Les scientifiques palestiniens exhortent l’EMBO à déplacer ses workshops hors de l’apartheid israélien, notamment du site du massacre de Tantura

Par l’Académie palestinienne des sciences et des technologies, le 14 février 2023

Le 19 janvier 2023, après avoir appris que l’Organisation européenne de biologie moléculaire (EMBO) organisait plusieurs workshops (ateliers) au sein de l’apartheid israélien, l’Académie palestinienne des sciences et des technologies (PalAST) a envoyé la lettre suivante au conseil d’organisation :

En tant que sociétés et syndicats scientifiques et universitaires palestiniens, nous notons avec une vive inquiétude que l’Organisation européenne de biologie moléculaire (EMBO) prévoit trois workshops au sein de l’apartheid israélien. Nous demandons instamment à l’EMBO de déplacer immédiatement ces workshops dans tout autre pays qui ne commet pas de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Le régime illégal de colonisation pratiqué par Israël dans les territoires palestiniens occupés est considéré comme un crime de guerre par le droit international.

Les ateliers de l’EMBO portent sur « La biophysique cellulaire bactérienne : réplication de l’ADN, croissance, division, taille et forme » (11-15 décembre 2022), « La voie de dégradation du protéasome 20S » (8-12 janvier 2023) et « Les mécanismes du remodelage neuronal » (11-14 mars 2023).

Quelles que soient les intentions qui la sous-tendent, la tenue d’un seul de ces ateliers de l’EMBO au sein de l’apartheid israélien, alors que celui-ci continue de nier les droits fondamentaux de millions de Palestiniens, contribuera à prolonger les crimes bien documentés d’Israël contre les Palestiniens.

D’éminentes organisations de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, Human Rights Watch et l’ONG israélienne B’Tselem, ainsi que les experts des Nations unies, ont tous déclaré Israël coupable du crime contre l’humanité que constitue l’apartheid.

Le lieu prévu pour le dernier atelier est particulièrement offensant pour nous, Palestiniens. Bien qu’il soit présenté comme « magnifique » et « isolé » sur « les plus belles plages d’Israël » dans une zone de « sérénité et de tranquillité », il s’agit en fait du site d’un massacre et d’un charnier.

En mai 1948, pendant le nettoyage ethnique des Palestiniens autochtones de notre patrie, l’armée israélienne a attaqué le village palestinien de Tantura. Après s’être emparés du village, les soldats israéliens ont abattu pas moins de 200 civils palestiniens captifs et non armés. Le témoignage des soldats israéliens présents lors du massacre, qui a fait l’objet d’un récent documentaire, montre la sauvagerie avec laquelle les soldats ont agi : « Ils les ont mis dans un tonneau et les ont abattus dans le tonneau ».

Après le massacre, les corps des Palestiniens massacrés ont été enterrés dans un charnier. En juin 1948, quelques semaines seulement après le massacre et après avoir expulsé les Palestiniens restants de Tantura, les colons sionistes ont repris les maisons palestiniennes, rebaptisant le village Nahsholim. Aujourd’hui, le charnier se trouve sous le parking de la plage. C’est là que l’EMBO prévoit d’organiser son atelier sur « Les mécanismes du remodelage neuronal ».

Tantura n’est pas le seul site d’un massacre commis par le régime israélien, et les massacres n’ont pas seulement leurs places dans le passé. Ils font partie de notre expérience quotidienne. Au cours des 18 derniers mois, Israël a mené deux attaques militaires de grande envergure contre les Palestiniens de la bande de Gaza, tuant des centaines de personnes, dont plus de 80 enfants, blessant des milliers de personnes et détruisant des infrastructures vitales. La bande de Gaza, qui compte 2 millions de résidents palestiniens, subit depuis 15 ans un siège israélien brutal et illégal.

Les partenaires de l’EMBO pour ces workshops sont profondément complices des crimes constants d’Israël contre les Palestiniens. L’université Ben-Gurion (BGU), par exemple, accueille le Homeland Security Institute, qui compte parmi ses partenaires les plus grandes entreprises d’armement d’Israël et le ministère de la défense.

L’Institut Weizmann propose un programme de maîtrise spécialement conçu pour les soldats en service actif et a récemment ouvert une académie prémilitaire qui préparera les élèves du secondaire à un « service militaire constructif ».

La Fondation scientifique binationale États-Unis-Israël finance des recherches dans des colonies israéliennes illégales construites sur des terres palestiniennes occupées militairement, en violation du droit international.

En mars dernier, l’EMBO a approuvé une déclaration de sept académies des sciences nationales, quelques jours seulement après l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, définissant cette invasion comme « une attaque contre les principes fondamentaux de liberté, de démocratie et d’autodétermination, qui constituent la base de la liberté académique et des possibilités d’échange et de coopération scientifiques ».

L’EMBO doit également reconnaître que le régime d’occupation militaire et d’apartheid d’Israël, qui dure depuis des décennies, constitue une atteinte aux libertés et au droit à l’autodétermination des Palestiniens, et doit s’abstenir d’organiser des workshops en Israël tant que le régime d’apartheid de ce pays n’aura pas été démantelé, comme l’a été celui de l’Afrique du Sud.

L’EMBO a l’obligation morale de mettre fin à sa complicité dans le blanchiment des crimes d’Israël. Nous demandons instamment à l’EMBO de respecter cette obligation en déplaçant les ateliers à venir. Nous appelons également les intervenants à ne pas participer, si les ateliers se déroulent comme prévu.

Il n’y a pas de « sérénité » et de « tranquillité » au-dessus du charnier résultant d’un massacre.

(PAlAST tiendra ses collègues universitaires informés de toute réponse de l’EMBO).

Source : Palast – Palestine Academy for Science and Technology

Traduction : MUV pour l’Agence Média Palestine

Une première publication de cette lettre a inclus par erreur une image incorrecte. Nous avons immédiatement pris des mesures pour la retirer et nous nous excusons pour toute offense qu’elle a pu causer.
Cela n’enlève rien au cas bien documenté du massacre de Tantura, tel que mentionné dans la lettre.

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