« Nous refusons de les voir mourir » : l’AFP alerte sur les conditions de vie des journalistes à Gaza

Dans un communiqué glaçant, les journalistes de l’Agence France Presse dénoncent les conditions de vie de leurs collaborateur-ices de Gaza, confronté-es comme tous-tes les habitant-es de l’enclave Palestinienne à la famine et au dénuement le plus total.

Par l’Agence Média Palestine, le 22 juillet 2025

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« Depuis que l’AFP a été fondée en août 1944, nous avons perdu des journalistes dans des conflits, nous avons eu des blessés et des prisonniers dans nos rangs, mais aucun de nous n’a le souvenir d’avoir vu un collaborateur mourir de faim », constate dans un communiqué publié hier la société des journalistes de l’Agence France Presse (AFP), qui craint pour la vie de ses 10 collaborateur-ices toujours à Gaza.

Depuis le début de l’offensive génocidaire à Gaza en octobre 2023, qui a fermé tout accès aux journalistes internationaux et empêché celles et ceux sur place d’en partir, l’AFP travaille avec un pigiste texte, trois photographes et 6 pigistes vidéo.

« Nous refusons de les voir mourir. »

Le communiqué de la société des journalistes (SDJ) de l’AFP rapporte que l’un d’entre elles et eux, Bashar, a posté un message sur les réseaux sociaux samedi dernier dans lequel il déclarait : « Je n’ai plus la force de travailler pour les médias. Mon corps est maigre et je ne peux plus travailler. »

Comme tous-tes les habitant-es de Gaza, les journalistes sont confronté-es aux bombardements, aux déplacements forcés, à la famine et aux épidémies qui découlent de la campagne génocidaire israélienne en cours depuis 21 mois. Le blocus depuis mars de l’aide alimentaire et son monopole depuis mai par la très controversée GHF entraîne une nouvelle phase de famine qui s’est gravement accentuée récemment, avec au moins 26 décès liés à la faim dans les 3 derniers jours. Les journaliste n’échappent bien entendu pas à ces conditions.

« Nous risquons d’apprendre leur mort à tout moment et cela nous est insupportable », dénoncent les journalistes de l’AFP. L’intersyndicale des journalistes, qui comprend la CGT, SNJ, SUD, FO, CFE-CGC et CFDT, a réagit par un communiqué exprimant sa solidarité avec les journalistes de Gaza, jugeant « intolérable que des collaborateurs qui mettent leur vie en danger pour informer le monde entier avec un courage inouï se retrouvent dans une telle situation de détresse, au point de risquer de mourir de faim. »

Le ministre des affaires étrangères Jean-Noël Barrot a réagit à cette annonce ce matin en demandant à ce que les journalistes indépendants soient autorisés à entrer à Gaza pour rendre compte de la situation dans l’enclave assiégée, sans pour autant annoncer d’action concrète en ce sens. Le blackout médiatique imposé par les restrictions israéliennes à Gaza est une entrave aux libertés de la presse.

Dimanche dernier, le syndicat des journalistes palestinien-nes (PJS) déclarait dans un communiqué : « Nous, au sein de la coalition des syndicats et fédérations palestiniens, affirmons que ce qui se passe à Gaza constitue un crime de guerre et un crime de génocide. (…) La politique systématique de famine et de privation de nourriture, d’eau, de médicaments et d’abris de la population constitue l’utilisation de la nourriture comme arme de guerre contre des civils sans défense. (…) Nous tenons la communauté internationale, sous la conduite des Nations Unies, pleinement responsable de la poursuite de ces crimes, en raison de son silence et de son incapacité à mettre fin à l’agression. »

La vie des journalistes de Gaza doublement menacée

Outre les conditions de vie dramatiques auxquelles sont confronté-es les journalistes de Gaza, ils et elles sont aussi la cible d’attaques israéliennes répétées les visant directement. Lors d’une conférence de presse tenue ce dimanche à Ramallah, le PJS a présenté son rapport semestriel sur la liberté des journalistes, qui recense 739 violations des droits des journalistes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza au cours des six derniers mois.

« Nous mettons en lumière la situation des journalistes dans le contexte des massacres commis par l’occupation en Cisjordanie et dans la bande de Gaza et du génocide dont notre peuple est victime », explique Mohammed Al-Laham, président de la Commission des libertés. Il ajoute que, au cours du premier semestre de cette année, Israël a intensifié ses crimes contre les journalistes palestinien-nes, assassinant 33 journalistes et faisant 41 mort-es parmi leurs familles, détruisant 32 de leurs maisons dans des bombardements. Le rapport recense par ailleurs 66 éclats d’obus et balles logés dans le corps de journalistes, la plupart provenant de roquettes, des blessures qui n’ont heureusement pas été fatales.

Mohammed Al-Laham ajoute que les attaques contre les journalistes ont augmenté par rapport à l’année passée. Il explique que pendant la première année du génocide perpétré par Israël à Gaza, les meurtres de journalistes survenaient sur le terrain, alors qu’aujourd’hui, « les journalistes sont pris pour cible dans les centres d’hébergement, dans les tentes et à l’intérieur des hôpitaux, ce qui constitue une preuve évidente de ciblage et d’extermination, et montre que la décision de tuer les journalistes est une décision politique. »

« Ces données confirment que l’occupation ne traite pas les journalistes comme des civils protégés par les Conventions de Genève, mais comme des cibles sur le terrain dont il faut faire taire la voix », dénonce le rapport.

Hier encore, un journaliste a été tué et le photojournaliste qui l’accompagnait blessé alors qu’ils interviewaient le Dr Marwan Al-Hams, directeur de l’hôpital Abu Youssef al-Najjar et porte-parole du ministère palestinien de la Santé à Gaza. Le médecin a été emmené par les forces israéliennes, et on ignore ce qu’il est advenu de lui à ce jour. Le ministère de la santé de Gaza a déclaré voir dans cet acte « intention délibérée de faire taire la vérité et d’occulter les souffrances de tout un peuple qui subit l’une des pires catastrophes sanitaires et humanitaires de son histoire. »

Depuis le 7 octobre 2023, Israël a assassiné 227 journalistes, blessé 480 autres, et détruit 112 structures et institutions de presse. Plusieurs enquêtes ont pu démontrer la dimension délibérée de ces attaques, et de nombreuses organisations de défense des droits humains et de la liberté de la presse ont dénoncé à de multiples reprises les crimes de guerre à l’encontre des journalistes commis par Israël à Gaza.

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