Israël a déjà assassiné 11 078 Palestinien.ne.s – dont 5 840 enfants – depuis le 7 octobre, et blessé 27 490 personnes, et intensifie ses attaques de toutes parts sur une Gaza coupée du monde.
Par l’Agence Média Palestine, le 31 octobre 2023, mis à jour le 22 novembre 2023
Black-out médiatique
Alors qu’Israël intensifie toujours ses frappes sur la bande, notamment sur des écoles de l’UNRWA selon ce rapport de l’OCHA en date du 19 novembre 2023, les télécommunications et l’accès à internet permettant l’actualisation en temps réels des Palestinien.ne.s victimes des bombardements israéliens semblent être sérieusement entravées. En effet, depuis maintenant 1 semaine, OCHA, dont les chiffres dépendent du Ministère de la Santé de Gaza, n’a pas pu actualiser son rapport d’impact – soit le nombre de morts et de blessé.e.s depuis le 7 octobre. Des médias, tel que Reuters, parlent déjà de plus de 13 000 Palestinien.ne.s tué.e.s par Israël à ce jour.
S’ajoute à ce préoccupant désert de l’information, l’acharnement accru que subissent les journalistes palestinien.ne.s de la part d’Israël, alors qu’on dénombre 6 assassinats de membres de la profession en seulement deux jours à Gaza, entre les 18 et le 19 novembre derniers.
L’acheminement trop faible en carburant vers la bande provoque ce 19 novembre, l’accusation de 31 des 36 bébés prématurés, ainsi que 16 membres du personnel et des familles des bébés, de l’hôpital Shifa, dans la ville de Gaza, vers l’unité de soins intensifs néonatals d’une maternité, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. Les cinq autres bébés étaient décédés les jours précédents en raison de la coupure d’électricité et de carburant. Selon le ministère de la santé de Gaza, 259 autres patient.e.s qui n’ont pas pu être évacués sont toujours hospitalisé.e.s à Shifa.
Frappes israéliennes ciblées et intensifiées
Les bombardements et les affrontements armés autour de l’hôpital Shifa, dans la ville de Gaza, se sont intensifiés depuis l’après-midi du 11 novembre. Des infrastructures essentielles, dont la station d’oxygène, des réservoirs d’eau et un puits, le service cardiovasculaire et la maternité, ont été endommagées, et trois infirmières ont été tuées. Alors que de nombreuses personnes déplacées à l’intérieur du pays et certains membres du personnel et patient.e.s ont réussi à fuir, d’autres sont bloqués à l’intérieur, craignant de partir ou étant dans l’incapacité physique de le faire.
À l’Hôpital Shifa, trois bébés prématurés et dix autres patient.e.s sont décédé.e.s depuis la panne d’électricité qui a commencé le 11 novembre, et qui a ensuite été aggravée par le manque de médicaments. Trente-six autres bébés en couveuse ainsi que des patient.e.s sous dialyse rénale courent un risque jugé comme élevé de décès. Le 12 novembre, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a indiqué qu’elle avait perdu la communication avec ses contacts à l’hôpital Shifa.
Le 16 novembre, pour la deuxième journée consécutive, les forces israéliennes, accompagnées de chars, ont lancé une offensive contre l’enceinte de l’hôpital Shifa dans la ville de Gaza, prenant le contrôle de plusieurs sections. Selon le directeur de l’établissement, la partie sud du complexe a subi des dommages, notamment le service de radiologie, tandis que les forces ont pénétré à l’intérieur de l’hôpital pour emporter plusieurs corps.
Le 12 novembre également, le Croissant-Rouge palestinien a annoncé que l’hôpital Al-Quds, dans la ville de Gaza, n’était plus opérationnel en raison de l’épuisement du carburant disponible et d’une panne d’électricité.
Le bilan humain des morts atteint maintenant les 11 078 Palestinien.ne.s tuées par Israël depuis le 7 octobre, tandis que les bombardements s’intensifient.
Alors que les bombes larguées sur la bande de Gaza en 1 mois sont déjà 1.5 fois supérieures à la force explosive des bombes larguées sur Hiroshima durant la 2ème guerre mondiale, le groupe « Investigate and Dismantle Apartheid » indique dans cette note d’information urgente du 6 novembre qu’un ministre israélien propose de larguer une bombe nucléaire sur les Palestinien.ne.s à Gaza.
Aussi, dans la seule journée du 2 novembre 2023, quatre écoles de l’UNRWA – des camps de réfugié.e.s de Jabaliya, Burin et Al-Shate – ont été bombardées par l’armée israélienne. Le 4 novembre dernier, les écoles de l’UNRWA du camp de Jabaliya et de Nuseirat on été ciblées et touchées par des frappes aériennes israéliennes, tuant 15 Palestinien.ne.s et en blessant plus de 70.
L’entrée de l’hôpital Al-Shifa a elle aussi été ciblée et bombardée par Israël, le 3 novembre dernier. La frappe israélienne a pris pour cible un convoi médical au départ de l’hôpital, et se trouvait donc à l’entrée du bâtiment en attendant d’évacuer des blessé.e.s hors de Gaza. La frappe tue au moins 16 personnes et en blesse 60, indique cet article d’Al Jazeera.
Massacre à Jabaliya
Alors que Craig Mokhiber, directeur du bureau new-yorkais en charge des droits de l’homme à l’ONU a démissionné de son poste le 28 octobre dernier, atterré par l’inaction et le silence des gouvernements occidentaux et des instances internationales de droits humanitaire sur le nettoyage ethnique en cours à Gaza, Israël a assassiné mardi 31 octobre et mercredi 1er novembre plus de 400 personnes dans des frappes ciblées pulvérisant un quartier entier du camp de réfugié.e.s de Jabalia, une des zones les plus densément peuplées de la bande de Gaza.
La famine
Une nouvelle mise en garde de l’ONU a été émise quant au risque de famine à Gaza le vendredi 17 novembre. Depuis le début de l’offensive israélienne, cette enclave survit avec moins de 10% des provisions alimentaires nécessaires pour subvenir aux besoins de ses 2 millions d’habitants.« À Gaza, les habitants survivent en mangeant une fois par jour s’ils ont de la chance. Le blocage du carburant et les coupures de réseau nous empêchent de mener nos opérations », explique Samer Abdeljaber, directeur du programme alimentaire mondial en Palestine.
Les épiceries sont dépourvues de provisions, et les camions humanitaires en provenance d’Égypte n’ont pu parvenir jusqu’aux civils en raison du blocage d’Israël entravant tout approvisionnement en carburant. Dans une supérette à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, les habitants affamés parcourent parfois plusieurs kilomètres à pied en quête de nourriture, en vain.
Coupée du monde
Dans la nuit de vendredi 27 octobre au samedi 28, Israël a plongé Gaza dans le noir complet en coupant l’accès en électricité et en internet à l’enclave palestinienne, afin de procéder à des bombardements sans relâche et sans précédent de la bande. Depuis, le recours par Israël aux coupures d’électricité et d’accès à internet est récurrent lors de bombardements intensifs assénés sur Gaza, comme depuis hier par exemple.
L’intensification de ces bombardements s’amplifie et atteint un stade ne pouvant provoquer qu’une catastrophe humanitaire terrible et durable pour les années à suivre. En effet, en empêchant à la fois l’entrée de journalistes internationaux.ales à Gaza pour documenter mais aussi témoigner des crimes de guerre qui y sont perpétrés, et en interrompant maintenant tout contact avec les habitant.e.s de l’enclave- que ce soit par internet ou par téléphone -, Israël prépare le terrain pour de nouveaux massacres planifiés et cette fois-ci, pratiquement invisibles, des gazaoui.e.s.
Le simple fait que la catastrophe humanitaire en cours à Gaza ne puisse pas être couverte par les journalistes internationaux.ales est problématique, mais l’interruption totale de contact avec les civil.e.s et journalistes gazaoui.e.s sur place est alarmant au plus haut point. Gaza compte à ce jour, selon de récents rapports, 1,5 million de personnes déplacé.e.s de chez eux.elles et plus de 42% des habitations de la bande détruites.
Il n’y a pas de lieu sûr à Gaza, les hôpitaux et établissements de santé sont eux aussi à bout de souffle et menacés jour après jour de ne plus pouvoir assurer leurs missions.
De fait, depuis le 7 octobre, les hôpitaux de Gaza tirent la sonnette d’alarme en indiquant que sans carburant, sans électricité, sans eau potable et sans anesthésiant, le soin des patient.e.s – déjà précaire dans ces conditions – ne pourra bientôt plus être assuré. Le bilan des blessé.e.s atteint pourtant à ce jour le nombre de 27 490 personnes.
Claire Magone, directrice générale de Médecins Sans Frontières, évoque elle dans une intervention sur BFM TV la sentence de mort vouée aux Palestinien.ne.s par Israël : « Nous sommes condamné.e.s à assister à un sacrifice assumé et organisé de milliers de civil.e.s ».
Depuis le 7 octobre, au moins 16 travailleurs.euses de santé, 59 membres de l’UNRWA et 34 membres de la protection civile ont été tué.e.s dans l’exercice de leur travail par les bombardements israéliens, selon un rapport du 30 octobre de l’OCHA.
Aussi, selon une évaluation interne du département d’État américain, 52 000 femmes enceintes et plus de 30 000 bébés de moins de six mois boivent actuellement de l’eau contaminée à Gaza. Les risques de mort par famine, déshydratation ou d’épidémies inquiètent eux aussi le personnel de l’aide humanitaire et médicale, tandis qu‘un hôpital sur trois ne fonctionnent pas à Gaza et que les lieux d’alimentation basiques, tels que les boulangeries, sont visés par les frappes aériennes israéliennes, comme nous l’indiquait récemment notre correspondant local Hossam.
Le 29 octobre dernier, le médecin urgentiste à Gaza, Ghassan Abu Sitta, alertait sur l’utilisation de bombes au phosphore blanc par l’armée israélienne, dont l’utilisation est illégale au regard du droit international.
Les hôpitaux, qui pouvaient encore représenter à un certain degré pour les journalistes souhaitant couvrir la situation en temps réel, un espace relativement sûr où ils.elles pouvaient recharger leur téléphone, caméra et obtenir une connexion plus ou moins stable à Internet, ne peuvent désormais plus assurer cette mission de « refuge », depuis l’interruption totale d’accès à l’électricité et internet par Israël vendredi soir. L’hôpital Al-Quds, abritant 14 000 Palestinien.ne.s sans domicile depuis les bombardements israéliens, est également menacé par des frappes israéliennes depuis hier soir, et est sommé d’évacuer ces milliers de personnes.
Incursion terrestre
Alors que Gaza, après 1 mois de bombardements israéliens, compte près de 11 078 – dont 5 840 enfants – et est assiégée sous un tonnerre de bombes, ses habitant.e.s subissent également depuis le week-end du 27 octobre, ce qu’Israël appelle « la deuxième phase de son offensive »: l’incursion terrestre de l’armée à Gaza.
Chars blindés et escadrons militaires envahissent l’enclave dès vendredi soir, par air, terre et mer, alors que l’ONU adopte le jour-même une résolution – proposée par la Jordanie – établissant une trêve humanitaire « immédiate, durable et prolongée » visant à « protéger les civil.e.s et le respect des obligations juridiques et humanitaires ».
Malgré cette décision d’urgence votée par 120 pays siégeant à l’Assemblée générale des Nations Unies, les bombardements s’intensifient toujours à Gaza – comme le montre cette vidéo ci-dessous du 30 octobre du journaliste Motaz Azaiza – tandis que Yoav Gallant, ministre de la défense israélien, affirme que Gaza sera très différente après cette incursion et que la « guerre risque de durer des mois ».
Ce dimanche 29 octobre dernier, le procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan, s’est rendu sur place et affirme vouloir rentrer dans l’enclave afin de pouvoir témoigner de la situation humanitaire critique à Gaza. Il indique aussi que des enquêtes auront lieu, concernant les crimes perpétrés en Israël et à Gaza depuis le 7 octobre.
Les appels au cessez-le-feu se multiplient en vain, les rappels à l’ordre des instances humanitaires et de droit internationales exhortent Israël d’instaurer une trêve humanitaire, l’aide humanitaire au compte-goutte est d’une insuffisance colossale compte tenu de l’ampleur de la catastrophe humanitaire à laquelle Gaza fait face, tandis qu’Israël poursuit ses crimes de guerre, dans une impunité affligeante.