Un appel du syndicat des professeur.e.s et employé.e.s de l’université de Birzeit aux communautés académiques et culturelles du monde entier.
Par le syndicat des professeur.e.s et employé.e.s de l’université de Birzeit, le 2 novembre 2023
Au vingt-septième jour de la guerre génocidaire menée par l’État occupant et colonisateur d’Israël contre le peuple palestinien à Gaza et dans toute la Palestine historique – date funeste qui coïncide avec celle de la tristement célèbre Déclaration Balfour du 2 novembre 1917 qui a doté de son sceau d’approbation impériale le projet colonial sioniste sur notre terre – nous déclarons au monde que nous sommes toujours en vie et engagé.e.s dans la lutte nationale pour la liberté et l’autodétermination. Nous déclarons que notre peuple, qui compte plus de 15 millions d’habitant.e.s dans le monde, demeure inébranlable en Palestine et dans toute la diaspora. Nous renouvelons notre appel à nos partenaires dans le monde, aux défenseurs.euses de la justice et de la liberté, et à celles et ceux qui sont solidaires de notre juste lutte nationale, qu’ils et elles se tiennent à nos côtés contre les vagues les plus brutales de génocide et de nettoyage ethnique auxquelles nous sommes confronté.e.s depuis plus de sept décennies.
Au début de cette guerre, nous avions publié une déclaration intitulée « Nous sommes tous des Palestiniens et Palestiniennes » pour attirer l’attention sur cette guerre qui dure depuis un siècle contre le peuple de la Palestine comme sur les injustices historiques qu’elle a entraînées. Nous avons également affirmé la volonté inébranlable de notre peuple de s’engager dans toutes les formes d’actes révolutionnaires, confronté.e.s, comme nous le sommes, à des niveaux de violence coloniale sans précédent. Aujourd’hui, nous nous adressons à vous avec cette déclaration que nous avons appelée « Nous sommes toutes et tous le Sud ». Les forces impérialistes et leur pouvoir hégémonique, qui ont longtemps nourri le projet sioniste sur notre terre, se sont une fois de plus alignées sur le récit ringard évoquant le « clash des civilisations contre la barbarie », un récit qui vise à briser la volonté de vie et de liberté du peuple palestinien. Nous voulons dépeindre la situation telle que nous la voyons et telle que nous la vivons – non seulement à cause de cette dernière itération de violence, mais parce que nous avons longtemps enduré et, malgré tout, survécu avec vigueur à la violence du colonialisme.
Au cours de la guerre actuelle, l’armée coloniale a pris pour cible notre peuple vivant à Gaza, situé dans la partie sud de notre littoral, déchaînant une violence sans précédent grâce aux armes éminemment destructrices accumulées dans son arsenal, fournies et réapprovisionnées par ses alliés occidentaux. Si la guerre est menée avant tout (jusqu’ici) depuis le ciel de Gaza, elle s’accompagne aussi de meurtres, de destructions et d’arrestations brutales contre notre peuple en Cisjordanie, à Jérusalem et dans les territoires occupés en 1948. L’État colonisateur se sert de toutes les armes coloniales issues de son arsenal usuel, tant contre les corps et les esprits que de nature juridique, y compris le ciblage de nos universitaires et de nos étudiant.e.s dans les universités « israéliennes », simplement parce qu’ils et elles expriment leur empathie avec les victimes de l’agression à Gaza et leur compassion devant ses plaies ouvertes. Cela s’ajoute aux campagnes maccarthistes visant les universitaires, les étudiant.e.s, les intellectuel.le.s, hommes et femmes, et les artistes palestiniens et palestiniennes dans le monde entier, et qui oeuvrent inlassablement à les faire taire.
De notre point de vue national, éthique et humanitaire, nous nous devons de vous informer de la situation actuelle en Palestine et dans la diaspora en ce qui concerne les domaines académiques et culturels :
– Depuis le début de cette guerre sauvage contre Gaza, outre les maisons, les hôpitaux, les orphelinats, les mosquées, les églises et les abris sous la responsabilité des Nations Unies, « Israël » a délibérément et systématiquement pris pour cible les écoles, les universités, les institutions académiques et les centres culturels par des tirs d’artillerie directs et des bombardements incessants. Leurs actions militaires ont physiquement détruit les infrastructures institutionnelles à Gaza et paralysé le processus éducatif dans toutes les institutions académiques de Palestine, ciblant 53 universités et autres instituts d’enseignement supérieur affectant environ 250 000 étudiant.e.s, et 3 000 écoles secondaires et primaires affectant près de 1 500 000 étudiant.e.s. Ils ont intensifié leur campagne contre les intellectuel.le.s, les menaçant d’atteintes à leur intégrité physique, d’arrestations et de menaces sur leurs moyens de subsistance. Cette campagne a également donné lieu à des expulsions ciblées de professeur.e.s, d’étudiants et d’étudiantes, de travailleuses et de travailleurs dans les domaines universitaire et culturel.
– Outre son implication directe dans les crimes du système d’apartheid sioniste, le monde universitaire « israélien » participe désormais activement à la guerre génocidaire en utilisant ses ressources humaines, intellectuelles et promotionnelles. Cette campagne a reçu le soutien officiel de certaines institutions universitaires occidentales, exposant ainsi notre peuple et celles et ceux qui sont solidaires avec nous à des mesures violentes visant à imposer le silence et à effacer la Palestine et les voix palestiniennes partout où elles cherchent à se faire entendre. Alors que nous observons l’agressivité de ces institutions, nous appelons tous et à toutes nos camarades dans le monde, dans les syndicats, les institutions académiques, les centres de recherche et les collectifs, à s’engager dans le mouvement BDS, qui vise à mettre fin au soutien international à l’oppression du peuple palestinien par « Israël » et à faire pression sur « Israël » pour qu’il se conforme au droit international à travers une campagne de boycott, de sanctions et de désinvestissement à l’encontre des institutions « israéliennes ». La guerre génocidaire menée par « Israël » à l’encontre du peuple palestinien est une réalité.
La guerre génocidaire menée aujourd’hui par « Israël » ne laisse planer aucun doute sur les principes, les objectifs et la nécessité du mouvement BDS et de l’urgence et la pertinence de son appel lancé en 2005.
– Les tentatives timides et apologétiques faites par quelques universitaires et intellectuel.le.s dans les premiers jours de la guerre pour « condamner la violence des deux côtés » ne méritent pas de réponse. Cependant, nous devons une fois de plus souligner qu’il n’y a pas « deux camps » dans la guerre génocidaire actuelle, mais une armée criminelle seulement qui exerce sa brutalité contre un peuple assiégé qui défend sa vie et son droit à défendre cette vie. Il s’agit d’un nouveau round de la longue guerre menée par l’État colonisateur sioniste contre le peuple palestinien et contre sa résistance. C’est une guerre qui démontre clairement l’envergure de la droiture palestinienne face à l’excès de force « israélienne », où il n’y a pas d’équivalence morale entre le colonisateur et le colonisé, et il n’y en aura jamais. Il n’y a pas d’équivalence entre leurs épées et notre sang, et il n’y a pas d’équivalence entre le fer de leurs bombes et la chair de nos victimes.
Par conséquent, les évidences indisputables de l’horrible génocide à Gaza aujourd’hui ne laisse aucune place au débat sur la forme, le mécanisme ou l’objectif de la solidarité avec la Palestine et son peuple. Elle nous oblige à vous rappeler la grammaire humaine, intellectuelle et éthique commune dans notre lutte collective contre toutes les conditions coloniales dans le monde. Nous vous rappelons que la solidarité commence par la reconnaissance de la voix souveraine des opprimé.e.s et qu’ils et elles ont le droit de déterminer la forme, les moyens et les fins de leur lutte. Vous êtes nos partenaires dans notre humanité, et vous êtes nos partenaires dans la bataille pour la défendre : nous sommes tous et toutes le Sud, nous sommes toutes et tous les Palestiniennes et Palestiniens, ensemble nous sommes la Résistance, nous sommes Gaza.
2 novembre 2023
Source : Union des professeurs et des employés-es de l’université de Birzeit, Palestine occupée
Traduction BM pour l’Agence Média Palestine