Restreindre l’aide militaire américaine à Israël à l’ère de la normalisation

Par Nadya Tannous, le 14 septembre 2021

Résumé 

Avec la montée de la solidarité mondiale avec les Palestiniens depuis l’Intifada unitaire de mai 2021, les décideurs politiques et les activistes américains appellent à conditionner et à arrêter l’aide militaire américaine à Israël. Nadya Tannous, chargée de mission d’Al-Shabaka pour la politique américaine, examine cette vague de changement et propose des recommandations sur la manière dont les décideurs politiques, les lobbyistes et la communauté internationale peuvent profiter de ce moment historique pour défendre les droits des Palestiniens.

Contexte

L’engagement de longue date des États-Unis à aider militairement Israël est assorti de nouvelles considérations à la lumière des récents développements en Palestine, aux États-Unis et au-delà. L’Intifada de l’unité, qui a éclaté à la suite du nettoyage ethnique des Palestiniens par le régime israélien à Sheikh Jarrah, de son attaque contre les fidèles du complexe de la mosquée d’Aqsa et de son assaut vicieux sur Gaza en mai 2021, a permis aux Palestiniens d’obtenir un soutien sans précédent de la part des militants et des décideurs politiques du monde entier, et même dans les couloirs du Capitole. Ce changement spectaculaire de l’opinion publique et politique mondiale est crucial pour la lutte palestinienne et offre l’occasion de faire pression pour des politiques qui tiennent Israël responsable de ses crimes contre le peuple palestinien. 

Cette note de politique générale replace l’aide militaire américaine à Israël dans son contexte historique, en soulignant à quel point cette aide est devenue centrale dans la dynamique régionale entre Israël et les États arabes, et entre les États arabes et la Palestine. Elle examine la manière dont la récente convergence des mouvements populaires mondiaux, et leur solidarité vocale avec la Palestine, remettent en question le statu quo des États-Unis. De la rue aux allées du pouvoir, une pression concertée pour conditionner, sanctionner et arrêter l’aide militaire américaine à Israël gagne du terrain dans le monde entier. 

Ce dossier propose des recommandations préliminaires aux militants, lobbyistes et décideurs politiques sur la manière de tirer parti ce moment de transformation dans l’histoire de la solidarité palestinienne. Une exploitation efficace du mouvement contribuerait à faire pression sur les États-Unis, Israël et leurs alliés pour qu’ils mettent fin à l’oppression des Palestiniens dans toute la Palestine historique.

La normalisation dans le contexte de l’impérialisme militaire américain

Depuis la création d’Israël en 1948, les États-Unis ont largement façonné leur relation avec le Moyen-Orient en maintenant la sécurité et l’influence d’Israël et de ses partisans. D’une part, ils l’ont fait en maintenant la domination militaire régionale d’Israël par un financement continu. D’autre part, ils ont négocié des accords de « paix » entre les États arabes et Israël, accords qui exigent des gouvernements arabes qu’ils soutiennent Israël politiquement et économiquement, ou, au moins, qu’ils s’abstiennent de condamner publiquement ses actions. 

Depuis 2001, Israël a reçu plus de 63 milliards de dollars d’aide à la sécurité de la part des États-Unis, dont plus de 90 % sont financés par le programme de financement militaire à destination de l’étranger (Forein Military Sales, FMS) du département d’État. Le FMS, communément appelé « chèque en blanc » à Israël, est financé par l’argent des contribuables américains et prend la forme de subventions d’armement. En mai 2021, la Carnegie Endowment for International Peace a indiqué que, pour l’année fiscale 2021, l’administration Trump a demandé 3,3 milliards de dollars de FMS pour Israël, ce qui constitue 59 % du budget FMS global demandé. 

Pour l’exercice 2022 à venir, l’administration Biden a demandé de reproduire ce système. L’engagement à ce niveau de financement a été spécifiquement institué par un protocole d’accord de 10 ans, signé sous l’administration de l’ancien président Barack Obama. Le rapport explique en outre qu’« Israël reçoit plus de FMS que tous les autres pays du monde réunis ». 

Parallèlement, les États-Unis ont fait directement pression sur les nations arabes pour qu’elles capitulent devant les intérêts israéliens en menaçant d’annuler leurs programmes d’aide militaire et leurs incitations financières à la coopération. Les deux premiers États arabes à normaliser leurs relations avec Israël sous la pression des États-Unis ont été l’Égypte (1979), qui est aujourd’hui le deuxième plus grand bénéficiaire de l’aide militaire américaine, et la Jordanie (1994), un pays dont la monnaie est l’une des plus fortes et des plus stables au monde grâce à des accords de longue date avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. Alors qu’auparavant, la normalisation des relations entre les nations arabes et Israël consistait en un échange de « terres contre la paix », les accords d’Abraham de 2020 servent de déclaration d’alliances, soutenues par un échange d’armes et la promesse d’une puissance militaire.

Tout au long de 2020, l’ancien président américain Donald Trump a inauguré une nouvelle ère de traités de normalisation négociés par les États-Unis entre Israël et les États arabes, plus précisément les Émirats arabes unis (EAU), Bahreïn, le Soudan et le Maroc. Ces accords sont intervenus au moment même où les Palestiniens étaient témoins de l’une des avancées les plus agressives du régime israélien. En effet, Israël poursuivait ses plans d’annexion de la zone C dans la vallée du Jourdain, procédait à des arrestations massives et à l’emprisonnement d’étudiants palestiniens, et intensifiait ses campagnes de nettoyage ethnique à Sheikh Jarrah, Silwan et dans d’autres parties de la Cisjordanie. De cette manière, les accords sapent directement les demandes palestiniennes d’autodétermination et normalisent la violence permanente du régime israélien à l’encontre des Palestiniens.

Les États-Unis ont directement fait pression sur les nations arabes pour qu’elles capitulent devant les intérêts israéliens en menaçant d’annuler leurs programmes d’aide militaire et leurs incitations financières à la coopération. Cliquer pour tweeter

Concernant les EAU et Bahreïn, les accords de septembre 2020 ont été reconnus comme un contrat d’armement de premier ordre entre deux gouvernements du Golfe pour des armes américaines. Selon un rapport du Center for International Policy, les États-Unis ont dominé les transferts d’armes vers les États du Golfe de 2015 à 2019, et restent le premier fournisseur de plus de deux tiers des États de la région. À la suite des accords, les Émirats arabes unis ont noté publiquement qu’ils attendaient 50 avions de combat F-35 et 18 systèmes de drones armés Reaper dans le cadre du contrat d’armement de 23,37 milliards de dollars approuvé par l’administration Trump en échange de la normalisation. 

Alors que le gouvernement soudanais a accepté de normaliser ses relations avec Israël en échange de la levée par les États-Unis des sanctions qui pèsent sur le pays au titre de la liste américaine des pays terroristes, et que le Maroc a normalisé ses relations en échange de la reconnaissance par les États-Unis de sa souveraineté sur le Sahara occidental, les Émirats arabes unis et Bahreïn ont normalisé leurs relations afin de renforcer leur position vis-à-vis des autres acteurs régionaux. En plus de faire pression pour des accords nucléaires qui neutraliseront l’Iran, les EAU et Bahreïn cherchent à défier l’Iran par confrontation militaire interposée, ce qui nécessite de renforcer leurs arsenaux militaires. 

Bahreïn, par exemple, a clairement indiqué qu’il s’attendait à être consulté par l’administration Biden avant toute négociation nucléaire. Ce contrat d’armement permet également aux EAU de stocker des munitions pour leur assaut militaire et leur trafic d’armes en Libye, ainsi que pour leur participation à l’attaque menée par l’Arabie saoudite au Yémen. D’un montant de 10 milliards de dollars, les contrats d’armement conclus dans le cadre des accords d’Abraham sont les plus importants de l’histoire des Émirats arabes unis et suggèrent un stockage de munitions en vue de futures actions militaires.

Pendant ce temps, le soutien du Golfe aux Palestiniens a vacillé, car les donateurs régionaux ont cessé de condamner les aspirations d’Israël ou de chercher à y faire obstacle, pour les faciliter à présent. En effet, les Émirats arabes unis ont récemment financé l’achat de propriétés à Jérusalem-Est, par l’intermédiaire de particuliers palestiniens, pour ensuite les vendre à des colons israéliens. Cette période de normalisation a été politiquement coûteuse pour les Palestiniens et, alors que les EAU et Bahreïn entrent dans leur première année de normalisation, leurs relations de plus en plus étroites avec Israël et leurs relations privilégiées avec les États-Unis vont certainement entraver la résistance palestinienne contre l’apartheid israélien, le colonialisme de peuplement et l’occupation militaire. 

Réponses législatives américaines et maintien de l’Avantage militaire qualitatif d’Israël

Aux États-Unis, les accords d’Abraham ont généré une variété de réponses au niveau législatif. En novembre 2020, le député Brad Schneider (Démocrate-Illinois) a soumis le projet de loi H.R. 8494, « Guaranteeing Israel’s Qualitative Military Edge », coparrainé par 19 autres députés. L’accord sur l’avantage militaire qualitatif (EMQ) garantit l’avantage militaire d’Israël dans la région, tant en matière de technologies militaires que d’armement, en tant que partenaire privilégié des États-Unis et en tant qu’État mandataire des intérêts américains. Il s’agit d’une pratique américaine de longue date, inscrite dans la législation américaine depuis 2008, et appliquée à la discrétion du Congrès. Le projet de loi est toutefois très important car il propose qu’Israël, et non le Congrès américain, détienne le pouvoir de décision sur les contrats d’armement américains au Moyen-Orient. 

Les accords de normalisation négociés par les États-Unis contribuent finalement à l’avantage militaire qualitatif d’Israël en lui permettant de fortifier la région contre un ennemi commun perçu comme tel : l’Iran. Cliquer pour tweeter

Le projet de loi de Schneider a été présenté dans la clameur des inquiétudes concernant la préservation de l’Avantage militaire qualitatif d’Israël à la lumière des ventes d’armes américaines aux États du Golfe. Cette inquiétude était largement ancrée dans la conviction qu’un renforcement des stocks d’armes chez les partenaires arabes pourrait menacer la sécurité d’Israël dans la région, malgré les dispositions des accords d’Abraham qui stipulent que les États arabes ne supplanteront jamais Israël sur le plan militaire. Ces accords de normalisation négociés par les États-Unis contribuent finalement à l’Avantage militaire qualitatif d’Israël en lui permettant de fortifier la région contre un ennemi commun perçu comme tel : l’Iran. Ainsi, dans le front militaire dirigé par les États-Unis et l’Arabie saoudite contre l’Iran, Bahreïn, les Émirats arabes unis et Israël se retrouvent dans le même camp

Pourtant, malgré les lignes directrices énoncées dans les Accords d’Abraham, en novembre 2020, les membres de la Commission des affaires étrangères du Sénat, menés par le président Robert Menendez (Démocrate-New Jersey), ont introduit une résolution conjointe contre la vente d’armes et ont invoqué l’Avantage militaire qualitatif d’Israël. La députée Ilhan Omar (Démocrate-Minnesota) a également protesté contre la vente d’armes en cours dans le cadre des Accords, en adoptant une formulation plus forte pour interdire complètement la vente, bien qu’elle ait cité les violations des droits de l’homme par les Émirats arabes unis, et non l’Avantage militaire qualitatif d’Israël, comme raison de l’interdiction. 

Il est important de replacer le projet de loi de Schneider dans son contexte, à la fois par rapport aux résolutions distinctes d’Omar et de Menendez, et dans le contexte de la loi Leahy. Cette loi de 1977, qui porte le nom du sénateur Patrick Leahy (Démocrate-Vermont), interdit les ventes d’armes et l’aide militaire américaines aux forces de sécurité des États étrangers qui commettent des violations flagrantes des droits de l’homme. Par conséquent, il existe un précédent juridique aux États-Unis pour conditionner l’aide en fonction des violations des droits de l’homme commises par un État par le biais de la loi sur l’aide étrangère, alors que la proposition de loi de Schneider les autorise. 

Salih Booker, du Center for International Policy, souligne qu’Israël est le seul pays au monde pour lequel les États-Unis ne suivent pas la trace des  armes pour savoir à quelle unité militaire elles sont destinées, ce qui rend pratiquement impossible l’application de la loi Leahy lorsqu’il s’agit d’Israël. La menace de conditionner l’aide américaine à Israël avant la Conférence de Madrid de 1994, où l’ancien Secrétaire d’État James Baker a temporairement retenu les garanties de prêt à Israël pour empêcher l’utilisation de l’argent pour la construction de colonies, est le seul exemple historique d’aide américaine conditionnée à Israël. Bien sûr, ce sont les Palestiniens qui ont rendu cela possible avec la première Intifada.

À l’été 2021, le projet de loi de Schneider n’est pas encore revenu pour vote, mais des développements ont été faits dans la foulée de la résolution de Menendez de novembre 2020. En janvier 2021, Biden a annoncé qu’il allait revoir toutes les ventes d’armes de l’ère Trump, mais en avril, il a mentionné que les États-Unis allaient, comme promis, aller de l’avant avec « un accord plus large avec les EAU d’une valeur de 23 milliards de dollars ». Il y a eu un débat continu entre Bahreïn, les EAU, Israël et l’administration Biden sur la question de savoir si la vente de F-35 se ferait réellement ou non, pourtant les stratégies adoptées par Menendez et l’administration Biden ne se préoccupent pas du bilan des EAU en matière de droits de l’homme ; elles se préoccupent du socle des priorités régionales américaines : le maintien de l’Avantage militaire qualitatif d’Israël

En effet, l’aide américaine alimente l’armée de l’air israélienne, en fournissant des milliards de dollars de carburant dans le cadre du programme de financement militaire à destination de l’étranger (FMS) de gouvernement à gouvernement. Depuis 2015, les États-Unis ont dépensé plus de 5,4 milliards de dollars en carburant d’aviation, en carburant diesel, en essence sans plomb et en avions de ravitaillement aérien. Il est prévu que les États-Unis envoient les 3,3 milliards de dollars de FMS à Israël tout au long de 2021, ce que le Congrès a approuvé sur une base bipartisane. 

En outre, les États-Unis devraient envoyer 500 millions de dollars supplémentaires pour la recherche, le développement et le déploiement conjoints de systèmes de défense antimissile américano-israéliens. En juin 2021, Israël devrait également demander au Congrès américain un milliard de dollars supplémentaires pour réapprovisionner le Dôme de fer et moderniser le système, ce qui porterait le FMS à 4,3 milliards de dollars. Fondamentalement, Israël restera au centre des intérêts américains au Moyen-Orient, et les États-Unis continueront de soumettre les actions militaires d’Israël à des normes différentes de celles de tout autre pays.

L’aide américaine à Israël au lendemain d’un moment de transformation

L’administration Biden ne s’est pas distinguée de l’administration Trump en ce qui concerne le soutien inconditionnel des États-Unis à Israël, qui est conforme au protocole d’accord décennal de l’administration Obama. L’administration Biden s’est engagée à soutenir l’expansion coloniale continue d’Israël. Cela est apparu clairement lorsque Washington n’a pas condamné le nettoyage ethnique flagrant d’Israël à Jérusalem et les crimes de guerre contre les Palestiniens à Gaza en mai 2021. 

Le 5 mai, le Congrès a été informé de la vente commerciale d’armes à guidage de précision à Israël pour un montant de 735 millions de dollars, ce qui a ouvert une période de 15 jours pendant laquelle les membres du Congrès pouvaient exprimer leur opposition. Entre le 5 et le 20 mai, le régime israélien a bombardé Gaza, tuant 243 Palestiniens. Les Israéliens ont également mené des attaques brutales contre des Palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem et des lynchages en groupe contre des Palestiniens dans les territoires de 1948, tandis que les forces israéliennes se tenaient à l’écart. À la suite de l’assaut sur Gaza, et à la fin de la période de 15 jours, les députés Alexandria Ocasio-Cortez (Démocrate-État de New York), Rashida Tlaib (Démocrate-Michigan), Mark Pocan (Démocrate-Wisconsin) et Bernie Sanders (Démocrate-Vermont) ont proposé une résolution conjointe du Sénat et une résolution conjointe de la Chambre des représentants pour arrêter la vente. 

Les organisations aux États-Unis continuent de mettre en évidence les intersections évidentes entre les systèmes en expansion de maintien de l’ordre militarisé, la violence coloniale, la guerre et le racisme aux États-Unis et en Israël. Cliquer pour tweeter

Ces efforts ont eu un impact sur les politiciens du Capitole, et ont amené les démocrates progressistes à faire des présentations au Congrès en soutien à la Palestine, en utilisant un langage jamais utilisé dans ces salles par les personnes au pouvoir. Le 13 mai, les députés Mark Pocan, Ilhan Omar, Ayanna Pressley, Cori Bush, Rashida Tlaib et Alexandria Ocasio-Cortez ont publiquement exprimé leur soutien au peuple palestinien au Congrès, appelant à la fin du financement de l’agression militaire israélienne. Pressley et Ocasio-Cortez ont décrit Israël comme un « État d’apartheid » et même la nouvelle députée Marie Newman (Démocrate-Illinois) a appelé le Département d’État à condamner le nettoyage ethnique de Sheikh Jarrah comme une violation du droit international.

Le 15 avril, la députée Betty McCollum (Démocrate-Minnesota) a soumis le projet de loi H.R.2590, intitulé « Defending the Human Rights of Palestinian Children and Families Living Under Israeli Military Occupation Act », qui est une version élargie du même projet de loi qu’elle avait précédemment présenté. Il a été coparrainé par 28 députés. Le projet de loi de McCollum vise à garantir que les fonds américains ne soient pas utilisés pour soutenir le système judiciaire militaire israélien, le déplacement forcé des Palestiniens par la démolition de maisons et les expulsions, et les annexions illégales de terres palestiniennes. Quelques jours plus tard, les députés Bernie Sanders et Elizabeth Warren (Démocrate-Massachusetts) ont ouvertement confirmé leur volonté de restreindre l’aide américaine à Israël, ou de retenir l’argent à destination de toute institution ou branche militaire israélienne responsable de violations des droits de l’homme. Notamment, Sanders avait spécifiquement retiré son opposition à la vente commerciale à ce moment-là. En outre, le 8 juin, plus de 100 organisations nationales de premier plan ont soumis une lettre à Biden l’exhortant à bloquer la vente, 73 démocrates centristes lui demandant de qualifier les colonies israéliennes d’illégales.

Au-delà du Capitole, des mouvements de base de Palestiniens et des dizaines de milliers de partisans de la Palestine sont descendus dans les rues des grandes villes américaines, pour protester contre l’usage disproportionné du pouvoir par le régime israélien, dévoiler les failles des discours de « paix » éculés qui détournent l’attention de la violence coloniale israélienne, et appeler à la liberté pour le peuple palestinien. Ces efforts ont été inspirés par la mobilisation sans précédent observée dans toute la Palestine historique et dans le monde entier, et qui a uni les Palestiniens pour repousser le nettoyage ethnique, la violence coloniale, l’apartheid et le siège, défiant ainsi efficacement leur fragmentation géographique et politique

Les organisations aux États-Unis continuent de mettre en évidence les recoupements évidents entre les systèmes en expansion de maintien de l’ordre militarisé, de violence coloniale, de guerre et de racisme aux États-Unis et en Israël, renforçant ainsi la lutte mondiale contre tous les principes du fascisme. Des campagnes en ligne et des militants sur différentes plateformes de médias sociaux ont également critiqué la contribution directe des États-Unis aux violations des droits des Palestiniens par Israël, et ont exigé que leurs représentants politiques agissent, notamment en annulant ou en conditionnant le chèque en blanc des États-Unis à Israël.

Le vent est clairement en train de tourner aux États-Unis. En mai 2021, le LA Times a cité une étude Gallup d’avril 2021 qui faisait état d’une augmentation massive du soutien à la Palestine au cours de la dernière décennie : d’un citoyen américain sur sept sympathisant principalement avec la Palestine, on est passé à un sur quatre. En outre, une enquête du Chicago Council d’août 2021 a montré que 50 % des Américains sont favorables à la restriction de l’aide militaire à Israël dans les opérations qui visent les Palestiniens, contre 45 % qui s’y opposent. Les démocrates soutiennent cette mesure à une écrasante majorité (62 %). Certes, nombre de ces citoyens américains réalisent de plus en plus que l’argent de leurs impôts contribue directement à l’assaut contre les Palestiniens.

Ce qu’il faut faire pour restreindre l’aide

Afin de saisir ce moment historique dans la défense des droits des Palestiniens :

  • Les activistes et les lobbyistes doivent faire pression sur les décideurs politiques et la communauté internationale pour qu’ils restreignent l’aide militaire américaine à Israël, notamment par le biais de sanctions. Ils doivent soutenir le projet de loi McCollum, une autre législation conditionnant l’aide à Israël, et faire pression pour une législation permettant de suivre les dépenses militaires d’Israël. Ils devraient promouvoir les groupes de base et les ONG qui se consacrent déjà à ce travail, notamment la Campagne américaine pour les droits des Palestiniens, le Projet de justice Adalah, les Musulmans américains pour la Palestine et l’American Friends Service Committee.
  • Les militants, lobbyistes et décideurs politiques doivent soutenir le mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS), qui fait partie d’une stratégie plus large visant à demander des comptes aux sociétés et entreprises impliquées dans des contrats d’armement avec Israël, notamment Raytheon, Boeing, Lockheed Martin, General Dynamics, Northrop Grumman et Elbit Systems. Ils doivent se joindre aux campagnes et initiatives municipales, telles que Divest From Death Dissenter, pour cibler ces entités et leurs activités qui contribuent à la violation des droits des Palestiniens et d’autres personnes dans la région. 
  • Les responsables politiques internationaux doivent promouvoir le mouvement croissant visant à tenir Israël responsable de ses violations permanentes – que ce soit dans les couloirs du Congrès, au niveau des entreprises ou même au niveau des États – par le biais de législations et de partenariats qui les protègent, en font l’éloge et les financent. Ils doivent parallèlement faire pression pour que des efforts législatifs conditionnent l’aide en fonction de la responsabilité en matière de droits de l’homme.
  • Les décideurs politiques américains doivent soutenir les voix des citoyens américains qui appellent et écrivent des lettres à leurs députés pour demander la fin du soutien militaire américain à Israël. Ils doivent également continuer à signer des pétitions dans le cadre de campagnes nationales visant à protéger les droits des Palestiniens.
  • Les décideurs politiques internationaux doivent s’opposer et exiger la révocation des lois anti-BDS qui étouffent et délégitiment la critique d’Israël, en particulier aux États-Unis. Ils doivent également exiger que l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) annule sa redéfinition de l’antisémitisme pour 2020, qui inclut la critique d’Israël, une redéfinition qui a déjà été adoptée par plusieurs gouvernements. Cette redéfinition controversée menace la liberté d’expression et constitue un obstacle majeur à la lutte contre le véritable antisémitisme et à la promotion des droits humains des Palestiniens.

Nadya Tannous est la boursière de l’été 2021 d’Al-Shabaka en charge de la politique américaine. Elle est une organisatrice communautaire passionnée, née et élevée dans la région de la baie (territoire Ohlone). Dans son travail, elle se concentre sur l’éducation politique, l’établissement de relations entre les mouvements, l’antimilitarisme et le retour de la terre au peuple et du peuple à la terre. Nadya est titulaire d’une maîtrise en études sur les réfugiés et la migration forcée de l’université d’Oxford et d’une licence en anthropologie et en études sur l’information mondiale et les entreprises sociales, de l’université de Santa Cruz.

Source : Al-Shabaka

Traduction M pour l’Agence média Palestine

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