L’Agence de l’ONU avertit que l’enclave a un urgent besoin d’aide face à l’aggravation de la crise.
Par Mera Aladam, Middle East Eye, le 9 décembre 2024
L’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) a signalé que 945 000 Palestiniens de Gaza risquent d’être exposés aux rigueurs de l’hiver, alors que la crise humanitaire dans l’enclave s’aggrave.
Sur X, l’UNRWA a déclaré que des familles déplacées ont besoin de protection contre la pluie et le froid, ajoutant que seulement 23% de cette demande a été satisfaite.
« L’Unrwa continue d’apporter son soutien en distribuant des bâches en plastique et en installant des tentes pour offrir des abris temporaires et une protection contre les conditions difficiles. L’aide est requise de toute urgence pour répondre aux besoins écrasants alors que la crise s’aggrave », a expliqué l’Agence.
Selon le dernier rapport publié par l’UNRWA jeudi, les attaques israéliennes contre Gaza ont déplacé au moins 1,9 million de personnes dans l’enclave dévastée par la guerre, ce qui représente environ 90 % de la population. Certains ont été déplacés 10 fois ou plus.
L’Agence a indiqué que plusieurs obstacles empêchaient les approvisionnements humanitaires d’entrer dans la bande de Gaza, notamment « la détérioration de l’ordre public, la guerre et l’insécurité, les infrastructures endommagées, les pénuries de pétrole et les restrictions d’accès ».
En outre, la sécurité alimentaire dans la bande de Gaza s’effondre, laissant la population dans un « état de pur désespoir », selon le rapport.
Le mois dernier, deux filles et une femme ont été tragiquement tuées à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, à cause de la surpopulation d’une des rares boulangeries toujours opérationnelles dans la zone.
Philippe Lazzarini, commissaire général de l’UNRWA, s’est inquiété de l’aggravation de la « catastrophe humanitaire » dans l’enclave.
« Les mots nous manquent. La faim et les maladies se répandent », il a déclaré dans un message posté sur X.
« Les acteurs humanitaires doivent être autorisés à faire leur travail. Les obstacles à l’aide doivent être levés sans délai, sinon d’autres vies seront perdues. Cette situation ne cesse de mettre à l’épreuve notre humanité commune ».
« Un crime contre l’humanité »
Selon le rapport de l’UNRWA, l’accès à l’aide au nord de Gaza a été particulièrement difficile, laissant entre 65 000 et 75 000 personnes sans accès aux nécessités essentielles comme de la nourriture, de l’eau, de l’électricité ou des soins de santé fiables.
« Des opérations militaires intenses continuent dans un contexte d’absence quasi-totale d’aide humanitaire dans la zone, ainsi que de sévères perturbations des communications et de l’Internet », indique le rapport de l’UNRWA. Certaines parties dans le nord de la bande sont soumises à un siège renforcé depuis 60 jours », indique le rapport.
Balakrishnan Rajagopal, professeur de droit au MIT et rapporteur spécial de l’ONU sur le droit au logement, a déclaré à Middle East Eye qu’Israël était responsable, en tant qu’État, de « toutes ces graves violations du droit international ».
« L’imposition d’un siège, l’interdiction de tout accès à la nourriture, à l’eau, aux médicaments et aux abris, tout cela dans l’intention de forcer une population à partir, est un parfait exemple de nettoyage ethnique et constitue un crime grave au regard du droit international. C’est à la fois un crime de guerre et un crime contre l’humanité », a déclaré M. Rajagopal.
« Les déplacements forcés au nord de Gaza dans des conditions de siège avec l’intention d’éliminer leur présence sont des actes génocidaires, puisqu’ils visent à la destruction d’un peuple », a-t-il ajouté.
Depuis plus de deux mois, Israël impose un black-out sur le nord de Gaza dans le cadre d’un plan militaire qui sévèrement empêche les habitants restants de contacter le monde extérieur et de partager des informations sur ce qu’ils endurent. Néanmoins, d’horribles rapports sur la famine, les bombardements et les déplacements de population continuent d’émerger.
Les médias, les analystes et les responsables militaires israéliens, ainsi que les Palestiniens de Gaza, affirment que la campagne actuelle correspond au « plan des généraux », également nommé le « plan Eiland ».
Ce plan vise à effectuer un véritable nettoyage ethnique des Palestiniens dans le nord de la bande de Gaza avant de transformer la région en zone militaire fermée.
« La décimation du système de santé »
Le rapport de l’ONU a également mentionné les frappes israéliennes continues qui ont tué des Palestiniens et détruit des bâtiments résidentiels et des infrastructures publiques.
Les bombardements aériens, terrestres et maritimes israéliens sur la bande de Gaza ont fait 44 758 morts et plus de 106 134 blessés, selon les derniers chiffres du ministère palestinien de la santé.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), au moins un quart des personnes blessées avant le 23 juillet, soit environ 22 500 personnes, sont estimées avoir « ses blessures bouleversantes qui nécessitent aujourd’hui et pour les années à venir des services de rééducation » – notamment de graves blessures aux membres dans la majorité des cas.
Suite aux attaques israéliennes continues, Gaza compte désormais le plus grand nombre d’enfants amputés par habitant dans le monde, indique le rapport de l’UNRWA.
« L’augmentation considérable des besoins de rééducation se produit en parallèle avec la décimation actuelle du système de santé », a déclaré Richard Peeperkorn, représentant de l’OMS dans les territoires palestiniens occupés.
« Les patients ne peuvent pas obtenir les soins nécessaires. Les services de rééducation sont gravement perturbés et les soins spécialisés pour des blessures complexes ne sont pas disponibles, ce qui met leurs vies en danger. Une aide immédiate et durable est nécessaire de toute urgence pour répondre aux énormes besoins de rééducation ».
Des attaques contre des établissements de santé ont été signalées dans toute la bande de Gaza, ce qui, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (ORCHA), a davantage entravé l’assistance et les services médicaux dans l’enclave.
Une grave pénurie de matériel médical et de consommables entrave également l’offre de soins de santé essentiels à Gaza. L’UNRWA prévient qu’au moins 60 médicaments seront épuisés dans leurs centres de santé d’ici la fin de l’année.
Source: Middle East Eye
Traduction: SP pour l’Agence Média Palestine