L’entourage de Biden promet de lutter contre BDS

Par Josh Ruebner, le 4 février 2021

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Le Président Joe Biden, à gauche, avec la Secrétaire au Trésor, Janet Yellen, le 31 janvier. Yellen a promis d’agir contre le mouvement BDS à direction palestinienne. CNP/AdMedia/SIPA

L’administration Biden « adopte et défend » la définition de l’antisémitisme de l’IHRA, a déclaré lundi un responsable du Département d’État.

Kara McDonald, sous-secrétaire d’État adjointe à la démocratie, aux droits humains et au travail, a fait l’éloge de cette définition « et de ses exemples concrets » comme « outil inestimable » pour « appeler la haine par son nom et prendre des mesures efficaces », selon l’agence de presse JTA.

McDonald est la référente intérimaire de l’administration Biden sur cette question jusqu’à ce que soit nommé un représentant spécialement chargé de l’antisémitisme.

La définition de l’IHRA a été promue par Israël et ses groupes de pression.

Elle a été fortement contestée par les défenseurs des libertés civiles et par des organisations palestiniennes et juives, qui y voient un prétexte pour diffamer et censurer les partisans des droits des Palestiniens.

Son utilisation comme outil de censure a même été critiquée par l’auteur de la définition originale.

En effet, certains des exemples qui accompagnent la définition assimilent les critiques légitimes des politiques et actions du gouvernement israélien à des préjugés contre les Juifs.

Une opposition au vitriol contre BDS

Par exemple, considérer Israël comme une « entreprise raciste », comme l’a fait l’organisation israélienne des droits de l’homme B’Tselem lorsqu’elle a qualifié Israël de « régime de suprématie juive » qui pratique « l’apartheid », serait qualifié d’antisémitisme selon la définition.

Un autre exemple d’antisémitisme selon l’IHRA consiste à appliquer « deux poids, deux mesures » envers Israël « en exigeant de lui un comportement qui n’est attendu ou exigé d’aucune autre nation démocratique ». 

Selon cet exemple, toute campagne utilisant les tactiques de Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) pour défendre les droits des Palestiniens pourrait être considérée comme antisémite, à moins que les militants ne consacrent simultanément une attention et une vigueur égales à la lutte contre les violations des droits humains dans d’autres pays.

La déclaration de McDonald est un autre indicateur inquiétant de l’hostilité à attendre de l’administration Biden aux discours et aux actions en faveur des droits des Palestiniens. Plusieurs représentants de l’administration Biden ont également exprimé une opposition brutale, et même au vitriol, envers BDS lors de leurs auditions de confirmation au Sénat.

Lors de son audition du 19 janvier, le secrétaire d’État Antony Blinken a déclaré que le président Biden et lui-même étaient « résolument opposés » à BDS.

Faisant écho à l’exemple de l’IHRA, M. Blinken a affirmé que le mouvement BDS dirigé par les Palestiniens « distingue injustement Israël, de manière inappropriée et crée une double norme que nous n’appliquons pas aux autres pays ».

Sur la base de cette norme absurde, les Palestiniens eux-mêmes ne peuvent pas défendre leurs propres droits dans leur propre pays sans être accusés d’antisémitisme, à moins de mener simultanément des campagnes sur d’autres pays.

Cependant, Blinken a également déclaré : « Nous respectons pleinement et respecterons toujours le droit des Américains, en vertu du Premier amendement, de dire ce qu’ils croient et pensent. Mais BDS en soi est quelque chose à quoi nous nous opposons ».

Lors de son audience de confirmation du 27 janvier, Linda Thomas-Greenfield, la candidate du président Biden au poste d’ambassadrice des États-Unis aux Nations Unies, a formulé une dénonciation sans appel de BDS.

« Je trouve les actions et l’approche de BDS envers Israël inacceptables », a déclaré Mme Thomas-Greenfield. « Cela frise l’antisémitisme, et il est important qu’ils ne puissent pas avoir une voix aux Nations Unies. J’ai l’intention de m’y employer très fermement »

Les parallèles établis par Blinken et Thomas-Greenfield entre BDS et les exemples d’antisémitisme de l’IHRA sont troublants.

Signal d’alarme

Mais la position la plus troublante à l’égard de BDS a peut-être été exposée par la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, dans une réponse écrite aux questions posées par les Sénateurs avant son audience de confirmation.

Le Sénateur Mike Crapo, un républicain de l’Idaho, a noté à juste titre que « depuis plus de 40 ans, le département du Trésor a joué un rôle clé dans la lutte contre les actions internationales visant à boycotter Israël ».

Il a ensuite demandé à Yellen : « Si vous êtes confirmée, vous engagez vous à combattre les efforts de Boycott, Désinvestissement, Sanctions contre notre allié Israël ? »

Yellen a répondu que Biden s’est « efforcé de s’opposer à la délégitimation d’Israël, que ce soit dans les organisations internationales ou par le mouvement de Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) aux États-Unis ».

« Je soutiens l’approche du président Biden », a-t-elle ajouté, affirmant qu’elle « ferait en sorte, en tant que secrétaire au Trésor, de s’opposer aux activités de BDS dirigées contre Israël ».

La réponse écrite de Yellen n’était pas improvisée et devrait être considérée comme un signal d’alarme.

Le département du Trésor publie des directives instruisant le travail du Bureau de conformité antiboycott (OAC) du département du Commerce, qui inflige des amendes aux entreprises américaines participant au boycott d’Israël par la Ligue arabe.

La loi qui a conduit à la création de l’OAC – la loi sur l’administration des exportations de 1979 – a été adoptée des décennies avant l’avènement en 2005 du mouvement BDS dirigé par la société civile palestinienne.

Le sénateur Ben Cardin, un démocrate du Maryland, a tenté de modifier la loi par le biais de la loi anti-boycott d’Israël de 2017 afin d’imposer des amendes et une peine de prison allant jusqu’à 20 ans aux personnes qui soutiennent ou font la promotion de l’appel d’une organisation internationale au boycott d’une entreprise complice des violations des droits humains en Israël.

Le projet de loi a été rejeté grâce à la combinaison d’une levée de boucliers et d’une campagne de lobbying menée par des militants de la solidarité avec la Palestine et l’Union américaine des libertés civiles.

La promesse de Yellen de « s’opposer aux activités de BDS dirigées contre Israël » va bien au-delà de sa fonction d’émission de directives visant à appliquer les interdictions en cours contre le respect du boycott de la Ligue arabe.

Sa promesse fait au contraire surgir le spectre de son soutien à une future législation destinée à sévir contre les initiatives de la société civile visant à boycotter les entreprises et les institutions complices de violations des droits des Palestiniens.

La réponse de Yellen contredit potentiellement non seulement le témoignage de Blinken, mais aussi la plate-forme 2020 du Parti démocrate, qui s’oppose aux efforts de BDS à l’ONU « tout en protégeant le droit constitutionnel de nos citoyens à la liberté d’expression ».

Ces développements suggèrent que l’opposition rhétorique de Biden à BDS et, plus largement, à la lutte pour les droits des Palestiniens, sera semblable à celle des administrations Trump et Obama au mouvement – avec une importante notification d’opposition à la reconnaissance de la constitutionnalité du boycott des droits des Palestiniens.

Au cours de ses deux premières semaines, l’administration Biden a publié une série de décrets sur la réforme de l’immigration, le changement climatique et la justice raciale, et a suspendu les ventes d’armes à des régimes violant les droits humains comme l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

Elle a cependant porté un coup dramatiquement discordant à ces mesures, par ailleurs positives, en assimilant la critique légitime d’Israël à l’antisémitisme et en faisant tout son possible pour dénoncer et, éventuellement, agir contre les personnes engagées dans l’action de la société civile pour le soutien aux droits des Palestiniens.

Josh Ruebner est professeur adjoint à l’université de Georgetown, directeur général de American Muslims for Palestine et auteur de Israel : Démocratie ou État d’apartheid ? et Espoirs brisés : l’Échec d’Obama à négocier la paix israélo-palestinienne. Les opinions exprimées ici sont celles de l’auteur et ne représentent aucune organisation.

Source : The Electronic Intifada

Traduction SF pour l’Agence média Palestine

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