Une coalition d’ultra-droite se dessine alors que Netanyahou fait son retour sur la scène politique

Par Omar Karmi, le 3 novembre 2022 

Benjamin Netanyahu semble prêt à revenir au pouvoir. (Ilia Yefimovich ZUMA)

Avec plus de 90 % des votes dépouillés, il semble acquis que les cinquièmes élections israéliennes en moins de quatre ans marqueront le retour de Benjamin Netanyahou à la tête d’une coalition religieuse d’ultra-droite.

Netanyahou, chef du parti Likoud, semble prêt à obtenir une majorité de cinq sièges. Mais alors qu’il pourrait être le nouveau Premier ministre – un retour remarqué pour ce vétéran de la politique, criblé de scandales et toujours accusé de corruption – l’homme qui fait la Une des journaux est Itamar Ben-Gvir, un suprémaciste juif, chef du parti Otzma Yehudit (Pouvoir juif).

Ce parti est membre de l’alliance du Sionisme religieux, le grand gagnant du dernier scrutin, qui devrait devenir le troisième plus grand groupe de partis d’Israël.

Une coalition potentielle entre le Likoud de Netanyahou, Ben-Gvir et Bezalel Smotrich des Sionistes religieux, ainsi que le parti religieux Shas et le Judaïsme unifié de la Torah, suggère que les électeurs israéliens ont adhéré en bloc à l’idée d’occupation permanente et d’apartheid.

Le seul parti sioniste de gauche pour lequel la paix avec les Palestiniens constituait même une question, Meretz, semble bien parti pour perdre tous ses sièges.

Ni le Likoud ni l’alliance sioniste religieuse n’ont le moindre intérêt à céder des terres à un État palestinien ou à permettre une quelconque souveraineté réelle aux Palestiniens, sans parler d’un semblant d’égalité des droits. Au contraire, pendant la campagne électorale, Netanyahou a juré d’annexer toutes les colonies d’Israël – ce qui est considéré comme un crime de guerre par le droit international. Il ne trouvera aucune objection de la part de Ben-Gvir et Smotrich, tous deux colons.

S’il y a bien un moment où l’Autorité palestinienne doit se détourner du projet vain d’Oslo, c’est maintenant. Toutefois, les expériences passées semblent indiquer que personne au sein de la direction de l’Autorité palestinienne n’a le courage nécessaire pour le faire.

L’Autorité palestinienne, de moins en moins pertinente, ne fera que le devenir davantage.

Pour les Palestiniens sur le terrain, l’élection risque d’entraîner davantage de tensions mais aucun changement substantiel réel. Après tout, sous la précédente coalition « tout le monde sauf Netanyahou », Israël étendait librement ses colonies, détenait et tuait des Palestiniens tout en démolissant leurs maisons.

Néanmoins, le triomphe électoral de Ben-Gvir est un nouvel embarras pour la « communauté internationale » – c’est-à-dire les pays occidentaux menés par les Etats-Unis, qui sont les principaux parrains des accords d’Oslo – qui devront désormais justifier leur soutien à un gouvernement israélien qui contredit sans vergogne la politique américaine et internationale.

L’héritier de Meir Kahane

Qui est cet homme – exclu de l’armée israélienne à l’adolescence parce qu’il était trop extrémiste – qui a tant enthousiasmé les électeurs israéliens ?

Pendant la campagne, une publicité de Ben-Gvir montrait une femme effrayée appelant son mari à propos d’hommes menaçants devant son appartement. Il est sous-entendu que les hommes sont des « Arabes ». Les émeutes raciales, prévient la publicité, pourraient se reproduire.

« Il est temps d’être les maîtres de la maison », affirme la publicité. « C’est le moment pour Ben-Gvir. »

Ben-Gvir est un admirateur de Meir Kahane, dont le mouvement a été désigné comme un groupe terroriste par les États-Unis et d’autres pays, dont Israël. Certains l’ont appelé l’héritier de Meir Kahane.

Kahane, un suprémaciste juif, a plaidé pour faire d’Israël un État théologique, a prôné la ségrégation, a voulu priver les citoyens palestiniens d’Israël de leur citoyenneté et a demandé l’interdiction du mariage entre Juifs et non-Juifs. Ben-Gvir le considère toujours comme un « héros ».

Il possédait également un portrait de Baruch Goldstein – qui a assassiné 29 Palestiniens en prière à Hébron en 1994 – dans son bureau.

En 1995, deux ans après la signature des accords d’Oslo par Yitzhak Rabin, Ben-Gvir a connu sa première notoriété en brandissant l’emblème Cadillac de la voiture de Rabin à la télévision israélienne.

« Nous avons eu la voiture [de Rabin]. Nous l’aurons aussi », a-t-il déclaré. Rabin est assassiné par un extrémiste juif quelques semaines plus tard.

Il affirme s’être modéré en vieillissant. Par exemple, il fait maintenant chanter à ses partisans « la mort aux terroristes », plutôt que « la mort aux Arabes » qu’ils avaient l’habitude de chanter. 

Et il reste un suprémaciste juif non-construit qui, pendant des années, a été jugé indésirable, même en Israël, qui applique un système d’apartheid contre les Palestiniens.

Avocat de métier, il est devenu le défenseur attitré de tous les types d’extrémistes israéliens. En 2015, il a défendu des colons accusés d’un incendie criminel qui a fait brûler vifs Ali Dawabsheh, 18 mois, et ses parents.

Un homme de son temps

Ben-Gvir emploie une rhétorique violente et porte une arme de poing, ce dont il semble fier. Le 13 octobre, il a sorti cette arme dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est, occupé par Israël, et a exhorté les colons à tirer si quelqu’un jetait des pierres. 

Plus tard, il a demandé sur Twitter aux troupes israéliennes de « botter le cul de l’ennemi ».

Après avoir reçu les sondages de sortie des urnes, Ben-Gvir n’a pas déçu ses inconditionnels partisans. « Il est temps d’être à nouveau les propriétaires de ce pays », a-t-il déclaré à ses partisans mardi soir.

C’est un message qui a trouvé un écho auprès d’un public israélien de plus en plus à droite.

Les partis de gauche ayant du mal à franchir le seuil électoral, la paix avec les Palestiniens n’a une fois de plus joué qu’un rôle mineur dans le choix de l’électorat israélien.

Cela devrait être une révélation pour tous ceux qui croient qu’il y a un espoir dans les négociations avec un échelon politique israélien qui n’a jamais été sérieux à propos d’Oslo, mais qui est maintenant devenu vocalement anti-paix dans une tentative de séduire des électeurs qui dérivent toujours vers la droite.

Cette attitude a certainement été intériorisée par les millions de Palestiniens, qui vivent sous la domination israélienne en territoire occupé mais n’ont pas le droit de vote. Fatiguée d’attendre une Autorité palestinienne impuissante, une nouvelle résistance a vu le jour, qui ignore tout simplement les diktats sécuritaires de l’Autorité palestinienne et pose le premier défi sérieux à l’armée israélienne depuis des années.

Avec Ben-Gvir prêt à occuper un ministère important – il veut le poste de sécurité publique – cela pourrait signifier une aggravation d’une situation déjà instable et un déchaînement des foules de colons déjà endémiques.

Cela pourrait également s’avérer un casse-tête pour Netanyahou. Il a beau être le grand manitou de la liste, pour une fois, Netanyahou ne sera pas la voix de la droite dans une coalition au pouvoir.

Trad. A.G pour l’Agence Média Palestine

Source : The Electronic Intifada

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