Enquêter et démanteler l’apartheid : Le plan israélien de nettoyage ethnique des Palestinien.ne.s de Gaza

Il s’agit d’une mise à jour de la note politique du 23 octobre, qui détaille les demandes de la société civile palestinienne.

Par l’Organisation « Enquêter et démanteler l’apartheid », le 25 octobre 2023

Le secrétaire général de l’ONU s’est adressé au Conseil de sécurité le 24 octobre, reconnaissant que la crise récente « ne sort pas de nulle part ». Le contexte, crucial à la compréhension, s’inscrit dans 16 ans de siège israélien illégal , 56 ans d’occupation militaire israélienne brutale et illégale et 75 ans d’apartheid israélien . La guerre  « génocidaire »  menée par Israël contre Gaza prend racine dans cette histoire ; elle est profondément liée au déplacement forcé et à la dépossession de la population palestinienne en Cisjordanie occupée encore en cours (le plus agressivement à Jérusalem-Est, et autour dans la vallée du Jourdain et les collines du sud Hébron), comme en Galilée et au Negev. 

Le projet de nettoyage ethnique à Gaza

Le 25 octobre, un important journal israélien a révélé un plan israélien visant à nettoyer ethniquement les 2,3 millions de Palestinien.ne.s, ou la plupart d’entre eux.elles, de la bande de Gaza occupée et assiégée pour les déplacer de force en Égypte. Le document divulgué, produit par le bureau du ministre israélien du Renseignement, recommande ce transfert forcé qui devra suivre l’offensive actuelle d’Israël à Gaza, en raison de ses résultats « stratégiques positifs à court et à long terme ».  

Les responsables israélien.ne.s actuel.le.s et ancien.ne.s souscrivent à des plans similaires. Giora Eiland, ancien chef du Conseil national de sécurité d’Israël, a proposé que les Palestinien.ne.s de Gaza reçoivent l’ordre de « partir pour l’Égypte ou de se rassembler au bord de la mer » le temps qu’Israël rende le territoire  « temporairement ou définitivement inhabitable ». L’ancien ambassadeur israélien aux États-Unis, Danny Ayalon, a affirmé que « les Gazaoui.e.s disposent de vastes zones dans le Sinaï vers lesquelles ils.elles peuvent évacuer » et où la communauté internationale peut « installer des tent cities pour les recevoir ». Le ministre de l’Energie, Israel Katz, a ordonné à « toute la population civile » de Gaza  « de partir immédiatement ». Le député du Likoud Ariel Kallner, a souhaité pour Gaza « une Nakba qui éclipserait la Nakba de 1948 ». En 2014, le vice-président du parlement israélien, Moshe Feiglin a présenté un plan similaire.

Au moment même où Israël ordonnait aux 1,1 million de Palestinien.ne.s « d’évacuer » le nord de Gaza pour se diriger vers le sud, un « think tank » étroitement lié au bureau du Premier ministre israélien Netanyahu et dirigé par d’ancien.ne.s responsables de la sécurité nationale a proposé un plan de « réinstallation et de réhabilitation finale en Égypte de la population entière de Gaza ». En réaction, le rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés a mis en garde contre un « nettoyage ethnique massif ».

L’Égypte , soutenue par la Ligue arabe et l’Organisation de la coopération islamique, a résolument rejeté ces projets israéliens, rappelant à Israël, puissance occupante, que le déplacement forcé de la population palestinienne constitue un crime de guerre.

Ces plans israéliens actuels et antérieurs de nettoyage ethnique reflètent ce que le peuple palestinien appelle une « Nakba continue » de déplacements forcés et de dépossessions sans fin. En mars dernier, le ministre israélien des Finances Bezalel Smotrich, un « fasciste » autoproclamé , a appelé à la destruction de la ville palestinienne de Huwara. Plus tard ce mois-là, il a déclaré que « le peuple palestinien n’existe pas ». En 2017, il avait proposé  l’installation d’une « réalité claire et irréversible [une théocratie juive] sur le terrain » pour mettre fin à toute « illusion d’un État palestinien ».

Une année meurtrière en Cisjordanie

Au cours de l’été, trois communautés palestiniennes de Cisjordanie ont subi un nettoyage ethnique. Depuis le 7 octobre, avec la « guerre » comme alibi, jouissant d’une impunité sans précédent grâce au soutien militaire, financier et diplomatique des États-Unis et des grandes puissances européennes, des colons israéliens fanatiques, enhardis et habilités par le gouvernement d’extrême droite israélien, ont déplacé de force au moins 82 familles palestiniennes de leurs villages en Cisjordanie occupée.

Bien qu’à une échelle totalement différente, les crimes de guerre israéliens en cours en Cisjordanie se sont accélérés depuis le 7 octobre. 2023 s’était déjà illustrée comme une des années les plus meurtrières en termes de mort de Palestiniens et de Palestiniennes aux mains des forces israéliennes et des colons, et l’année la plus meurtrière jamais enregistrée en ce qui concerne les enfants palestiniens en Cisjordanie. Depuis le 7 octobre, plus de 100 Palestinien.ne.s, dont des enfants, ont été assassiné.e.s en Cisjordanie par les forces israéliennes et par les colons. Alors que la politique israélienne de détention arbitraire et de torture est endémique depuis des décennies, ces pratiques criminelles ont pris après le 7 octobre, une tournure terrifiante dans sa cruauté, comparable uniquement à la torture dans la prison américaine d’Abu Ghraib en Irak. 

La famine comme arme

Le plan de nettoyage ethnique d’Israël est une expression de son « intention génocidaire », comme l’ont noté d’éminents universitaires internationaux, notamment des experts en génocide, ainsi que des organisations américaines et palestiniennes de défense des droits de l’homme. Oxfam, par exemple, vient de publier un rapport confirmant les preuves fournies par des organisations palestiniennes selon lesquelles Israël « utilise la famine comme arme de guerre » contre les civil.e.s à Gaza. Raz Segal, spécialiste israélien du génocide, a décrit la situation à Gaza comme « un cas d’école de génocide », et les expert.e.s de l’ONU ont appelé à « empêcher le génocide ». 

Des États, dont l’Afrique du Sud et l’Algérie, ont condamné la guerre génocidaire menée par Israël à Gaza lors du débat du Conseil de sécurité de l’ONU le 24 octobre. D’autres États ont pointé du doigt des violations systématiques du droit international, notamment des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis par Israël contre le peuple palestinien. 

« Avec l’instauration d’un rapport d’oppression, la violence est déjà là. Jamais dans l’histoire la violence ne fut initiée par les opprimé.e.s… la violence est initiée par ceux.celles qui oppriment, qui exploitent, qui ne reconnaissent pas les autres comme des personnes – et jamais par ceux.celles qui sont opprimé.e.s, exploité.e.s et non reconnu.e.s. » –  Paulo Friere, philosophe brésilien

Le cessez-le-feu, une urgence absolue

 Il faut s’attaquer à ce régime israélien de colonialisme de peuplement et d’apartheid vieux de 75 ans, cause profonde de la violence actuelle, pour mettre fin à toute violence et pour que le peuple palestinien puisse exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et le droit au retour des réfugié.e.s conformément à la résolution 194 de l’AGNU (l’Assemblée générale des Nations Unies). Un cessez-le-feu à Gaza et le respect du droit international sont d’une nécessité absolue et exigibles immédiatement. Si Israël refuse, l’expert de l’ONU en matière de droit au logement suggère que l’AGNU  « prive Israël de son siège afin de provoquer un cessez-le-feu et [son respect] du droit international », comme elle l’a fait « en 1974 pour le régime apartheid de l’Afrique du Sud ». 

« Investigate & Dismantle Apartheid » ou « Enquêter et démanteler l’apartheid » a été lancé par des organisations de la société civile palestinienne et soutenu au niveau international par des dirigeant.e.s politiques, des diplomates, des personnalités culturelles, des organisations et des personnes de conscience, c’est un effort anti-apartheid mondial mené par des Palestiniens et Palestiniennes qui vise à activer les mécanismes de l’ONU pour enquêter sur et démanteler le régime apartheid d’Israël en mobilisant les efforts sur le terrain.

Source : Enquêter sur et démanteler l’apartheid

Traduction BM pour l’Agence Média Palestine

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