPO). Yehuda Fox, commandant militaire israélien, a alors conduit une incursion armée dans Ramallah pour imposer par la force la fermeture des six organisations, tentant d’empêcher le travail des défenseurs des droits humains et violant ainsi gravement le droit fondamental à la liberté d’expression et d’association. Des soldats ont scellé les bureaux pour en interdire l’entrée et ont fixé à la porte principale une ordonnance militaire. Ce texte contenait une mise en garde : « les personnes qui administrent l’organisation doivent procéder à sa fermeture, s’abstenir de la gérer et maintenir sa fermeture, dès le moment où elles reçoivent cette injonction ». Les fermetures sont un exemple du mépris d’Israël pour le droit international ; elles constituent la tentative la plus récente d’entrave au travail mené par des organisations respectées de défense des droits humains pour qu’Israël réponde des graves crimes internationaux commis dans le TPO, à savoir des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Le 21 août 2022, à 9h31, les IOF ont convoqué le directeur général d’Al-Haq, M. Shawan Jabarin, pour interrogatoire à la base militaire d’Ofer, proche de Ramallah. L’homme chargé de la convocation, qui s’est présenté sous le nom de Capitaine Fahed, a informé M. Jabarin qu’Israël et l’armée israélienne avaient désigné Al-Haq comme entité illégale et organisation terroriste, qu’elle était fermée et qu’Israël n’autoriserait pas l’organisation à rester ouverte et à fonctionner. Cet homme a affirmé faussement qu’Al-Haq avait des liens avec le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et que M. Jabarin en était membre. Il a menacé M. Jabarin, annonçant qu’il y aurait un prix à payer, y compris un prix personnel concernant Shawan, sous forme d’emprisonnement, interrogatoires et d’autres mesures, si Al-Haq continuait à mener ses activités.
Le même jour, à 14h25, M. Khaled Quzmar, avocat et directeur général de Defence for Children International – Palestine (DCI-P) a été convoqué pour un interrogatoire à la base militaire d’Ofer par un agent du Shin Bet. À 15h20, un témoin a dit avoir vu M. Quzmar escorté dans les locaux du Shin Bet. M. Quzmar n’a pas été autorisé à être accompagné par un conseiller juridique. Deux heures après, le Shin Bet l’a libéré et il a eu le droit de rentrer chez lui.
La situation s’est désormais fortement détériorée et les équipes des six organisations désignées, en particulier M. Shawan Jabarin et M. Khaled Quzmar, courent un risque grave et immédiat d’arrestations arbitraires, de poursuites sur la base d’éléments de preuve secrets, de détention administrative et d’appropriation de leurs fonds et de leurs avoirs bancaires ainsi que de ceux des organisations. De plus, le travail humanitaire et de défense des droits humains de ces organisations est gravement menacé par ces fermetures.
Al-Haq demande de façon pressante à la communauté internationale de prendre sans délai des mesures ciblées et effectives pour protéger les directeurs généraux et le personnel des six organisations, qui affrontent aujourd’hui des menaces portant sur leur existence.
- Intervenir sans délai pour protéger M. Khaled Quzmar et M. Shawan Jabarin contre les interrogatoires, les arrestations arbitraires et le placement en détention ;
- Enjoindre à Israël d’annuler en toute urgence et sans délai la désignation des organisations comme « terroristes », constituant une violation de la liberté d’opinion, d’expression et d’association assimilable aux actes d’apartheid et passible de poursuites en vertu de l’Article 7(2)(h) du Statut de Rome ;
- Condamner la loi antiterroriste de 2016 et demander instamment son annulation car elle est incompatible avec les principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité ;
- Demander instamment à Israël de mettre fin sans délai à toutes les pratiques et politiques visant à intimider et à réduire au silence les défenseurs des droits humains, qui violent leur droit à la liberté d’expression notamment au moyen de la détention arbitraire, de la torture et d’autres mauvais traitements, de l’institutionnalisation des discours de haine et d’incitation à la haine, des révocations de permis de résidence, des déplacements forcés, et d’autres mesures coercitives ou punitives ;
- Demander aux États tiers de continuer leur soutien aux six organisations et d’accroître leur financement, y compris le financement de base, et s’adresser aux institutions financières dans chacun des États afin d’assurer le transfert de fonds aux six organisations ;
- Exhorter la communauté internationale à exercer des pressions sur Israël afin qu’il abroge sans délai l’ordonnance militaire désignant les six organisations comme des associations illicites, ainsi que l’ordonnance militaire imposant la fermeture des locaux des organisations et criminalisant le travail des six organisations et de leur personnel ;
- Demander à la communauté internationale de considérer ces désignations comme des actes de persécution et d’apartheid, et veiller à ce qu’elles soient poursuivies en tant que crime international ;
- Prendre des mesures concrètes, telles que des restrictions commerciales et des embargos sur les armes, pour faire en sorte qu’Israël soit tenu pour responsable au niveau international quant à ses actes inhumains d’apartheid, incessants et systématiques, notamment la persécution des défenseurs palestiniens des droits humains.
Source : Al-Haq
Traduction SM pour l’Agence média Palestine